© Giovanni Cittadini Cesi
ƒƒ article de Hoël Le Corre
Deux abat-jours industriels, une table étonnamment longue de style nordique et une chaise bariolée, voilà le décor de cette maison de campagne, de cette pièce aussi énigmatique que percutante. Richard et Corinne, couple avec deux enfants, ont quitté la ville pour s’installer à la campagne, quoi de plus commun ? Il est médecin, elle s’occupe principalement de leurs enfants. Un soir, Richard ramène chez eux Rebecca, une jeune femme qui gisait inconsciente au bord de la route. Rébecca va alors être l’élément révélateur de la véritable raison de leur déménagement à la campagne le catalyseur de la suite de l’histoire…
Avec une écriture ciselée et incisive, Martin Crimp nous fait alors rentrer progressivement dans ce «thriller domestique» où aucun des personnages n’est tout à fait clair, où la manipulation et la perversion vont faire surface et mener, sans qu’aucun d’entre eux ne l’ait vraiment voulu, jusqu’au dénouement final. Au-delà du simple trio amoureux, ce sont les failles de chaque personnage qui sont mises à jour par le jeu de questions-réponses auxquels ils se livrent de façon plus ou moins consentante. La langue lapidaire et répétitive de Martin Crimp permet à ce jeu du chat et de la souris de prendre un rythme effréné où les insinuations fusent comme des flèches, et où les informations sont lâchées comme des bombes à retardement. Sans superflus, la mise en scène de Sylvain Maurice retranscrit parfaitement l’atmosphère étrange de cette pièce. Ici pas de silence psychologique, au contraire, les répliques sont rapides et concises et confèrent aux rapports tendus entre les personnages. Isabelle Carré assume tout en subtilité et humour son rôle de femme jalouse et inquisitrice ; Yannick Choirat est ambigu comme il faut ; et Manon Clavel est particulièrement convaincante en jeune fille aussi perdue que manipulatrice. Un beau trio, qui porte ce texte parfois malheureusement un peu long par ses répétitions dans le thème du duo plein d’intrigues. La fin peut d’ailleurs également paraitre aussi savoureuse que frustrante car elle ouvre sur une suite qui pourrait presque être le début d’une autre pièce. Toutefois, la langue de Martin Crimp et l’interprétation des comédiens en font une pièce plaisante même si, ou parce que, énigmatique.
© Giovanni Cittadini Cesi
La Campagne, texte de Martin Crimp
Traduction : Philippe Djian
Mise en scène : Sylvain Maurice
Avec : Isabelle Carré, Yannick Choirat et Manon Clavel
Assistanat à la mise en scène : Béatrice Vincent
Collaboration artistique : Julia Lenze
Scénographie : Sylvain Maurice
En collaboration avec : Margot Clavières
Lumières : Rodolphe Martin
Costumes : Olga Karpinsky
Assistée de : Lucie Guillemet
Son : Jean De Almeida
Régie générale : André Neri
Du 5 au 22 janvier 23
Du mardi au samedi à 21h30
Dimanche à 18h30
Théâtre du Rond-Point
2bis av Franklin D. Roosevelt
75008 Paris
Réservations : 01 44 95 98 00
www.theatredurondpoint.fr
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