© Jean-Louis Fernandez
ƒ article de Nicolas Brizault
Bon, l’envie de faire très court est terriblement tentante. Dire que pour Je suis Fassbinder on garde l’auteur, Falk Richter, en lui demandant gentiment quelques coupures, on garde Katrin Hoffmann, très bonne scénographe, et on change de metteurs en scène, pour le coup on met une moitié de Falk Richter en l’air et tout Stanislas Nordey.
Fassbinder est un peu partout, on accourt, pour se faire du bien. Sur scène, devant nous, une pièce en train de naître, avec les recherches, les coupures, les engueulades qui vont faire naître un spectacle. L’essence « fassbinderienne » est partout, on se sert d’elle, bonne idée, pour parler d’aujourd’hui, des catastrophes sociales, des homos que l’on souhaiterait bien brûler vif, des femmes pourquoi pas idem, quatre acteurs sous la direction de Stanislas (tous gardent leur vrai prénom) qui cherchent, réussissent, s’écrasent, recommencent, avec derrière eux des images mouvantes de Fassbinder, des costumes qui réapparaissent, qu’ils portent, surprise. Oui, la recherche, les recherches sont bonnes, il faut le dire. Mais elles s’écrasent à peu près toutes dans du trop, du lourd. Oui, Stanislas est homo, celui sur scène, pas le vrai, on a compris, ce n’est pas la peine de nous montrer pendant dix minutes la queue de Vinicius Timmermann. Oh là, là, comme c’est puissant ! Certes, le goût et l’avis des spectateurs « semblent » importants pour Nordey, paraissent participer à sa création. Nous sommes plongés dans du gris foncé, dubitatif gris foncé. Voilà.
Les comédiens et comédiennes sont excellents, oui. Tout pourrait fonctionner avec un bon sécateur, c’est le printemps, profitons-en. C’est une pièce qui reprend une pièce qui se reprend sans cesse. Oui, difficile création. Années passées, années actuelles, Fassbinder, Richter et Nordey se donnent la main et battent la cabriole. Méfions-nous, la catastrophe est proche. On a envie de rentrer vite chez soi et de retrouver Fassbinder. Pas encore possible. Encore une fois c’est le printemps et la fatuité est en cours de floraison. Richter et Nordey s’entendent bien et travaillent ensemble, oui, et cette mise en scène gémellaire glorifie Nordey qui nous écrase avec un lent et long discours qui nous explique qu’il a tout compris, normal il est double metteur en scène, il a tout compris donc sur les aléas du monde contemporain, ça, ça et ça et puis ça vont se casser la figure, ça aussi, ah ! et ça. Je connais tout, heureusement que je suis là pour tout vous révéler ô ! spectateurs, qui ne vont pas trop tarder à nous applaudir. Vraiment, on se serraient bien passés de ce « trop. »
Je suis Fassbinder nous donne du beau, du bien, oui, mais finalement nous ennuie, nous lasse. Ne nous apprend pas grand chose, ne nous pousse pas vraiment. De bonnes idées qui s’écrasent, lourdes et grasses. Qui nous tartinent d’échos et d’ego. Victorieuses en sommes puisque dommage, dommage, dommage !
© Jean-Louis Fernandez
Je suis Fassbinder, de Falk Richter
Mise en scène : Stanislas Nordey, Falk Richter
Traduction : Anne Monfort
Collaboratrice artistique : Claire Ingrid Cottanceau
Dramaturgie : Nils Haarmann
Scénographie et costumes : Katrin Hoffmann
Assistanat aux costumes : Juliette Gaudel
Assistanat à la scénographie : Fabienne Delude
Lumière : Stéphanie Daniel
Musique : Matthias Grübel
Vidéo : Aliocha Van der Avoort
Réalisation décors et costumes : les ateliers du Théâtre National de Strasbourg
Avec : Judith Henry, Dea Liane, Stanislas Nordey, Laurent Sauvage, Vinicius Timmermann
Du 5 au 28 avril 2019
Salle Renaud-Barrault
Du mardi au samedi 20h30
Dimanche 15h
Relâche les lundis et le 21 avril 2019
Durée 1h55
Théâtre du Rond-Point
2bis avenue Franklin Roosevelt
75008 Paris
Réservation au 01 44 95 98 21
www.theatredurondpoint.fr
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