À l'affiche, Critiques // La vita ferma (la vie suspendue), texte et mise en scène Lucia Calamaro, Les Ateliers Berthier / Odéon Théâtre de l’Europe

La vita ferma (la vie suspendue), texte et mise en scène Lucia Calamaro, Les Ateliers Berthier / Odéon Théâtre de l’Europe

Nov 09, 2017 | Commentaires fermés sur La vita ferma (la vie suspendue), texte et mise en scène Lucia Calamaro, Les Ateliers Berthier / Odéon Théâtre de l’Europe

© Lucia Baldini

ƒ article de Nicolas Brizault

Un grand espace vide et blanc. Un homme et une femme discutent, bousculent des cartons, sont en plein déménagement. Ils s’aiment, c’est certain, entre eux de l’écoute, de l’humour et de la patience vont et viennent. Ils se taquinent, s’enlacent. La femme semble certes un peu inquiète parfois, troublée. C’est assez normal somme toute, elle est morte.

Voici comment débute La vita ferma, une pièce de Lucia Calamaro sur la mort, le souvenir, la séparation d’avec son amour, sa mère, la séparation d’avec sa vie, même. Dans un premier temps, tout est présenté avec une légèreté fantastique, avec un humour revigorant. La morte est jeune, une quadra danseuse un peu pénible et angoissée vivante, alors vous imaginez morte ! Mais toujours aussi dynamique, fine, drôle, séduisante. Et là, elle déménage vers le cimetière, donc les questions se bousculent, on la comprend bien ! Elle ne peut se séparer de tel ou tel bouquin, peut-être même pas encore lu, puis il faut bien qu’elle choisisse une dernière robe, celle qui la verra s’enlaidir dans une vilaine boîte en bois, un cercueil enfermé dans un cimetière. Comme c’est triste !

Son mari est parfait avec elle, enfin il s’en persuade, il l’écoute, se moque un peu, lui rappelle qu’elle est morte et condamnée aux bonnes résolutions. Ce spectacle déroule donc une surprenante et agréable légèreté autour de toutes ces questions grises, à deux doigts de la décomposition. La tristesse apparaît parfois au détour d’un carton, comme ça, sans prévenir. Les souvenirs et la vie sont là, mais de quel côté ?

Plus tard, leur petite fille apparaîtra, apportant supplément de questions et de larmes. Les trois comédiens sont excellents, fins et surprenants. Le sujet étonnait avant que la pièce ne commence, se mette en place, et tous les trois nous mènent face à cette terreur partagée, de près ou de loin mais terreur tout de même, ne soyons pas hypocrites. La mort. Ce qu’elle laisse à nos pieds, ce qu’il en reste vingt ans après. Oui, nous sommes prêts à applaudir à tout rompre cette délicatesse qui nous met à genoux, brillamment émus, triste avec joie. Et puis… et puis le bavardage s’installe, des sujets inutiles jaillissent, retombent, remuent dans ce qui devient peu à peu une boue lassante. La première partie aurait largement suffit, peut-être avec quelques ajouts de la deuxième puis troisième partie. Le rôle de la fille apporte les larmes, et n’en sort que très peu. Un quatrième personnage fait surface à la fin, pourquoi ? Et patati et patata, et hop on se roule dans du superflu retombant, pesant, décevant. L’écho formidable du début persiste un peu mais tristement amincit. On ressort de ce spectacle épuisé de tant d’inutilités imposées − et c’est fort dommage − avec l’envie folle de passer sur ce texte avec la touche efface, pour retrouver la puissance et la séduction de ce sujet si difficile.

La vita ferma (la vie suspendue), de Lucia Calamaro, Les Ateliers Berthier / Odéon Théâtre de l’Europe

Texte et mise en scène  Lucia Calamaro
Avec Riccardo Goretti, Alice Redini, Simona Senzacqua

En italien, surtitré en français

Du mardi au samedi à 20h, le dimanche à 15h
Durée 2h45, avec deux entractes

Traduction et surtitrage  Federica Martucci
Assistante à la mise en scène  Camilla Brison
Décor et costumes  Lucia Calamaro
Peintures  Marina Haas
Directeur technique  Giovanni Marocco
Lumières  Fabio Tomaselli
Assistante de production  Giusi Salidu
Accompagnement et diffusion international  Francesca Corona

La Vie suspendue suivi de L’Origine du monde, de Lucia Calamaro, est publié aux éditions Actes Sud-Papiers, traduction française Federica Martucci, octobre 2017

Les Ateliers Berthier / Odéon Théâtre de l’Europe
1 rue André Suarès
75017 Paris
T+ 01 44 85 40 40

www.theatre-odeon.eu

Métro : Porte de Clichy (ligne 13 / sortie av de Clichy / Bd Berthier, côté Timhôtel), à 150m du théâtre
RER : Porte de Clichy (RER C, sortie avenue de Clichy), à 150 m du théâtre.
Bus : PC3, 138, 173, 54, 74, N15 et N51
Vélib’ station 17011 (rue Fragonard)

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