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Giulio Cesare in Egitto, de Haendel, direction musicale de Philippe Jaroussky, mise en scène de Damiano Michieletto, Théâtre de Champs-Elysées

Mai 14, 2022 | Commentaires fermés sur Giulio Cesare in Egitto, de Haendel, direction musicale de Philippe Jaroussky, mise en scène de Damiano Michieletto, Théâtre de Champs-Elysées

 

© Vincent Pontet

ƒƒƒ article de Denis Sanglard 

Un crépitement, un feu d’artifice vocal, voilà ce à quoi nous avons assisté lors de la première de Giulio Cesare in Egitto de Haendel, sommet de l’opéra baroque, dirigé par Philippe Jaroussky dont c’est la première direction musicale, après avoir interprété dans un récent passé et de nombreuses fois le rôle de Sesto. Opéra de 1724 à la trame historique, c’est un véritable festival pour les amateurs de voix tant les airs qui le composent, il faudrait les citer tous, et ils sont nombreux, demande une véritable virtuosité, une grande musicalité et un indubitable talent dramatique pour restituer toute la complexité des personnages. Musicalement ce fut une soirée mémorable. La fine baguette de Philippe Jaroussky faisait montre d’une connaissance intime de la partition. Quelques faiblesses dans certaines attaques, certains ralentis étranges, n’entamaient en rien l’allant de l’Ensemble Artaserse. Surtout Philippe Jaroussky, rompu au baroque, fait montre d’un véritable sens de la nuance, attentif aux climats imposés par Haendel. Et naturellement une grande attention portée aux chanteurs, à l’homogénéité de l’ensemble vocal sur le plateau, ensemble d’une grande élégance et d’une tenue sans pareil. Et les chanteurs impressionnent qui s’en sortent avec les honneurs. Sabine Devielhe (Cléopâtre) et Lucile Richardot (Cornélie) en tête. La première faisant montre d’une virtuosité vocale pour le moins époustouflante, aux suraigües filé, n’occultant en rien un sens de la scène indubitable et qui nous a laissé sans voix, époustouflé par l’insolence de son talent. Lucile Richardot, veuve de Pompée assassinée, humiliée, agressée, par sa voix merveilleusement sombre de mezzo-soprano offre à son personnage une impressionnante noblesse tragique. Gaëlle Arquez campe un Jules César hiératique, quelque peu figé dans son jeu que compense une voix de mezzo-soprano, un chant d’une grande justesse musicale et d’une finesse expressive. Trois contre-ténors sur un même plateau, la comparaison, sinon la compétition, aurait pu paraître rude. Il n’en fut rien, ce fut explosif. Aigus et vocalises escaladées à grande vitesse, longueur du souffle propre au baroque, ce fut pour les trois incandescent et dans la salle une pâmoison sans pareil. Difficiles de chipoter tant Franco Fagioli (Sextus), Carlo Vistoli (Ptolémée) et Paul-Antoine Bénos-Dijan (Nireno) ont donné un véritable festival baroque. On pourrait objecter à Carlo Vistoli une faiblesse dans son jeu dramatique mais devant la qualité vocale de sa prestation, à l’instar des autres, toutes préventions tombent. Le baryton Francesco Salvadori (Achille) allie maîtrise et élégance e un chant d’une grande nuance tout comme le baryton-basse Adrien Fournaison (Curio). Cette distribution a soulevé la salle, et chaque air, sans exceptions fut applaudi. Ce qui compense une mise en scène qui elle fut copieusement huée. Pourtant cela commençait plutôt bien avant qu’une seconde partie ne gâche l’ensemble. Sur un plateau nu, une boîte blanche qui s’ouvrait au lointain sur les enfers où veillaient trois parques, et que nul accessoires superflus n’encombraient, toute place était donnée au chant, voire à la direction d’acteur. Las et par la faute d’une scénographie (Paolo Fantin) qui oblige et contraint, la mise en scène, dans la seconde partie – un plateau devenu noir où des fils rouges tissent une étrange toile – se trouve comme empêchée et les chanteurs embarrassés. Avec au lointain un miroir qui malheureusement, effet involontaire ou non, reflète une partie de la fosse d’orchestre et son chef dirigeant.  Gênant. La mise en scène semble se déliter peu à peu, ne plus être véritablement tenue. Le metteur en scène Damiano Michieletto n’a de cesse de préfigurer le destin de César et de Cléopâtre, la mort est partout précédée de ses Parques, qui finit par étouffer de ses symboles, parfois incompréhensibles ou tout simplement inutiles, une mise en scène qui à son début avait tout pour être séduisante par son apparente simplicité ponctuée d’images d’une grande force il est vrai. Le comble fut atteint quand César, rescapé de la noyade, se retrouve devant une bâche de chantier transparente du plus mauvais effet et d’une laideur sans pareille. Laquelle bâche bientôt déchirée par un Sextus en fureur, on le comprend nous qui aurions aimé en faire autant. Passons donc sur cette mise en scène qui n’a pas tenu toute ses promesses au contraire du casting vocal survolté, électrique et de très haute tenue et de la première direction prometteuse ô combien de Philippe Jaroussky. Pour une première ce fut vraiment magistral.

 

© Vincent Pontet

 

Giulio Cesare in Egitto, opéra de Georg Friedrich Haendel

Direction musicale de Philippe Jaroussky

Mise en scène : Damiano Michieletto

Chorégraphie : Thomas Wilhelm

Scénographie : Paolo Fantin

Costumes : Agostino Cavalca

Coiffures, maquillages et masques : Cécile Kretschmar

Lumières : Alessandro Carletti

Avec Gaëlle Arquez, Sabine Devielhe, Franco Fagioli, Lucile Richardot, Carlo Vistoli, Francesco Salvadori, Paul-Antoine Bénos-Dijan, Adrien Fournaison

Ensemble : Artaserse

Danseuses : Diane Magré, Taos Mesbahi, Léa Pointelin

Comédiens et figurants : Jean-Pierre Cormarie, Sébastien Duvernois, Julien Girardet, Stéphane Lara, Grégory Maiuri, José-Maria Mantilla Camacho, Jean-Philippe Poujoulat, Philippe Welke

 

Les 11, 14, 16, 18, 20 mai 2022 à 19 h

le 22 mai à 17 h

 

Théâtre des Champs-Elysées

15 avenue Montaigne

75008 Paris

Réservations www.theatredeschampselysees.fr

 

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