Un Fauteuil Pour l'Orchestre – Le site de critiques théâtrales parisien » Bien arrivée à Ottawa, texte et mise en scène de Tatiana Gousseff, Théâtre La Flèche

À l'affiche, Critiques // Bien arrivée à Ottawa, texte et mise en scène de Tatiana Gousseff, Théâtre La Flèche

Bien arrivée à Ottawa, texte et mise en scène de Tatiana Gousseff, Théâtre La Flèche

Oct 14, 2019 | Commentaires fermés sur Bien arrivée à Ottawa, texte et mise en scène de Tatiana Gousseff, Théâtre La Flèche

ƒƒƒ article de Corinne François-Denève

Comment faire avec nos empêchements ? Comment essayer d’exister en tant que comédienne lorsque, venue du fin fond de la Bretagne, issue d’une famille qui n’a rien à voir avec le théâtre, on tente d’exister, à Paris, dans la jungle des castings ? Comment faire, surtout, quand on développe une phobie bien ennuyeuse, celle de la conduite ? Marie-Yolande se pose ces questions, devant nous, sur la petite salle du Théâtre La Flèche. Elle a pris à bras le corps sa « problématique », pillant les rayons « développement personnel » de la FNAC, courant de cure en cure – méditation, sophrologie, thérapie comportementale, hypnose eriksonnienne, psychogénéalogie, consultations chez des gourous du bonheur. Elle a cherché son clown, son enfant intérieur, son petit bambou, et nous livre sur scène le résultat de son cheminement – un résultat qui se révèlera, disons-le tout de suite, réparateur et positif.

La pièce commence par une demande de consultation à Sainte-Anne : on pourrait tout craindre, sauf que dès le début, de subtils signes indiquent que la folie sera douce et le rire bien présent. Cela n’empêchera pas les moments d’émotion, comme lors de la survenue, sur un écran en fond de plateau, de la propre mère de la comédienne, rivée à son fauteuil, dans son EHPAD, mais philosophe et bonhomme.

« Marie-Yolande », qui se réinvente d’ailleurs en « Marilande » est, et n’est pas l’actrice qui l’incarne, Marité Blot. Tatiana Gousseff a taillé dans la matière de ses confidences pour construire un spectacle qui reprend sans doute beaucoup d’éléments de sa vie. Une figu’ pourrie dans un Julie Lescaut, rendez-vous au milieu de la morne plaine yvelinoise compris, une escapade en 4 L pour aller voir un improbable Roi Lear donné en plein air… Les saynètes s’enchaînent, dans une mise en scène minimaliste mais juste. Quant à la comédienne, elle sait parfaitement varier les tons et les registres et porte « sa » pièce à bout de bras avec une conviction et un abattage remarquables.

Bien arrivée à Ottawa se donne au Théâtre La Flèche, lieu récemment repris par Flavie Fontaine. La directrice se situe dans la droite ligne du théâtre de La Loge, faisant le pari du soutien à la création. Spectacles en coréalisation, temps de résidence, partage des bénéfices à 50 % sans minimum garanti : l’entreprise est suffisamment rare pour qu’on le signale. En outre, sert d’annexe et de bar au théâtre « La Belle Équipe », niché un peu plus loin. Pour plein de raisons, on ne peut qu’aimer cela.