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Futur proche, chorégraphie de Jan Martens, à La Villette

Avr 27, 2023 | Commentaires fermés sur Futur proche, chorégraphie de Jan Martens, à La Villette

 

© Filip Van Roe

ff article de Denis sanglard

Pour Jan Martens le futur proche se conjugue déjà au présent. Sur des partitions résolument contemporaines pour clavecin, instrument qu’on aurait à tord ne voir que dévolu au baroque, le chorégraphie belge entraîne les danseurs de l’Opera Ballet Vlaanderen, ils sont 17 ici dont deux enfants, dans une réflexion sur notre capacité d’adaptation, de mutation devant les enjeux qui menacent notre avenir. Avec le changement climatique, les pandémies, les guerres, sommes-nous capable de changer de corps, de sociétés, de pensées ? Quelle alternatives avons-nous pour prévenir encore nos sociétés du désastre ? Pouvons nous garantir par un renouveau inéluctable leur pérennité ?

Au centre du plateau, en pivot central de cette performance, le clavecin et son instrumentiste, la polonaise Goska Isphording, qui fut l’élève de d’Elisabeth Chojnacka (1939-1917), laquelle contribua fortement à inscrire le clavecin dans la musique contemporaine. Le clavecin et la claveciniste donc et un immense banc coupant l’espace en deux dans sa longueur. A la fois un espace de repos mais aussi un axe central autour duquel la danse s’enroule ou se disloque, sous l’impulsion infernale et constante, pas vraiment ou peu de pauses, des compositions foudroyantes pour clavecin qui semblent percuter de plein fouet de ses cordes pincés les danseurs. Une vitesse d’exécution, un aspect percussif, aussi explosif qu’implosif, se devant d’épouser la virtuosité de l’instrumentiste, être en osmose absolue avec la musique qui les conduit au-delà d’eux même. Une danse qui ne cesse de se régénérer, de se renouveler, de s’inventer. Jan Martens use de l’épuisement du mouvement, de sa répétition. Une réitération du geste volontaire qui mène à sa métamorphose, le vidant de son abstraction première pour lui donner une expressivité plus âpre et originale. Usant du vocabulaire classique, pliés, pirouettes et sauts, auquel sont rompus les danseurs de la compagnie, pour le briser soudain et très vite l’embarquer vers un répertoire plus urbain et fulgurant. Souplesse et tension, ampleur et intériorité, grande foulée ou piétinement, c’est une oscillation constante, un maelstrom physiquement vertigineux qui traversent les corps comme parcourus d’émotions fortes et contradictoires. Les danseurs font bloc, toujours, de marches martiales en courses effrénées, en lignes géométriques pures ou disséminés, l’ensemble reste fortement soudé, la notion de groupe, du collectif et de son énergie semblant absolument importer, même si chacun garde sa personnalité que trahissent certains mouvements leur appartenant en propre. Ne perdant pas en cela le propos qui innerve cette chorégraphie – la réponse à la question serait donc là, dans l’élan communautaire et la mise en commun de nos différences – où la jubilation pourtant laisse lentement la place à une gravité que l’on n’aurait pas soupçonné après un début aussi flamboyant et, oui, joyeux. Jan Martens, dans la dernière pièce, arrête tout. La partition musicale accompagne le clavecin de cris et d’explosion qui vrillent les tympans, le banc est brisé, le groupe éclate, la danse lentement se fige, le mouvement se tétanise, les corps chutent avec une lenteur extrême, l’obscurité gagne le plateau. Seul résonne dans le silence et le noir qui succèdent à cette fin d’apocalypse, le martellement sourd des pieds frappant obstinément le plancher, étrange et funèbre pulsation où le présent semblent avoir obéré, contaminé l’utopie espérée du futur, invitant brutalement l’inévitable réalité sur scène.

 

© Filip Van Roe

 

Futur proche, chorégraphie de Jan Martens

Musique : Peteris Vasks, Janco Verduin, Graciane Finzi, Anna Dorvalsdóttir, Erkki Salmenhaara, Aleksandra Gryka

Clavecin : Goska Isphording

Avec les danseurs de l’Opera Ballet Vlaanderen : Zoë Ashe-Browne, Viktor Banka, Tiemen Bormans, Claudio Cangialosi, Marganna Cappellari, Brent Daneels, Matt Foley, Misako Kato, Nicolas Leahey, Ester Pérez, Taichi Sakai, Niharika Senapati, Paul Vickers, Rune Verbilt, James Vu Anh Pham, Kirsten Wicklund

Les jeunes danseurs : Merel Amandt, Galane Caforio, Caroline Gratkwoski, Elodie Grunewald, Tito Zwalum Janssens, Lisse Vandevoort

Scénographie : Joris van Oosterwijk

Costumes : Joris van Oosterwijk, Jan Martens

Lumières : Elke Verachtert

Vidéo : Stijn Pawels

Son : Brecht Beuselink

Dramaturgie : Tom Swaak

Répétition de danses : Tara Jade Samaya

Conseils artistiques : Caroline Maciel de França, Rudi Meulemans, Marc Vanrunxt

 

Du 26 au 28 avril 2023

A 20h

 

La Villette

Grande Halle

211 avenue Jean-Jaurès

75019 Paris

Réservations : 01 40 03 75 23

www.lavilette.com

 

 

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