© Ph. lebruman
ƒƒ article de Denis Sanglard
Les chiens de Navarre sont de retour et la meute de Jean-Christophe Meurisse a trouvé refuge aux urgences d’un asile psychiatrique. Rien que de très logique au vue de la folie furieuse qui gagne la société dans son ensemble. Dans cet asile pourri menaçant ruine, on sait combien notre système de santé est déglingué, c’est toute la souffrance et le désarroi des individus devant une société de plus en plus anxiogène qui défile devant des psychiatres impavides et tous aussi timbrés. Enfin presque, parce que la dépression semble n’avoir atteint ici que les boomers, ces quinquas complétement dépassés par un système devenu fou, d’une brutalité inouïe qui les hache menu-menu et les recrache sans pitié. Une génération désenchantée, perdue, aux utopies flouées. La folie qui les atteint ici n’est que le symptôme d’une folie plus générale qui voit notre civilisation se transformer, de plus en plus libérale, de plus en plus conservatrice, avec une violence sans précédent et dont ils sont les victimes expiatoires. Le constat est lucide et sans appel, comme souvent avec Les chiens de Navarre qui n’y vont pas par quatre-chemin pour dénoncer vertement les dysfonctionnements et incohérences politiques et sociaux. C’est, comme toujours, caustique, cash et trash et ça dézingue à tout va et sans prendre les gants du politiquement correct. Pipi-caca et fluides en tout genre, toujours joyeusement régressif. Langue de bois des politiques formatés, wokisme, jeunisme, racisme, libéralisme, macronisme, lepenisme, mélanchonisme, gilets-jaunes… renvoyés dos-à-dos. Et les chansons de feu Christophe pour panser les plaies. Les chiens de Navarre mordent aux mollets et jusqu’aux nerfs qu’ils déchiquètent avec appétit d’une société désormais clivée, fragmentée. La vie est une drôle de fête, oui sans doute, mais les lendemains sont amers, la gueule de bois sévère. Mais dans ce jeu de massacre général et jubilatoire, hilarant, Les chiens de Navarre aussi enragés soient-ils encore, vous font le sale coup d’une certaine humanité. On ne s’y attendait pas, à ça ! Qu’ils se penchent avec une sensibilité inaccoutumée sur les victimes collatérales du système. Et parce que ce qui est dit là, la solution à ce foutoir politique, à se libéralisme sans frein qui s’emballe et brise l’individu, à cette putain de vie, serait à les entendre de retrouver un peu d’amour. D’amour ? Quitte à faire se rouler de sacrés patins entre CRS et Gilets-Jaunes sur des pas de tango ? Quoi, Les chiens de Navarre seraient-ils atteint et confrontés par ce qu’ils dénoncent, une limite d’âge, une dépression latente qui les menace à leur tour d’extinction ? De chiens de Navarre à Bisounours, la frontière devient ténue. Il est vrai qu’avec le temps, leurs crocs se sont un peu émoussés. Trêve de plaisanterie, de leur part cette compassion soudaine envers l’humanité, et ses quinquas définitivement paumés, ça ne manque à vrai dire paradoxalement pas d’humour.
La vie est une fête mise en scène de Jean-Christophe Meurisse
Collaboration artistique : Amélie Philippe
Avec : Delphine Baril, Lula Hugo, Charlotte Laemmel, Anthony Paliotti, Gaëtan Peau, Ivandros Serodios, Fred Tousch et Bernie
Scénographie, décors et construction : François Gauthier-Lafaye
Création et régie lumière : Stéphane Lebaleur
Création et régie son : Pierre Routin
Création et régie costume : Sophie Rossignol
Du 29 novembre au 3 décembre 2022
Du mardi au vendredi à 20 h, le samedi à 19 h
La Villette / Grande Halle
211 avenue Jean-Jaurès
75019 Paris
Réservation : 01 40 03 75 75
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