Critiques // Grand Magasin, d’orfèvre et de cochon – Fanny de Chaillé et Pierre Alféri, Répète. Théâtre de la Cité Internationale, Festival Faits d’Hiver

Grand Magasin, d’orfèvre et de cochon – Fanny de Chaillé et Pierre Alféri, Répète. Théâtre de la Cité Internationale, Festival Faits d’Hiver

Fév 07, 2015 | Commentaires fermés sur Grand Magasin, d’orfèvre et de cochon – Fanny de Chaillé et Pierre Alféri, Répète. Théâtre de la Cité Internationale, Festival Faits d’Hiver

Articles de Denis Sanglard

 

 FFF  Grand Magasin, d’orfèvre et de cochon

 

© Giovanni Cittadini Cesi

© Giovanni Cittadini Cesi

 

Qu’est-ce que le travail ? Qu’est-ce que travailler ? A cette épineuse question qui nous concerne tous, Grand Magasin tente de répondre. Non pas une réponse définitive mais plutôt un questionnement. Pour ces deux qui font boutique, le duo Pascale Murtin et François Hiffler, en digne héritier d’Alphonse Allais, ça ne va pas de soi. Eux qui n’ont jamais eu l’impression de travailler, au sens où nous l’entendons nous, pauvres prolétaires, exploités du système. Bref qu’en dire, que faire…Vaste programme et conférence rigoureuse comme peut l’être une performance de Grand Magasin c’est-à-dire une logique poussée jusqu’à l’absurde avec un sérieux sans faille. Donc le travail, du moins le terme de travail, est exploré, ausculté dans tous les sens jusqu’en ces contradictions. De son étymologie, un objet de torture, jusqu’à son acceptation et usage abusif actuel. Et c’est fou de découvrir ce qui se cache et se trame derrière ce mot. Un vaste univers insoupçonné. Et combien son usage intempestif recouvre tout et son contraire. De quoi se vanter. Ou pas. D’autant plus que s’exposant en contre-exemple, comme pour justifier de leur oisiveté relative, toute relative, nos deux boutiquiers n’hésitent pas à illustrer de leurs propre travaux et essais les contradictions de la chose. Est-ce que ce qu’ils fabriquent dans leur petite boutique peut être nommé « travail »? A nous de juger de la chose d’autant qu’en contre-point un spectateur est amené à décrire son travail. Soit mais bon, comparaison n’étant pas raison… Et ne pas parler de rentabilité. En ce qui les concerne, dans une démonstration éblouissante, leur abnégation à la chose dissertée relève du bénévolat. Bref On le découvre avec cette conférence : quoiqu’ils en disent, l’oisiveté, c’est du boulot…

 

F  Fanny de Chaillé et Pierre Alféri, Répète

Et pendant ce temps-là Fanny de Chaillé, chorégraphe, et Pierre Alferi, écrivain, se chamaillent grave. Une collaboration qui tourne à l’aigre, la fin d’une relation où l’on s’écharpe sévère. Il y a tout du vieux couple, l’une finissant les phrases de l’autre quand elle ne les anticipe pas. C’est un ping-pong verbal où se dessinent en filigrane la relation que chacun entretient avec son art et l’incommunicabilité qui peut en découler quand chacun se confronte à l’autre dans un projet à l’origine commun. Visiblement ces deux-là s’amusent. Autour d’une table qui acte la séparation en cours, chacun à un bout, ils se lancent leurs quatre vérités. Très vite on comprend que chaque argument est formel. C’est comme une cartographie de la rupture (professionnelle) avec ses passages obligés, ses raccourcis foireux, ses lieux communs pourris. Bref c’est le petit manuel illustré de la séparation, la trousse de secours des expressions et situations toutes faites, des périphrases dangereuses, des poncifs inhérents à la chose. Seulement ce qui est soulevé là et à l’origine de la rupture c’est bien la conception propre à chacun du travail artistique. Entre l’écrivain solitaire, introspectif et la chorégraphe chef de troupe et expansive rien ne colle vraiment. Ce que reproche Pierre Alféri à Fanny de Chaillé c’est bien ce risque de « fonctionnarisation » des artistes ». Là aussi la notion du travail est posée. Dans sa conception comme dans son résultat. Deux points de vue irréconciliables mais qui doivent adopter un langage commun pour signer la rupture. Mais si il y a une rupture c’est bien celle entre eux et nous. Pas sûr que nous suivions le raisonnement jusqu’au bout. Progressivement on s’y perd un peu, c’est vrai, à tenter de démêler cet écheveau de propositions qui parfois partent un peu dans tous les sens ou se chevauchent…N’en demeure pas moins un drôle de couple qui, paradoxe, de leur différence font tout de même œuvre.

 

 

Grand Magasin, d’orfèvre et de cochon
De et avec Pascale Murtin et François Hiffler

Fanny de Chaillé et Pierre Alféri, Répète
Conception et interprétation Fanny de Chaillé et Pierre Alferi

Du 2 au 14 février 2015
Lundi, mardi, vendredi et samedi à 20h, jeudi 19h
Relâche mercredi et dimanche

Théâtre de la Cité Internationale
17 bd Jourdan – 75014 Paris
Avec le Festival faits d’Hiver
Réservation 01 43 13 50 50
www.theatredelacite.com
www.faitsdhiver.com

 

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