© Debby Termonia
ƒƒƒ article de Sylvie Boursier
« Quatre boules de cuir tournent dans la lumière, de ton œil électrique, boxe, boxe », elle déboule prête à en découdre la Effie, une vedette du quartier sinistré de Splott à Cardiff, une tuerie et on s’en prend plein les poumons : « et vous là, calés dans vos sièges, tranquilles, à attendre que quoi ? […] que je vous montre ce que j’ai dans le bide ? eh ben, les mecs et les meufs, mesdames et messieurs- ça ne va pas le faire ». Survêtement trop grand pour elle, bonnet vissé sur le crâne, roulant les mécaniques elle va balancer comme ça sa vie au quotidien à Splott à la cadence d’une mitraillette, montée sur ressort, elle rend coup pour coup avec une gueule de bois pas possible liée à ses cuites hebdomadaires. A Splott, ça sent la clope, les fumées d’usine, les tôles froissées et les plages pourries, la rage contenue et le désespoir car d’ici on aimerait foutre le camp mais on a aucun moyen de le faire. A Splott les jeunes étouffent, zonent, dealent, les femmes sont engrossées très tôt et les grands-mères de 70 ans obligées de prendre un job de caissière pour dépanner leurs petits-enfants.
Et puis un jour, l’occasion lui est offerte de changer et là Effie, Gwendoline Rivière, comprend que c’est la chance de sa vie et elle fonce, lumineuse, transformée. On la croyait agressive mais non, cette femme a une fragilité et une vitalité hors du commun.
François Sauveur et Pierre Constant, guitaristes avec Julien Lemonnier au piano électrique diffusent en live une musique rock géniale, percussions à chaque drame, douceur des basses quand sa vie brusquement change. Ils sont les remparts qui la protègent, complices de tous les instants.
Gary Owen écrit merveilleusement bien avec un humour féroce, une tendresse et un sens des rebondissements étonnant, tellement plus intéressant que beaucoup de manuels sociologiques.
À Splott, ce n’est pas Agamemnon qui exige le sacrifice de sa fille mais les gouvernements qui imposent des coupes budgétaires dans les services publics, appliquant les logiques capitalistes de rentabilité « plus de magasins, la salle de loto a brûlé, les pubs sont fermés, les médecins aussi […] on nous entasse et on nous demande d’exister, c’est tout ». On vous laisse découvrir la nature du sacrifice d’Effie.
Bon, on ne vous fait pas un dessin, mise en scène, direction d’acteurs tout est impeccable, et elle…Gwendoline Gautier… battez-vous pour obtenir une place car c’est complet, les mots manquent pour qualifier la prestation de cette dame, respect !
© Debby Termonia
Iphigénie à Splott, de Gary Owen
traduction Blandine Pelissier et Kelly Rivière, édité chez Gallimard
Mise en scène : Georges Lini
Musiciens : Pierre Constant, Julien Lemonnier et François Sauveur | Création lumières : Jérôme Dejean
Costumes : Charly Kleinermann et Thibaut De Coster
Avec : Gwendoline Gauthier
Du 7 au 28 juillet à 10h20
relâche le 13 et le 20
Durée 1h 45
Théâtre 11
11 bd Raspail
84000 Avignon
Réservation : 04 84 51 20 10
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