article de Denis Sanglard
Sombre drame au Studio de la Comédie-Française
« La Dame aux Jambes d’Azur » est une pochade d’Eugène Labiche, portrait en creux, parodie du milieu théâtral. Arnal, comédien du Palais-Royal, tient son chef d’œuvre romantique, écrit par ses soins en 12 jours et sans rature. Seulement voilà cela ne se déroule comme prévu, rien n’est prêt, et la représentation n’aura pas lieu. Remplacée par une répétition publique, celle-ci est une catastrophe. Nul ne sait son texte et le souffleur aphone est remplacé par un machiniste ne sachant pas lire. La comédienne mange de la saucisse, boit de la bière, anone ses répliques entre deux mailles de tricot. Les jeunes premiers ne lâchent ni leur réplique ni leurs chiens tenus en laisse. «Le doge » cherche un appartement et se contrefout d’être sur le plateau. Arnal, dépassé, ne maîtrise plus rien. Son chef d’œuvre vénitien prend l’eau.
Situations et répliques absurdes, non-sens, parodie du drame romantique, Eugène Labiche croque le théâtre et les comédiens dans leurs travers, leur ringardise, leur égotisme. Pièce très courte. Et c’est tant mieux. Car quel pensum pour les spectateurs! Qui cherchent vainement l’intérêt de jouer aujourd’hui cette pochade qui n’est qu’une pochade et rien d’autre..? Terriblement datée et désuète comme la mise en scène paresseuse où les comédiens eux même semblent s’ennuyer. Pas de rythme, tout ça se traîne, se traîne lourdement, plombé par une mise en scène littérale et bien trop respectueuse qui fige désespérément l’ensemble dans un contexte dépassé, un siècle révolu où les situations sont aujourd’hui de loin éculées et ne décollent jamais. Au regard d’aujourd’hui il n’y a rien de vraiment drôle et cela tombe à plat. Cela manque de distance, de recul ou tout simplement d’humour sur ce comique-là, sans prétention aucune qu’une soirée au bénéfice de mademoiselle Lucile Durand, comédienne au Palais-Royal, là où se passe cette pochade dont elle est l’héroïne caricaturée. Eugène Labiche ne signait sans doute pas un chef-d’œuvre ou du moins l’intention résidait ailleurs que dans la critique sociale de la bourgeoisie de son temps. Voir La Cagnotte ou Monsieur Perrichon. Cette gentille plaisanterie, tient de l’archéologie théâtrale sans doute mais encore une fois ne présente et suscite au final aujourd’hui aucun intérêt.
La Dame aux jambes d’azur d’Eugène Labiche et Marc Michel
Mise en scène, Jean-Pierre Vincent
Avec Gérard Giroudon, Claude Mathieu, Jérôme Pouly, Julie Sicard, Pierre Louis-Calixte, Gilles David, Benjamin Lavernhe, Noam Morgensztern
Musiciens, Pascal Sangla, Philippe Briegh
Et Gess*, Haïka* et Lulu
*en alternance
Dramaturgie, Bernard Chartreux
Décors, Jean-Paul Chambas
Costumes, Patrice Cauchetier
Lumières, Alain Poisson
Musique originale, Pascal Sangla
Maquillages, Suzanne Pisteur
Assistante à la mise en scène, Frédérique Plain
Assistante au décor, Carole Metzner
Assistante aux costumes, Bernadette VillardComédie-Française
Studio-Théâtre
Du 22 janvier au 8 mars 2015, du mercredi au dimanche à 18h30
Renseignements et réservations 01 44 58 98 58
www.comedie-francaise.fr
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