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La mort grandiose des marionnettes, variations, création et conception The Old Trout Puppet Workshop & friends, au Théâtre du Rond-Point

Mar 07, 2025 | Commentaires fermés sur La mort grandiose des marionnettes, variations, création et conception The Old Trout Puppet Workshop & friends, au Théâtre du Rond-Point

 

© Ad Zyne

ƒƒƒ article de Denis Sanglard

Oui, les marionnettes meurent aussi et ne s’en cachent plus. Au Théâtre du Rond-Point La Mort fait son show et c’est une danse macabre des plus réjouissantes. The Old Trout Puppet Workshop, un collectif de marionnettistes parmi les plus reconnus du Canada, imagine une anthologie, une recension imaginaire des scènes de mort soi-disant tirées des archives du théâtre de marionnettes. Et c’est un jeux de massacre jubilatoire, un chamboule-tout grandiose où l’absurde, la cruauté et l’humour noir accusent le tragique d’une existence, la mort aux trousses, qui ne tient qu’à un fil. 26 saynètes s’enchaînent ainsi, comme autant d’extraits d’un répertoire qui n’existe pas, sans autre lien que sa résolution forcement macabre. Pour nous guider dans cet inventaire funeste, un cacochyme Nathaniel Tweak épuisé qui finira lui aussi par passer l’arme à gauche, le battement sinistre du glas épousant celui de son cœur cessant de battre. Sur le plateau, un joli castelet traditionnel aux rideaux pourpre qui contient le destin fragile de notre condition humaine et de sa finitude. Que résume cette évocation poétique en diable d’une simple feuille morte balayée par le vent. Une épure franche au milieu de l’incongruité inventive des situations développées avec un goût certain pour le non-sens.

Point d’héroïsme devant la faucheuse, la mort frappe sans crier gare et accuse notre ridicule destinée, nos vies minuscules. Et puisqu’il s’agit d’un inventaire, chaque scène, toujours très courtes, abordent un registre différent dans son écriture et la technique employée, de la plus traditionnelle à la plus innovante. Marionnettes à gaines, à tringles, théâtre d’objets… c’est d’une formidable invention plastique jusque dans le grotesque des figures sculptées tant expressives.

Elles sont d’ailleurs trois à la manipulation, excellentes comédiennes et mimes aussi, toujours imperturbables jusque dans leurs facéties, qu’elles soient un arbre qu’emporte la tempête, mangent une banane, ou qu’elles agonisent toutes tripes sanglantes dehors. Suicides, meurtres, comportements à risque, accidents domestiques, extinction des espèces, les variations proposées débordent d’imagination farfelue ou de délicate poésie et révèlent combien le danger est partout qui n’épargne personne et frappe au hasard balthasar. Que les coïncidences, ironie du destin, peuvent-être fatales : jeter une peau de banane provoquer une éventration. Il faut ainsi se méfier de tout, des apparences comme des jolis papillons, des enfants innocents et même des salles de théâtre. Il y a de la férocité vraie, une certaine propension au sadisme, un goût affirmé pour le grand-guignol (giclent les cervelles, démembrés sont les corps, écrabouillés les têtes…) et le running-gag. Pourtant trois scènes échappent à ce traitement burlesque où le rire se fige brutalement. Une vieillarde sur un lit, sculpture naturaliste, simplement couchée, dont la respiration s’éteint au petit matin. La mort de la dernière baleine où l’œil, en gros plan, se ferme en douceur. Et ce livre pop-up ouvert sur un paysage bucolique aux couleurs pastel où chaque page tournée nous fait avancer vers une maison au lointain. Arrivé devant la porte ce sont des bruits d’une violence domestique insoutenable et le livre de se refermer brutalement nous laissant envisager le pire. Là, le rire qui jusqu’ alors secouait la salle à en crever se coince dans la gorge… Mais si dans l’ensemble, devant tant de morts si grandioses dans leur petitesses et ridicules, les spectateurs sont à leur tour prêt de de mourir, c’est bien justement de rire !

 

© Ad Zyne

 

La mort grandiose des marionnettes, variations, création et conception The Old Trout Puppet Workshop & friends : Peter Backwill, Don Brinsmead, Mitch Craib, Jen Gareau, Bobby Hall, Pityu Kenderes, Sarah Malik, Cimmeron Meyer, Judd Palmer, Stephen Pearce, Mike Rinaldi

Mise en scène : Peter Backwill, Pityu Kenderes, Judd Palmer

Avec : Louisa Ashton, Aya Nakamura, Teeele Uustani

Régie : Béatrice Galloway

Costumes : Jen Garreau

Création lumière : David Duffy

Assisté de : Ash Copeland

Création sonore : Mike Rinaldi

 

Jusqu’au 15 mars 2025

Du mardi au vendredi à 19h30, le samedi à 15h00 et 18h30

Relâche le 9 et 10 mars

 

Théâtre du Rond-Point

2bis, avenue Franklin D. Roosevelt

75008 Paris

 

Réservations : 01 44 95 98 21

www.theatredurondpoint.fr

 

 

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