© Camilla Greewell

ƒƒ article de Denis Sanglard

Draw from within, dernier opus de Wim Vandekeybus, offre encore une fois la même folie, la même énergie concentrée et explosive et ce questionnement qui le taraude depuis les années 1980, autour de la naissance, de la vie, de l’amour, de la mort et de la violence du monde. Et sur le plateau ça déboule sec, les danseurs sont littéralement projetés des coulisses, la scène traversée à grande vitesse. A peine vus, déjà disparus, réapparus illico. Seul, à deux, par trois et plus… Un maelstrom infernal qui les voit se jeter au sol, s’affaler et bouler, rouler, dessiner quelques figures cul par-dessus tête, avant de se relever, repartir au triple galop. Dans ce décor sans cesse en métamorphose, en mouvement perpétuel lui aussi, paravents mouvants et câbles sectionnant l’espace, qui isolent comme ils rassemblent, fracturent le groupe aussi bien qu’ils le soudent, ménagent des espace intimes avant de les ouvrir en grand, Wim Vandekeybus écrit dans un semblant d’urgence une chorégraphie hallucinée où le réalisme le dispute au fantastique et le grotesque au tragique. Une imagination qui déborde de toute part, jusqu’au trop plein et la surenchère mais qui sait aussi ménager des instants de quiétude, de grand calme avant la tempête. Un sens de l’image, comme toujours, qui voit ici la danse n’être que fumée, là des femmes accoucher d’adultes, ailleurs des corps se briser, paralysés devant l’effort d’un simple mouvement et qui les voit trembler de tous leurs membres alors que derrière eux un couple parade leur amour. Des images toujours réversibles, sèches et coupantes comme un coup de trique. Ce n’est pas sa compagnie Ultima Vez qui est en charge de cette chorégraphie mais le Ballet Rambert et ses jeunes danseurs issue de la Rambert Junior. Et c’est sans doute là que le bât blesse, que nous sommes quelque peu chiffons. Techniquement c’est parfait, imparable même. Seulement, il manque cruellement ici d’une maturité, d’une expérience de vie pour dépasser la danse et lui offrir une vraie profondeur. Ne plus être dans le faire et sa reproduction mais dans une vérité qui le dépasse. Particulièrement par cet univers si singulier que Wim Vandekeybus n’a de cesse, de pièces en pièces, d’explorer. Avec Ultima Vez, la force de cette compagnie tient à la personnalité de ses danseurs qui, dépassant la danse, atteignent une vérité que ne donne pas et jamais la technique. Ce qui manque cruellement dans ce bouillonnant et tourbillonnant Draw from within, c’est cette transcendance de l’interprète qui fait que la danse est toujours plus que de la danse, nous arrachant de notre fauteuil par une étrange catharsis. Alors oui, cette création est superbe, techniquement, visuellement. Les jeunes danseurs remarquables dans leur engagement fougueux et leur talent certain. On ne boude pas son plaisir mais de fait tout finit par sembler étrangement un poil académique, un pur exercice de style. Et de rester au bord…

© Camilla Greewell

Draw from Within chorégraphie et direction de Wim Vandekeybus

Assistants à la chorégraphie Maria Kolegova, Luke Jessop

Costumes Isabelle Lhoas

Lumières Francis Gahide

Avec Adèl Balint, Kym Alexander, Simone Damberg Würtz, Guillaume Quéau, Aishwarya Raut, Antonello Sangiradi, Max day, Alex Souillère, Daniel Davidson, Juian Gil, Conor Kerrigan, Jonathan Wade, Comfort Kondehson, Cali Hollister, Caiti Carpenter, Seren Williams

Du 3 au 6 février 2022

A 20 h

Théâtre du Châtelet / Théâtre de la Ville hors les murs

Place du châtelet

75001 Paris

Réservations :

www.theatredelaville-paris.com

www.chatelet.com

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