© Pauline Le Goff
ƒƒƒ article de Nicolas Brizault-Eyssette
Kelly Ruisseau, petite fille puis adulte un peu paumée nous raconte voire même nous fait participer à mille choses vécues, tentées, depuis qu’elle était toute petite fille. Avec sa mère anglaise un peu surprise et déçue d’avoir eu une petite fille, mon dieu, quelle horreur, avec un père tout gentil mais pas très efficace, Kelly Ruisseau ne déborde pas de chance. Pour se « construire », effectivement, ce n’est pas idéal, rien de très stable et les questions qui peuvent lui venir de temps en temps ne trouvent pas forcément de réponses facilement, voir pas du tout. Au moins, avec sa mère, elle semble être bilingue, c’est toujours ça. Et son fils, Liam, tendre gamin, oui, mais qui a très souvent raison. Pas très facile… pour sa mère. La joie et le bonheur sont plutôt du côté de sa grand-mère paternelle, Mamie idéale à l’accent méridional splendide, et qui comprend tout de sa petite fille, et s’amuse bien avec elle. Bon… oui, cela pourrait paraître simple mais La vie rêvée est en fait un rodéo entre souvenirs, explications, belles histoires offertes au public mais cela pourrait être un peu simplet et lassant si la plupart des personnages, à part Kelly Ruisseau, n’était pas mort, éventuellement depuis longtemps, et que nous étions plongés dans une foule de souvenirs remués et remuants. Kelly Ruisseau nous raconte sur scène dans cet espace magique à l’aspect d’entretemps, tout ce qui a pu lui arriver. En fait elle met tous ces souvenirs et les personnages qui ont pu l’approcher, ou le contraire, dans un shaker temporel et hop ! Voici la famille, hop ! des personnages rencontrés au cours d’une tentative d’apprentissage sérieux et comme il faut de vie de comédienne. Des ateliers de théâtre, des castings, des séances de « team building » en entreprises (mystère, mystère, elle essaie de faire au mieux dans un petit job la dépassant par ses étranges complexités, guidée par une hystérique surprenante). Et nous sommes dans La vie rêvée donc la Mother juge, la Mamie soutient, etc. Kelly Rivière, la vraie de vraie, qui a tout mis en scène, qui est l’interprète emporte son public bien loin, le secoue, le fait rire et lui montre combien, à travers toutes ces années-matières dont elle se sert, le vrai de vrai diamant est sa grand-mère paternelle. Dans un spectacle précédent, intitulé An Irish Story, elle évoquait son grand père, là, on change de côté, et on nage dans une tendresse qui fait beaucoup de bien, nous amuse, nous transporte auprès de nos grands-mères à nous, outrées de nous voir rire face à une autre qui n’existe pas puisqu’elle est sur scène et que de toute façon on la battrait rapidement au Scrabble avec trois mots compte-triple !
Kelly Rivière passe d’un accent à l’autre, change de personnage en ajoutant une mini touche supplémentaire sur son sobre costume gris. Voix multiples, explications sur la forme de ses pieds qui ne peuvent transformer Kelly Ruisseau en danseuse étoile poursuivie par la presse internationale. Impression effectivement d’avoir une bonne dizaine de personnages devant nous. Ici ou là on éclate de rire, on réfléchit ailleurs. Du drôle, du doux, du féroce, de l’autodérision et des plumes partout. Quelques balades avec nos disparus, que l’on aime toujours autant et qui commentent nos allées et venues…
La vie rêvée celle qui fait plaisir, la vraie ? Oui, sans doute, quelque part ! Petit souci dans ce spectacle, un petit nœud de lenteur vers la fin. Kelly Ruisseau se répète un peu ou alors développe des sujets qui ne rebondissent pas d’intérêt. On attend alors un peu plus de lumière, une surprise, mais non. Trois mots sur lesquels on pense que la fin va faire un grand sourire, et puis ça continue. Comme si Kelly Rivière n’avait pas pu facilement mettre un point final à toutes ces aventures, positives ou non, tous ces souvenirs, comme si le burlesque était si glissant qu’en sortir pouvait être difficile. Dommage, du lent et du vrai temps débarque, du vrai tout court : on est à nouveau dans un théâtre et plus vraiment avec Kelly Ruisseau. Et puis hop ! Tout rebondit. Un spectacle vitaminant, pour les mômes ? Pas forcément, pas complètement. Les mômes sont plutôt les adultes ici, chacun s’amuse mais les enfants n’auront pas forcément toutes les clés, tous les souvenirs.
© Pauline Le Goff
La vie rêvée, mise en scène et interprétation : Kelly Rivière
Collaboration à l’écriture et à la dramaturgie : David Jungman
Collaboration à la mise en scène : Maïa Sandoz
Regards complices : Jalie Barcilon et Sarah Siré
Création lumières : Laurent Schneegans
Scénographie : Estelle Gautier
Création sonore : Vincent Hulot
Costumes : Elisabeth Cerqueira
Coaching vocal : Jeanne-Sarah Deledicq
Collaboration chorégraphique : Gilles Nicolas
Régie générale : Frédéric Evrard
Production : Compagnie Innisfree
Coproduction et coréalisation : Les Plateaux Sauvages
Avec le soutien et l’accompagnement technique des Plateaux Sauvages
Avec le soutien du Théâtre Berthelot-Jean Guerrin – Ville de Montreuil et des Studios Virecourt
Du 3 au 15 février 2025
Lundi-vendredi : 19h
Samedi : 16h30
Samedi 8 février en famille
Durée du spectacle : 1h15
Les Plateaux Sauvages
5 rue des Plâtrières
75020 Paris
Réservations : 01 83 75 55 70
www.lesplateauxsauvages.fr
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