À l'affiche, Agenda, Critiques // « At the same time we were pointing a finger at you, we realized we were pointing three at ourselves… » de Robyn Orlin avec la compagnie Jant-Bi/Germaine Acogny, au 104

« At the same time we were pointing a finger at you, we realized we were pointing three at ourselves… » de Robyn Orlin avec la compagnie Jant-Bi/Germaine Acogny, au 104

Avr 14, 2015 | Commentaires fermés sur « At the same time we were pointing a finger at you, we realized we were pointing three at ourselves… » de Robyn Orlin avec la compagnie Jant-Bi/Germaine Acogny, au 104

ƒƒƒ article de Florent Mirandole

 

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Il y a la danse, il y a les couleurs, il y a les bassines en plastique… cette pièce pourrait facilement se transformer en une présentation spectaculaire et folklorique de l’Afrique si « At the same time… » n’était pas une pièce mise en scène par Robyn Orlin. La metteuse en scène sud-africaine insuffle à nouveau avec talent son ironie et son humour à un sujet profondément politique, la place du corps en Afrique. Une fois n’est pas coutume, l’Afrique du sud et ses colons britanniques ont laissé la place à l’Afrique francophone et à ses rites. La chorégraphe a travaillé avec les huit danseurs de l’école des Sables de Dakar, dirigé par la danseuse et chorégraphe Germaine Acogny.

La rencontre du mauvais esprit d’Orlin et l’enthousiasme débridé de la troupe créent un spectacle particulièrement déroutant et jouissif. A partir de mythe du « faux lion », emprunté à la culture sénégalaise où des « hommes-lions » effraient la foule avec leur danse et leur costume, la chorégraphe saisit à bras le corps les clichés autour de l’homme africain. L’objectif est à nouveau de bousculer nos préjugés sur l’Afrique. Ils nous sont d’ailleurs renvoyées en pleine figure dès les premières minutes, lorsque la troupe à la recherche du faux lion part à l’assaut des gradins de la petite salle du 104, escaladant dossiers et épaules. S’en suit un contrôle d’identité de tout le public, mêlé à des discussions téléphoniques, conciliabules et envoie de textos explicatifs de Robyn Orlin elle-même, affichés sur la scène. Les échanges avec le public se répètent alors tout au long de la pièce, entrecoupés seulement de scènes de danse pendant lesquelles la tradition reprend alors la parole.

Cette alternance traduit l’oscillation constante de l’Afrique entre tradition et modernité. L’introduction d’une petite caméra portable dont l’image est reproduite sur la scène, et avec laquelle chacun des danseurs va jouer pendant les danses, est en ce sens révélateur de la coexistence de ces deux dynamiques. Mais leur cohabitation au sein même de la culture africaine semble être assumée par la jeune troupe. C’est au final davantage le public qui est mis devant ses propres préjugés et paradoxes, partagés entre la fascination pour ces danses africaines si éloignées des canons de nos ballets classiques et l’ironie mordante de ces hommes noirs ultra connectés devant un public ultra blanc.

La pièce ne se transforme pourtant à aucun moment en un procès de la vision occidentale. La chorégraphe et les danseurs ont fait le choix de la séduction, en invitant le public dans leur joyeux chaos. La chorégraphe s’est d’abord attachée à donner le plus de latitude possible à la troupe, pour danser, improviser et jouer avec le public. S’ensuit un défilé de danses spectaculaires et rythmées, entrecoupées de scènes absurdes et réjouissantes. Personne ne saura pourquoi la troupe entonne à un moment donné la comptine si française du cerf et du petit lapin. Il n’en reste pas moins que la scène est hilarante. « At the same time… » est un grand bol d’air, et nous aide à rire de ce qui nous atterre d’ordinaire dans les médias.

 

At the same time we were pointing a finger at you, we realized we were pointing three at ourselves…
Choregraphie de Robyn Orlin avec la compagnie Jant-Bi/Germaine Acogny
Assistant de la chorégraphe Shush Tenin
Création lumière Laïs Foulc
Création costume Birgit Neppl
Vidéo Aldo Lee
Scénographie Robyn Orlin en collaboration avec Maciej Fiszer
Assistant de la chorégraphe Shush Tenin
Création lumière Laïs Foulc
Création costume Birgit Neppl
Vidéo Aldo Lee
Scénographie Robyn Orlin en collaboration avec Maciej Fiszer

Avec Hans Peter Diop Ibaghino, Khalifa Ababacar Top, Adelinou Dasylva,
Tchébé Bertrand Saky, Claude Marius Gomis, Aliou Ndoye, Mamadou Baldé, Mohamed Abdoulaye Kane

Les 11 et 12 avril 2015

Le Centquatre Paris 
5, rue Curial – 75009 Paris
Réservation 01 53 35 50 00
www.104.fr

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