© Hervé Cherblanc

ƒƒ article de Corinne François-Denève

Il y a des spectacles nés avant le COVID, qui sont morts de leur solitaire et triste mort ; puis il y a les spectacles qui ont survécu, pleins de résilience, patiemment accompagnés, dûment et tendrement portés. Bao Bras est de ceux-là. La scène nationale de Sète, en effet, est une des rares structures en France à faire de la production déléguée. Séduite par la proposition d’Elise Douyère, Normande confinée à Sète, de mer en mer, l’équipe a soutenu la naissance de la pièce, qui a finalement vu le jour en novembre 2023.

Cette longue gestation va très bien au spectacle, qui entreprend de narrer comment le petit « Bao Bras » devient grand, et doit se confronter aux épreuves de la vie. Pensé comme un spectacle jeunesse, Bao Bras est plus que cela. Le texte est très exigeant. Il s’agit d’un long poème psalmodié, à effet de ritournelle, dit rapidement, dans la hâte et la ferveur, comme dans un murmure habité. Un découpage clair en épisodes aide toutefois le public à se repérer : les espaces et les temps sont immédiatement installés par un changement de costumes, ou de décor. La scénographie, simple, est aussi remarquablement efficace : un rideau qui sert de séparation, un écran, des ampoules qui descendent, une très grande robe qui se dévide d’un côté à l’autre de la scène. Une musique, enfin, jouée sur scène par l’acteur qui incarne le héros, scande idéalement le rythme de la pièce.

« Mais enfin, qu’est-ce qu’elle est devenue, Petits Yeux ? », demande, à la fin du spectacle, la petite fille perdue dans son grand siège. L’heure de la pièce passe comme un enchantement ; le public reste sage, rivé aux aventures du héros. Quant à l’histoire, il est permis de l’imaginer comme on veut : grands yeux bien ouverts sur le sort de « Bao Bras » et de « Petits Yeux », peut-être encore vivante, renaissant bien en tout cas chaque soir.

Le Théâtre Molière de Sète (qui a vu naître Jean Vilar, avant qu’il ne poursuive ailleurs l’ouvrage du TNP et d’Avignon) est également remarquable en ce qu’il propose un système d’itinérance : ainsi, c’est au Centre Culturel Léo Malet de Mireval que Bao Bras s’est posé, avant de s’envoler en tournée vers Rodez ou Dieppe.

© Hervé Cherblanc

Retour sur La Biennale des Arts de la Scène en Méditerranée

Le Théâtre des 13 vents à Montpellier, l’Opéra Comédie à Montpellier, l’ICI—CCN Centre Chorégraphique National Montpellier Occitanie, mais aussi le Centre culturel le Forum à Balaruc-le-Vieux, la Passerelle à Sète, le Théâtre Jacques Cœur à Lattes, le Foyer des Campagnes à Poussan, la Salle Jeanne Oulié à Mèze, ou encore la Baignoire, lieu des écritures contemporaines… La Biennale des Arts de la Scène en Méditerranée, qui en est à sa deuxième édition, vit de façon très concrète sur le « territoire ». Trois semaines de spectacles, avec pour thème commun celui de la Méditerranée, et une multitude de propositions. Se sont ainsi succédé Fabrice Melquiot et Emma Dante, Nicolas Fayol et Danya Hammoud, Chrystèle Khodr et Jasser Haj Youssef. Des concerts, du cirque, de la danse, une revisitation des Prétendants à la couronne d’Ibsen déplacée au Liban, des conférences d’Olivier Neveux et des bords plateau animés par Alix de Morant…

Le 25 novembre, c’est dans le magnifique théâtre à l’italienne de Sète, le théâtre Molière, que s’est tenue la soirée de clôture, confiée au collectif Maison Lieu. Ecoute, sous casques, et sur les banquettes rouges du hall, de « lectures électriques » (textes de Samuel Beckett, Lazare, ou Yannis Ritsos, entre autres) ; sieste acoustique, concerts H et Oriental Ballroom, où un oud psychédélique a fait se déhancher, au parterre, une jeunesse conquise ; puis DJ set à 23h30, sous les grands lustres du foyer… Tous spectacles gratuits, drainant un public divers. Montpellier-Sète est candidate pour être la « capitale européenne de la culture » en 2028. Comment résister ?

© DR

Bao Bras, de Clément Dupeux en collaboration avec Elise Douyère

Mise en scène : Elise Douyère

Avec : Marceau Portron, Rodolphe Poulain ou Charly Fournier (en alternance), Elise Douyère ou Pauline Collin (en alternance)

Création musicale : Marceau Portron

Assistante mise en scène : Pauline Collin

Regard extérieur : Guillaume Lambert

Scénographie : Hervé Cherblanc avec la participation de Camille Allain Dulondel

Création lumières : Théo Le Menthéour et Hervé Cherblanc

Création vidéo : Clément Dupeux

Création costumes : Lise Cretiaux avec la participation de Tifenn Morvan

Régie vidéo : Marjorie Calle et Théo Lavirotte

Régie son : Charlotte Notter

Régie lumières : Théo Le Menthéour et Hervé Cherblanc

Régie plateau et générale : Cléo Ringeval et Antony Lille

Avec la participation de : Nolwenn Ledu, Guillaume Geoffroy, Céline Vacher, Stanislas Perrin, Félix Bataillou, Emilie Fau, Emmanuel Danon et Timothée Lerolle

Durée estimée : 1h

À partir de 8 ans et +

Vu au centre culturel Léo Malet, Centre Culturel Léo Malet, Mireval, le 25 novembre 2023

Théâtre Molière – Sète, scène nationale archipel de Thau

Avenue Victor Hugo

34200 Sète

T+ 04 67 74 02 02

www.tmsete.com

Tournée : voir : https://tmsete.com/productions/bao-bras#tour

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