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Caspar Western Friedrich, de Philippe Quesne, au théâtre Nanterre-Amandiers

Fév 19, 2016 | Commentaires fermés sur Caspar Western Friedrich, de Philippe Quesne, au théâtre Nanterre-Amandiers

ƒƒƒ article de Florent Mirandole  

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 © Martin Argyroglo

Une fine pluie arrose la scène du théâtre des Amandiers. Alors que les goutes de pluie sont transpercées par des faisceaux lumineux se transformant en arc en ciel, la petite troupe de comédiens se déplace avec précaution sur le bord de la scène pour observer. Un vent frais se répand dans les travées du théâtre. Le public observe avec la petite troupe la scène changer lentement d’atmosphère.

Philippe Quesne a créé un spectacle qui réveille les sens des spectateurs. Pour créer des images assez fortes, le metteur en scène s’est appuyé sur deux mondes apparemment opposés, le monde du western et du romantisme allemand. Alors que la figure tragique du jeune Werther vient rapidement se superposer à la figure héroïque et bourrue de John Wayne, l’assemblage s’avère incongru au premier abord. Ce n’est pas la cohérence historique qui a préoccupé Philippe Quesne, mais plutôt les sensations que ces deux univers transportent. Le metteur en scène crée ainsi une pièce traversée par les thèmes de la nature, de la solitude ou encore la place de l’homme sur terre. Ce n’est qu’au milieu des paysages étonnants, incongrus voire sauvages, que l’on perçoit enfin la créativité de ce bricolage esthétique.

Tout commence comme un film de Sergio Leone. Une petite troupe de cow-boys fatigués ère devant la scène, pour se réunir au milieu des herbes folles autour d’un feu et de quelques notes de guitare. Le décor est planté. Il va être déconstruit, puis remonté différemment, et déconstruit à nouveau. L’ambition n’est pas de raconter une histoire, mais de créer de nouvelles formes, de nouvelles images, et de nouvelles odeurs. La pièce n’a pas de direction, parce qu’elle est d’abord une volonté d’émerveiller, de surprendre. Par son esthétique d’abord. Les volutes de fumée omniprésentes ne cessent d’entourer chaque scène d’un halo de mystère, de découverte. Par sa poésie incongrue ensuite. La poésie en allemand ou en français revient régulièrement. Les vers déclamés au milieu de ce que l’on peut imaginer être une grande plaine sauvage et désertique n’en deviennent que plus magnifiques.

Sensés illustrer l’effacement de l’homme devant la nature, les comédiens ont une position particulière. S’ils ont l’innocence des premiers cow-boys, ils restent effacés, et mystérieux, pour être avant tout des « passeurs ». Leurs allers-retours quotidiens et leur séance de bricolage sur scène, servent à nous entrainer dans la construction d’un imaginaire, et à s’étonner avec nous des paysages grandioses ou chimériques qu’ils viennent de construire. C’est dans cet esprit que le petit groupe fait un selfie devant les décors qu’ils viennent d’achever. A l’image de ces comédiens dos tournés à la scène, la pièce veut avant tout amener le public à explorer d’autres frontières. On ressort émerveillé du théâtre des Amandiers, enthousiastes comme après un voyage lointain.

 
Caspar Western Friedrich
Metteur en scène Philippe Quesne
Collaboration artistique Elodie Dauget, Léo Gobin
Dramaturgie Johanna Höhmann, assisté de Martin Stauber-Valdes
Assistantes mise en scène Anta Helena Recke, Lulu Tikovsky
Lumière Pit Schultheiss, Philippe Quesne
Son Robert Goeing, Rinse De Jong
Régisseur de scène Lutz Müller-Klossek
Assistante scénographie Marie Häusner
Assistante costumes Sophia May
Acteurs Peter Brombacher, Johan Leysen, Stephan Merki, Julia Riedler, Franz Rogowski 

Du 15 au 19 février
Tous les jours à 20h30, jeudi à 19h30

Durée 1h50
Théâtre des Amandiers de Nanterre
7, avenue Pablo Picasso
92022 Nanterre
Réservations : 01 46 14 70 00
www.nanterre-amandiers.com
 

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