À l'affiche, Agenda, Critiques, Evènements // A Revue, création et mise en scène de Benjamin Abel Meirhaegue, à La Villette

A Revue, création et mise en scène de Benjamin Abel Meirhaegue, à La Villette

Juil 03, 2023 | Commentaires fermés sur A Revue, création et mise en scène de Benjamin Abel Meirhaegue, à La Villette

 

 

© Fred Debrock

fff article de Denis Sanglard

 

Voilà, on dira que nous sommes en 4020 – si le changement climatique permet à l’humanité de tenir jusque là – et ce à quoi nous assistons ici, dans cet étrange cabaret, à l’heure de son renouveau d’une liberté frondeuse et vivifiante, cette revue des temps futur est un drôle d’éblouissement, proche de la sidération dubitative… Benjamin Abel Meirhaegue signe une création tout aussi déroutante que le fut Madrigals, où règne encore une fois une étrange et prenante atmosphère, entre poésie moirée un peu kitsch et archéologie savante. Avec au centre un questionnement, quel héritage musical et son interprétation aurons-nous dans le futur ? Quels souvenirs émergeront des ballets et opéras ? Quelles émotions aurons-nous devant ces fragments peut-être ou désormais diffus du passé ?

Cette revue, ce « cabaret rétro-futuriste », où le temps est aboli, la distinctions des sexes et des genres disparue, est une tentative de remonter le temps, d’interroger cette mémoire où le chant, la danse et le corps, toujours intimement liés, faisaient lien, voire communauté, à la fois dans son rituel mais aussi par l’émotion collective donnée. Drôle de cabaret à vrai dire, « rétro-futuriste » est-il dit, où se trouve compressée en strates composites et savantes l’histoire de l’humanité, projetée dans un futur imaginé, chantée et dansée par d’étranges humanoïdes n’hésitant pas à faire appel aux rituels les plus archaïques qu’accompagnent le chant et la voix, mis en miroir avec de nouveaux cérémoniels exaltant et l’un et l’autre avec en son hypocentre, en considérant cela comme un séisme, le corps. Qu’il soit dans sa brutalité et nudité sans fard, ou mutant et d’une extrême sophistication.

Dans cette revue, on cherche le cri primal, inarticulé, celui qui deviendra chant, qui engage le corps jusqu’à provoquer la transe qui deviendra danse. Plus loin encore remonte-on au moyen-âge, revisite-ton Vivaldi ou Mozart, voire Schubert et Kurt Weill, désacralisés, débridés, hybridés où l’acoustique, l’acousmatique, l’électronique injecté crée d’étranges et prenant paysages sonores et visuelles que quelques fragments mémoriels et fragiles de ballets traversent. Avec un sens inouï et inégalé du décalage incongru assumé, de l’audace, du bricolage et du pas de côté propre au cabaret. Et un érotisme franc aussi cru que ludique. Cela peut paraître déroutant, entre-autre de par son rythme singulier toujours étal, ou presque, mais la proposition ne manque ni de culot, ni d’aplomb, ni d’intelligence et de science musicale. Les images et les situations créées frappent fort sans que le chant en soit pour autant brouillé même soumis aux torsions et tensions les plus incongrues que lui impose le metteur en scène et performer qui semble tester là la résistance de ce répertoire. Et c’est bien en performer qu’il conçoit cette revue. Et pour ce faire il fallait bien des artistes à la hauteur de cette proposition sans concession, demandant un engagement total, corps et voix en avant dans la plus grande liberté. Tous avec un talent monstre répondent à cet étrange appel, cette extravagance qui est aussi exigence. La réussite de cette création tient aussi à ça, de jeter allegrement leur corps (et leur voix) dans la bataille et du passé non faire table rase mais un formidable champ d’expérimentation  pour le présent et le futur.

 

© Fred Debrock

 

A Revue, création et mise en scène de Benjamin Abel Meirhaegue

Avec : Ellen Wils, Maribeth Diggle, Arnaut Lems, Hanaka Hayakawa, Dolly Bing Bing, Simon Van Schuylenbergh, Jelle Haen, Bjorn Floreal, Sophia Rodriguez, Oriana Mangala, Adrien De Biasi, Eurudike De Beu, Linel Couchard,

Dramaturgie et textes : Louise van den Eede

Dramturgie musicale : Katharin Lindehkens, Lena Meyskens

Son et composition : Laurens Mariën, Jasper Segers

Piano : Maya Dhondt

Scénographie : Bart van Merode, Julien Weber

Lumières : Bart van Merode

Assistant scénographe : Zaza Dupont

Artistes visuels : Julian Weber, Sietske van Aerde, Daan Couzijn, Benjamin Abem Meirhaegue

Costumes : Julien Weber, Sietske van Aerde

Maquillage : Jelle Haen

 

Du 28 au 30 juin 2023 à 20h

 

Grande Halle

Parc de la Villette

211 avenue Jean-Jaurès

75019 Paris

Réservations : 01 40 03 75 75

www.lavillette.com

 

Be Sociable, Share!

comment closed