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La vie matérielle, de Marguerite Duras, adapté par Michel Monnereau, mise en scène de William Mesguich, avec Catherine Artigala, Lucernaire

Juil 03, 2023 | Commentaires fermés sur La vie matérielle, de Marguerite Duras, adapté par Michel Monnereau, mise en scène de William Mesguich, avec Catherine Artigala, Lucernaire

 

© Xavier Cantat

 

ƒƒƒ article de Nicolas Brizault-Eyssette

Un bon rendez-vous au Lucernaire avec Marguerite Duras et La vie matérielle. La mise en place de cette suite de textes, publiée en 1987, avait été conçue avec Jérôme Beaujour, concepteur de la plupart de ses entretiens cinématographiques. Cet ouvrage, comme elle le dit dans la présentation du livre « (…) n’est pas un journal, il n’est pas du journalisme, il est dégagé de l’événement quotidien. (…) Loin du roman mais plus proche de son écriture – c’est curieux du moment qu’il est oral – que c’elle de l’éditorial d’un quotidien. » Quarante-huit textes s’y suivent, « raccourcis » grâce à l’aide de Jérôme Beaujour, évoquant des thèmes allant de son enfance, de sa mère, de l’écriture, de l’amour, de Trouville ou Bonnard. Ceux qui ont été choisis nous offrent une sorte de « biographie express » de Duras, son enfance, sa mère, l’amour, l’alcool. Un choix net et sans doute un peu trop « sobre », si ce mot peut être utilisé ici, tout près de Duras, mais le résultat est efficace. Avant ce spectacle, aimant Duras, on peut grogner et se dire que nous ne serons pas emportés, c’est impossible, comment toucher à Duras ?? Catherine Artigala est sur scène, silhouette presque invisible, plongée dans le noir, à quelques mètres des spectateurs. Puis, lumière et… le plaisir débarque, l’intérêt, et pourquoi pas le rire ici ou là. Une fausse Duras est là, oui, mais elle gagne et nous emmène.

Une petite dizaine de textes se diffusent allègrement, nous rappellent Duras et c’est un bonheur. Ou presque, c’est vrai, quelques petits détails ne fonctionnent pas tout à fait : la lumière n’est pas d’une véritable subtilité, on allume, on éteint, c’est l’impression qui en ressort en tout cas, c’est comme si on brandissait un panneau sur lequel était écrit : « Soyez touchés, on jouit d’une subtilité lumineuse, si, si, c’est émouvant ! ». C’est un peu la même chose avec ces bandes sons qui veulent passer pour du vrai Duras sonore se collant sur du vrai Duras vivant, celui sur scène. Duras qui s’écoute, du bis, du trop, du pas besoin puisque nous sommes en train de discuter avec elle. C’est comme si d’un seul coup nous revenions sur scène, alors que nous étions déjà un peu plus loin, charmés. Et une mini déception encore, avec l’utilisation d’extraits, toujours sonores, du film L’amant par exemple. Dommage, des essais sensés charmer le public et qui au contraire rappellent qu’il y a un public, que ce n’est pas Duras en face mais une comédienne qu’un metteur en scène a tout fait pour la faire décoller devant nous. Et que cela ne fonctionne pas. Le doute est énorme ici. Sainte Barbara chante pour finir Ma plus belle histoire d’amour alors que Jeanne Moreau et India Song nous aurait sans doute davantage « scotchés » sur ces derniers instants.

Oui, peut-être. Mais nous sommes néanmoins emportés, séduits. Comme plongés pendant trois heures face à Catherine Artigala, alors que le spectacle n’en dure qu’une. Et pas parce que nous nous sommes ennuyés mais parce que nous étions à Hanoï, parce que nous étions amoureux de Yann Andréa, rue Saint Benoît. Parce que Duras, la vraie, celle que nous aimons, nous parlait, s’emportant parfois, grognant, amoureuse. Une bonne soirée donc, comme un partage, un échange. Qui pousse, une fois chez soi, à se saisir de La vie matérielle et de continuer.

 

© Xavier Cantat

 

La vie matérielle, de Marguerite Duras

Adaptation de Michel Monnereau

Mise en scène de William Mesguich

Avec Catherine Artigala

Création sonore : Matthieu Rolin

Lumières et décor : William Mesguich

Costumes : Sonia Bosc

 

Du 14 juin au 27 août 2023

Durée 1 heure

A 21h du mercredi au samedi, à 17h30 le dimanche

 

Lucernaire

53 rue Notre-Dame-Des-Champs

75006 Paris

Réservation : 01 45 44 57 34

www.lucernaire.fr

 

 

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