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(F)AUNE, chorégraphie de David Drouard, Grenier à sel

Juil 13, 2016 | Commentaires fermés sur (F)AUNE, chorégraphie de David Drouard, Grenier à sel

ƒƒƒ article Jean Hostache

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© DR

David Drouard arrive sur scène avec une proposition radicale des plus fortes et des plus belles : une nouvelle adaptation de L’après-midi d’un faune. A l’origine créé en 1912 par Nijiinski sur une musique de Debussy, le ballet restituait à travers la figure d’un faune le caractère érotique et parfois lascif de la sexualité sur scène, qui fit scandale à l’époque.

Pour cette adaptation le spectacle est segmenté en trois parties distinctes mais liées par une dramaturgie intelligente, donnant à la fois rythme et surprise au spectateur. On commence par découvrir dans la pénombre une figure monumentale, un costume revêtu par le danseur, celui d’un ours de deux mètres occupant l’espace scénique. On admire, comme un enfant devant un jouet gigantesque qui nous fascine et nous fait peur, le travail entrepris sur le corps marionnettique (ici dans une esthétique de la démesure).

Puis le danseur quitte son costume, comme en se défaisant d’une mue pour trouver une nouvelle peau. Il apparaît, naît sous nos yeux, et entame une danse au sol où les torsions fréquentes font écho à ce qui pourrait être de l’ordre d’une corporéité embryonnaire : c’est-à-dire où l’homme reste en devenir. C’est d’ailleurs tout le propos du spectacle, traité avec beaucoup de finesse, où il s’agit de montrer le sujet qui passe par plusieurs états corporels pour enfin se construire en tant qu’individu sensible. En dérive toute une séquence absolument inouïe et sublime, sur la monstration d’un corps animal. Le travail, ou plutôt la prouesse, en termes d’innovation chorégraphique est à couper le souffle. David Drouard, étant également l’interprète de (F)AUNE, construit ici une grammaire chorégraphique sans précédent, très singulière, et signé par la beauté dionysiaque. Une danse féline venant griffer le public.

Cette qualité de corps animal qui est ici développée, présente l’idée d’un être sclérosé, dans une gestuelle quasi claustrophobique, avant de s’épanouir de se relever. Vient donc le moment où l’humain prend toute sa dimension d’homme, et dans sa danse des mouvements plus libres et raisonnés. Il peut avoir de la distance, retrouver son ancienne peau qui occupait jusqu’alors la scène, et reprendre le contact avec elle. Le solo devient dès lors un dialogue entre le danseur et ce qui semble être le cadavre d’une ancienne vie. C’est ici que l’on retrouve dans ce rapport entre deux corps, l’un vivant et l’autre éteint, tout l’érotisme qu’il pouvait exister chez Nijinski.

(F)AUNE relève du génie chorégraphique, tant par l’avant-gardisme que le spectacle propose à certain égard, que par la beauté et la justesse qu’il s’en dégage.

(F)AUNE
Chorégraphie de David Drouard
Dramaturgie Florian Gaité
Assistant à la chorégraphie Sandrine Savin
Conception visuelle Franck Rezzack
Musique et création sonore François Caffenne
Création lumière Éric Soyer
Costumes  Anne De Vains
Avec David Drouard
Du 6 au 27 juillet à 16h15

Grenier à sel
2 rue du Rempart Saint-Lazare 84000 Avignon
Réservation 04 90 27 09 11
www.paysdelaloire.fr

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