Un Fauteuil Pour l'Orchestre – Le site de critiques théâtrales parisien » Édith et moi, création et interprétation de Yael Rasooly à la 23e édition du Festival Mondial des Théâtres de Marionnettes de Charleville-Mézières

Agenda, Critiques, Evènements, Festivals // Édith et moi, création et interprétation de Yael Rasooly à la 23e édition du Festival Mondial des Théâtres de Marionnettes de Charleville-Mézières

Édith et moi, création et interprétation de Yael Rasooly à la 23e édition du Festival Mondial des Théâtres de Marionnettes de Charleville-Mézières

Oct 01, 2025 | Commentaires fermés sur Édith et moi, création et interprétation de Yael Rasooly à la 23e édition du Festival Mondial des Théâtres de Marionnettes de Charleville-Mézières

ƒƒƒ article de Sylvie Boursier

À chacun sa marionnette, son totem, Yael Rasooly a choisi son ange gardien, Édith Piaf.

Yael a un abattage d’enfer, entre Liza Minelli et Groucho Marx, une allure de meneuse de revue, et beaucoup d’humour. Artiste complète à l’américaine, elle sait tout faire, chanter, danser, jouer la comédie. Édith et moi commence dans la légèreté d’un cabaret burlesque et progresse graduellement vers le récit d’une agression sexuelle subie par l’artiste, sans rien perdre de sa grâce. La scène traumatisante, donne lieu à une composition visuelle incroyable, Yael manipulée par des bras de marionnettistes, telle une gorgone aux multiples anneaux, se libère de ses agresseurs transformés en pantins bouffis. Elle dédramatise la scène en s’emparant des codes cinématographiques du cartoon avec une chorégraphie d’horloge suisse.

Que vient faire Édith Piaf dans tout ça ? La chanteuse, pour distraire sa marionnettiste, l’entraîne à chanter et se révèle une coach impitoyable, malicieuse autant qu’affectueuse. Le vrai sujet de ce spectacle est là, la résilience par l’art, Édith en connait un rayon à ce sujet. Nous assistons à une transmission subliminale qui permet à une jeune femme agressée de retrouver sa voix ; progressivement les deux femmes ne vont plus faire qu’une, soudées dans l’amour du public et une tendresse indéfectible. Pour Édith, Yael fait revivre Marcel Cerdan, à travers des séquences hilarantes. Sur un ring de boxe miniature attaché au cou de la marionnettiste, nous revivons le célèbre match contre La Motta avec des figurines pas plus hautes qu’un crayon au départ. Au fur et à mesure, sur l’insistance d’Édith, Yael grandit Cerdan jusqu’à faire apparaître une marionnette géante. Les ébats des amoureux ont lieu dans des draps de soie entourés d’un castelet. On est bluffé par le décalage entre les moyens utilisés, d’une simplicité enfantine, et la puissance des effets visuels.

La parole des femmes invisibilisées résonne dans cette pépite du théâtre d’objet, drôle, poétique, intelligent, généreux. Allez la voir !