Un Fauteuil Pour l'Orchestre – Le site de critiques théâtrales parisien » Derrière le hublot se cache parfois du linge, une création collective Les Filles de Simone, au Théâtre Montfort

À l'affiche, Agenda, Critiques, Evènements // Derrière le hublot se cache parfois du linge, une création collective Les Filles de Simone, au Théâtre Montfort

Derrière le hublot se cache parfois du linge, une création collective Les Filles de Simone, au Théâtre Montfort

Jan 12, 2023 | Commentaires fermés sur Derrière le hublot se cache parfois du linge, une création collective Les Filles de Simone, au Théâtre Montfort

ƒƒƒ article de Hoël Le Corre

Après le succès des spectacles précédents, on peut dire que la nouvelle création des Filles de Simone était attendue avec hâte et curiosité. Et nous ne laisserons pas trainer le suspens plus longtemps : c’est une jolie réussite, fidèle aux recettes que cette compagnie engagée sait si bien concocter ; une grande marmite de féminisme, des pincées de références historiques et sociologiques, une rasade d’irrévérence, un trait d’humour, le tout saupoudré d’émotion et de délicatesse. Après la maternité, (C’est (un peu) compliqué d’être l’origine du monde), les injonctions et les violences faites au corps des femmes (Les Secrets d’un Gainage Efficace), ce nouvel opus au titre aussi poétique qu’explicite, Derrière le hublot se cache parfois du linge, ausculte cette fois-ci les relations au sein du couple hétérosexuel. Des rapports amoureux à la parentalité, en passant par les tâches domestiques et les habitudes sexuelles, les trois comédien.ne.s font passer le couple par tous les états, pour notre plus grand plaisir mais aussi, et ce n’est jamais loin avec les Filles de Simone, pour dénoncer les inégalités et les conditionnements qui existent encore et toujours.

A commencer par le symbole de la machine à laver, laquelle trône au centre du plateau, comme cristallisation de tant d’inégalités entre femmes et hommes…

Entre thérapie de couple et illustration de la vie quotidienne, avec « la tasse qui traine» pour fil rouge, les Filles de Simone nous invite à une réflexion enjouée et tout en nuance. Et ce dès le début du spectacle dans un truculent « flash forward » en forme de bord plateau où les artistes se livrent au jeu des questions-réponses avec les spectateurs. Cette scène est savoureuse à plus d’un titre ; non seulement elle a le mérite de surprendre dans la chronologie, mais en plus elle permet de désamorcer bien des défiances et des critiques, tout en n’éludant aucunement les questions, ni n’épargnant le patriarcat, la cible favorite de ce collectif.

Ensuite, les tableaux se succèdent dans un rythme soutenu et viennent démontrer que souvent, les « petites disputes de salle de bain » témoignent de problèmes bien plus structurels, et on oscille ainsi avec justesse de l’intime l’universel. Entre affrontements frontaux et petits arrangements, ce spectacle donne la part belle aux diverses émotions qui circulent dans un couple. Et il s’agit également et en évidence de voir comment ces émotions sont exprimées, ou contenues, en fonction des stéréotypes de genre, ce qui donne lieu à des moments intenses de théâtre. Pas de doute, cette compagnie a le don de s’attaquer à des sujets épineux sans laisser personne de côté, en dénonçant sans accuser, en rendant (im)pertinemment concrètes les références théoriques. Encore une fois, les Filles de Simone auront réussi leur coup en proposant un spectacle inclusif et instructif tout autant que ludique et populaire ! Et on ressort de la salle en se demandant comment, à notre tour, prendre le temps de réinventer l’amour et le couple…