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Another Distinguée, La Ribot, Le CENTQUATRE-PARIS, Festival d’Automne à Paris

Nov 14, 2019 | Commentaires fermés sur Another Distinguée, La Ribot, Le CENTQUATRE-PARIS, Festival d’Automne à Paris

© Grégory Batardon 

 

ƒƒƒ article de Nicolas Brizault

Le Festival d’Automne à Paris présente cette année installations plastiques, spectacles, films, moyens d’expressions multiples, simples et tenaces de La Ribot. Un vrai plaisir lorsqu’on connaît La Ribot, un vrai plaisir lorsqu’on la découvre. Another Distinguée est en ce moment au CENTQUATRE-PARIS, moment évidemment curieux, frôlant le splendide, plongeant dans l’étonnant, étant tout simplement efficace, remuant, beau… C’est tout.  Une petite pancarte prévenait, discrète et amène, que les spectateurs seraient plongés dans une relative obscurité tout au long du spectacle et que tenter de se servir de son téléphone pour voir clair était, ce soir-là, une mauvaise idée. Ceux qui ne connaissaient pas La Ribot survolaient cette affiche naine sans y prêter attention, les autres, déjà, frémissaient d’aise.

Another Distinguée, créée en 2016, reprend, se sert, utilise huit « pièces » déjà mises en place, avec La Ribot et deux danseurs, Juan Loriente, Thami Manekehla, complices, reflets, apparition, ou non, on ne le sait pas. Les spectateurs sont jetés dans le noir, ou presque, essaient de comprendre, d’avancer en suivant des règles (euh…), en faisant comme ils peuvent, comme si. Autour d’un immense rocher-caverne en caoutchouc noir, à mi-chemin entre latex et sac poubelle, débute donc une longue et forte procession, un va et vient au hasard, pour tenter d’être plus proche, de voir. Les trois personnages se battent, dansent, se touchent, se défont, se déchirent, dansent, bref font l’amour au milieu du public, silencieux, emporté, plongé très vite lui aussi dans un rythme violent, et donc vrai.

Les spectateurs deviennent mobiles, sont happés ici ou là, par des silhouettes qui tentent de s’ébattre entre ces silhouettes de moins en moins passives, « entourantes » et proches. La Ribot pliée en deux se retient à votre cheville, pendant qu’un homme découpe, allège les couches de tissus qui la dissimulent et la rende anonyme. Puis c’est elle qui déchire, découpe, allège, la nudité est proche, la nudité est là.

Trois corps au milieu d’une foule aspirante, une musique qui assomme ou pire encore et si terriblement rare, un silence pur, rien, ni d’eux ni de nous, extase simplement, partage, vision, et les tremblements qui surviennent, là, juste après l’envie.

Les corps se cherchent, se trouvent, s’attendent. On sent un immense calcul dans cette « mise en scène », de quoi hypnotiser réellement le spectateur. Montrer combien la vie est folle, rapide, les rapports tendus et sérieux, que l’amour n’est pas rose bonbon, que le sexe n’est pas facile et tendre, mais tout simplement vrai, même s’il mène parfois à la mort.

On a l’impression d’être dans des artères, dans des cellules s’engageant enfin vers cet échange étrange où le présent est là, où tu es là, où je suis là, où il est là. Déchirés, à même le sol, perdus, écrasés, oui, mais là, pour de vrai. Connaissant la saleté, la douleur, une errance ultra rapide ou fort lente et silencieuse mais en somme le mouvement entre homme et femme, l’énergie, la couleur. La souffrance est absente de ces échanges, le regard apparaît, s’appuie, rebondit.

La vie est dans ses virages obscurs, la vraie, la forte, l’animale, l’originelle. Elle est même là tout à la fin, dans la mort, elle fait respirer la mort et empêche d’applaudir pour mal la réveiller, pour mal la relever. Les trois sont là, couverts de sang, peinture grasse, étendus au sol et le public, tout autour, assis, debout, allongé parfois lui aussi. Et pas un bruit, ou à peine. La Ribot nous a tenu dans sa main et nous tient encore, étouffés de beauté vermillon.

 

© Grégory Batardon 

 

Another Distinguée, chorégraphie et direction La Ribot

Conception et interprétation : La Ribot

Avec La Ribot, Juan Loriente, Thami Manekehla

Lumières : Éric Wurtz

Costumes : La Ribot 

Construction de décors : Marie Prédour, Victor Roy 

Musique : Alvaro de Cardenas feat Fernando Palacios, Materiel Object and Atom™, Sagittarius A 

 

La Ribot, née à Madrid, vit et travaille à Genève.
Plus d’information sur : www.laribot.com

 

Du 13 au 16 novembre 2019 à 20 h 30

Durée environ 1 h 20

 

 

Le CENTQUATRE-PARIS

 

5 rue Curial – 75019 Paris

Billetterie : 01 53 35 50 00 / www.billeterie.104.fr 

www.104.fr 

 

 

metro_7 Riquet

bus_54_60 Crimée, Curial

rer_e Picto Tram 3b Rosa Parks

 

 

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