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ƒƒƒ article de Nicolas Thevenot

Nous sommes assis, debout, éparpillés sur différentes estrades dans la salle transformable de La Commune. Dans le silence qui suit leur arrivée, il y a la découverte de leur nudité, sauf des baskets et chaussettes blanches aux pieds. Il y a surtout ce moment où l’on se jauge, où l’on se compte, où l’on juge ses forces sans en préjuger. Longs regards comme un garde à vous. Et puis, sans crier gare, Davi Pontes et Wallace Ferreira entament leur marche scandée comme une parade militaire : pas frappés, cuisses relevées, coudes engagés. Leur nudité arme et désarme dans le même mouvement. Habituellement source de vulnérabilité, elle est ici le lieu de l’expression d’une force, d’une puissance en acte. Elle est un habit de lumière finalement sous les lumières néons de la salle.

Repertorio n°3 s’écrit par segments, dans une pratique de la coupure, à la manière d’un tour de garde. Les mouvements et gestes, opérant des formes minimalistes mais maximalistes dans leur exécution, s’articulent avec des séquences d’immobilité sauf des regards particulièrement actifs, se confrontant au public. Les deux chorégraphes performeurs travaillent l’écho de l’instant dans la déflagration du geste. L’esthétique de Repertorio n°3 est celle du panoptique, la chorégraphie d’ensemble emprunte à celle de la milice dans cette ambition de parcourir et couvrir la totalité d’une assemblée. Sauf que tout cela est arrimé à des « good wibes », des « love streams » qui affleurent du bout des doigts à la façon d’emojis. Œuvre que l’on imagine aisément dans un espace muséal contemporain, ce n’est pourtant pas une pièce distinguée, même si elle a droit à un numéro comme celles de La Ribot : quelque chose de brut, bien plus qu’une brutalité, s’exerce ici.

Repertorio n°3 est avant tout un retournement de situation, où la violence exercée sur les personnes racisées et/ou queer est reprise par celles qui les subissent dans une démonstration de force désamorcée par leur nudité même. Une main qui fait le vide autour d’elle avec dédain ou qui tourne au-dessus de la tête comme une hélice en est le nouveau garde à vous. L’humour est l’arme fatale de l’amour du prochain. Un cul dressé sur une estrade est trainé ainsi comme un char au milieu de la foule : le char militaire se métamorphose en char de parade. A « l’enculé » qui strie les conversations énervées de certains et qui revient à la mémoire, répond ce cul dressé sur un podium : dans cette révolution qui s’affirme, ce n’est plus le poing que l’on lève.

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Repertorio n°3, concept et performance de Davi Pontes et Wallace Ferreira

Durée : 35 min

Le 6 juin 2025 à 21h

La Commune – CDN Aubervilliers

2 rue Edouard Poisson

93300 Aubervilliers

Tél : 01 48 33 16 16

https://www.lacommune-aubervilliers.fr

Programmation dans le cadre du Pavillon Jardin Atlantique imaginé par Calixto Neto, La Commune CDN et les Rencontres chorégraphiques internationales de Seine-Saint-Denis

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