article de Camille Scordia

© Joanna Van Mulder

Seul en scène, Paul Van Mulder incarne un acteur de peep-show qui se livre sans pudeur aux auditeurs : il dévoile non pas ses charmes mais son quotidien, l’homme qu’il est, ou essaie d’être, avant d’entrer dans la peau de l’acteur, et après sa performance. C’est un homme seul qu’il commence par dépeindre, du fait de son travail : seul de par son rythme différent de celui du commun des mortels, contraint à subir la précarité de ses conditions de travail sans jamais pouvoir briser la chaîne qui le lie à celui-ci. Le destin de cet homme est symbolique du destin de milles autres anonymes, voués à toujours ressentir le décalage entre leur vie et celle de la masse. Sa confidence prend l’allure d’un plaidoyer pour sortir de l’ombre une foule d’esclaves, d’opprimés, victimes de mauvaises rencontres, et qui finissent par ne plus avoir d’autre choix que celui de sacrifier leur corps pour vivre.

Paul Van Mulder a créé un personnage d’une grande fragilité, à la voix douce et retenue. Avec raison, il prend le parti d’éviter le registre pathétique à travers un texte plutôt mesuré, adoptant un ton neutre et raisonné, sans emphase. Le texte relate très simplement les étapes de vie de cet homme, que la solitude ronge petit à petit, pour se retourner, in fine, en violence contre les autres, et lui-même. Ce déroulement attendu souligne l’un des manques de cette pièce, qui réside dans la dramaturgie. Celle-ci se révèle assez pauvre, principalement en raison d’un texte très plat, oral, pas du tout littéraire. Aucun effet ne vient donc surprendre le spectateur de la pièce, qui peut prédire, à la lecture de son titre, comment cette histoire va se dérouler. Il n’y a donc pas assez d’efforts consentis dans l’écriture du spectacle. Servi par une interprétation pourtant fine et juste, aussi bien dans les gestes, les postures, que dans les inflexions de voix, ce spectacle est affaibli par sa dramaturgie. Son interprétation reste donc au stade de la dénonciation, d’une condition, d’une société, où il est vaguement question de dignité humaine, d’injustice. Cependant, rien ne place le spectateur dans un étonnement, ni même une empathie réelle, si bien que les intentions de la mise en scène demeurent floues. L’énergie d’un parti pris fait défaut à ce spectacle, où il semble s’être donné plus de mal pour interpréter que pour donner de la poésie à l’ensemble.

La solitude d’un acteur de peep-show avant son entrée en scène
Texte et interprétation Paul Van Mulder

Du mardi 15 au dimanche 20 mars 2016
Du mardi au vendredi à 20h, le samedi à 19h, le dimanche à 16h
Durée : 1H05

Maison des Métallos
94 rue Jean-Pierre Timbaud
Paris 75011
réservation 01 47 00 25 20

www.maisondesmetallos.org

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