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« La vie de Galilée » de Bertolt Brecht, mise en scène de Jean-François Sivadier au Monfort

Juin 03, 2015 | Commentaires fermés sur « La vie de Galilée » de Bertolt Brecht, mise en scène de Jean-François Sivadier au Monfort

ƒƒƒ  article de Dominika Waszkiewicz

 

Crédit photo : Alain Dugas

Crédit photo : Alain Dugas

 

Une soirée sous le signe du plaisir… « attention les yeux ! »

Après plus de 140 représentations, La vie de Galilée revient au Monfort Théâtre et ce pour notre plus grand plaisir. Déjà, à jardin, les comédiens semblent trépigner autour d’un antique pendule et d’un planétaire tout aussi anachronique. Car il sera question d’astronomie, un peu, et de révolution, beaucoup. Révolution de la terre autour du soleil, révolution intellectuelle où penser et jouir sont synonymes, révolution idéologique qui laisse, enfin, proliférer le fertile doute.

1610, Galilée et son télescope apportent les preuves accréditant l’héliocentrisme copernicien : c’est tout un monde de poussiéreuses certitudes qui s’écroule. Exit Ptolémée et ses trajectoires fantaisistes. Place au règne de la raison et de l’imagination. Puisqu’il n’y a plus de cadre, puisque la voûte céleste et ses sphères ont volé en éclats, libre à l’homme d’imaginer et de créer. Mais l’Inquisition rôde et veille. Galilée est poussé à se rétracter… tout en rédigeant, sous le manteau, ses Discorsi.

L’équipe de Sivadier nous transmet cette fable avec finesse et gourmandise. Évoluant sur une savante machine à jouer dont les ressorts semblent se complexifier pour former des images vibrantes de vérité et de beauté, les huit comédiens nous invitent à goûter l’instant. Mêlant joyeusement rythme et rigueur, la troupe nous convainc dès les premiers mots et la douce folie du mathématicien italien n’aurait pu trouver porte-voix plus juste que Nicolas Bouchaud. Mime, masques, interaction avec le public, rien n’entrave la gravité du propos, au contraire ! Il y a là quelque chose de rabelaisien et l’on s’empiffre de toute cette intelligence déployée.

Le vertige de la liberté, sublime symphonie

Subtile mise en abyme qui fait des six pans du plafond de la salle une curieuse voûte céleste et nous rappelle que, derrière l’avènement des Temps modernes se cache la soif d’un dramaturge. En effet, Brecht a écrit cette « vie de Galilée » lors de son exil danois avant de la remanier plusieurs fois, en anglais et en allemand. Elle symbolise son combat contre l’obscurantisme de la rigidité dogmatique. Elle est une ode à la démocratie, une profession de foi en l’homme, même si la confiance semble se nuancer un peu autour des questions d’éthique… On n’oublie pas si facilement de trop fraîches dérives de la science !

Sivadier prend donc le relais de cette quête en nous questionnant directement par un curieux intermède, ni interruption ni continuation, pendant lequel les comédiens se parent de nez porcins et nous interpellent. Sorte de « brèche » faite dans nos esprits, « groupe qui doute » et « doute qui racle », elle nous rappelle que nous ne savons rien. Quel bonheur ! Puisque « notre ignorance est infinie, entamons-la au moins d’un mm3 », et le vertige de grandir sur le fil de la représentation, entre épique et didactique.

Dehors, la nuit est claire, on ne peut plus claire.

La vie de Galilée 
Texte Bertolt Brecht
Traduction Eloi Recoing
Mise en scène Jean-François Sivadier
Collaboration artistique Nicolas Bouchaud, Véronique Timsit, Nadia Vonderheyden
Décor Christian Tirole, Jean-François Sivadier
Costumes Virginie Gervaise
Lumière Philippe Berthomé

Distribution de la reprise :
Nicolas Bouchaud, Stephen Butel Andrea, un moine
Eric Guérin Priuli, le mathématicien, le très vieux cardinal, Cardinal Bellarmin, Gaffone, un homme
Eric Louis Sagredo, Cosme de Medicis, le petit moine
Christophe Ratandra Ludovico, le philosophe, le Grand Inquisiteur, un moine
Lucie Valon Virginia, la Grande Duchesse, un moine
Nadia Vonderheyden Madame Sarti, Cardinal Barberini, Vanni, un moine
Christian Tirole Federzoni, Clavius

En tournée :
Assistante à la mise en scène Véronique Timsit
Régie générale  Dominique Brillault
Régie Lumière Jean-Jacques Beaudouin
Poursuite Damien Caris
Régie Son Eve-Anne Joalland
Régie Plateau Christian Tirole
Accessoires Julien Le Moal
Habillage Valérie de Champchesnel

La traduction d’Eloi Recoing est publiée aux Éditions de l’Arche.

Du 27 mai au 21 juin dans la Grande Salle
Du mardi au samedi à 20h et le dimanche à 16h00
durée 3h20, entracte compris

Le Monfort
306, rue Brancion – 75015 Paris
Métro Porte de Vanves, Convention
Réservation 01 56 08 33 88
www.lemonfort.fr

 

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