À l'affiche, Critiques // Après une si longue nuit de Michèle Laurence, mise en scène de Laurent Natrella, à Théâtre des Corps Saints

Après une si longue nuit de Michèle Laurence, mise en scène de Laurent Natrella, à Théâtre des Corps Saints

Juil 13, 2016 | Commentaires fermés sur Après une si longue nuit de Michèle Laurence, mise en scène de Laurent Natrella, à Théâtre des Corps Saints

ƒ Article de Victoria Fourel

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Ils sont quatre enfants, venus du monde entier et revenus de leurs histoires, atterris dans la même famille d’accueil, dans le même refuge. Ils se sont construits les uns avec ou contre les autres entourés par les mêmes parents, la même mère adoptive. Et ils se retrouvent, au chevet de cette mère, projetés pour un instant dans leurs souvenirs, leurs joies et leurs privations d’enfance.

Ce texte, qui s’attarde sur les naïvetés et les histoires des enfants rescapés, victimes collatérales un peu laissées pour compte des combats des adultes, prend le temps de tracer ce qui les a réuni, ce qui les a opposé aussi. Il y a toujours un beau mélange d’émotions lorsqu’on se retrouve dans des moments de peine, lorsque la vie force les uns et les autres à se parler, à cohabiter, à faire les comptes. La figure de la mère adoptive est la figure rassembleuse, ici, et dans le texte, celle qui crée le liant. Dans une construction intelligente, on oscille entre les fragments de mémoire, les moments anxieux de salle d’attente d’hôpital, les regards de tendresse et les regards de bagarres enfantines. Et plus le spectacle avance, et plus cette construction prend sens. Leur point de départ : être posés, orphelins démunis chargés de leurs souvenirs. Leur point d’arrivée : cette salle d’attente, avec la lourde tâche d’entourer, d’accompagner, de former une famille. Entre Sarah, Samir, ‘Tekitoi’ et Pierrot, drôle de famille. Et cette écriture par éclats fait naître des surprises, des jolis moments, des vraies évolutions dans les personnages.

Mais la douceur qui se joue est aussi à double tranchant. En effet, les comédiens, performants et en place, sont parfois un peu enfermés entre les mots d’adulte que le texte choisit de mettre dans leur bouche, et les maladresses, les sourires, les affres de l’enfance. On peine souvent à jouer l’enfant, et dans le cas présent, si à aucun moment il n’est singé, on reste parfois un peu dans la recherche technique. Ainsi, le spectacle met un moment à se lancer, à trouver l’amusement dans cette vulnérabilité, à ne pas tomber dans le linéaire d’un caractère. De la même façon, si le décor est intelligent, malléable et léger, il aurait pu davantage joué sur la couleur, le fouillis que causent quatre enfants sous un même toit. Dans ce fond blanc, on manque de bazar, de rapidité, de dynamique, de couleurs. On manque de tout ce que les quatre comédiens dégagent, de tout ce que dégage cette histoire d’héritage, d’avenir, d’amour.

Se construire avec son passé, se lier et trouver sa place auprès de frères et de sœurs qui ne sont pas nos frères et sœurs, autant de problématiques passionnantes et très bien menées, même si tout n’est pas aussi drôle, aussi savoureux et surprenant qu’on l’aimerait, qui donne une idée de tout ce qu’il reste à dire de l’enfance, ses travers et ses espoirs.

Après une si longue nuit
Texte Michèle Laurence
Mise en scène Laurent Natrella
Avec Maxime Bailleur, Olivier Doté Doevi, Slimane Kacioui et Elodie Menant
Du 7 au 30 juillet 2016 à 12h20

Théâtre des Corps Saints
76 place des Corps Saints 84000 Avignon
Réservation 04 90 16 07 50

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