© Blandine Soulage
ƒƒ article de Nicolas Brizault-Eyssette
Indestructible, plongeon dans les Trente Glorieuses, écrit et mis en scène par Manon Worms et Hakim Bah, a un sujet qui semble mouvementé et passionnant, entre 1968 et le tout début des années 1970, deux histoires qui se rejoignent à Sochaux. Celle de Bakary, jeune Malien engagé dans la résistance contre le régime de Modibo Keïta et qui décide de venir chercher du travail en France. Il passe d’abord par Marseille, et travaille dans le port. Suite à une bagarre il est emprisonné et soutenu par un pasteur, représentant de la CIMADE, mobilisant la presse et les immigrés pour lui venir en aide. Bakary est libéré, mais doit quitter Marseille où personne ne veut de lui. Il a alors l’idée de rejoindre Sochaux pour devenir manœuvre chez Peugeot.
La deuxième histoire est celle de Cathy, jeune lesbienne et étudiante parisienne d’extrême-gauche qui, pour mieux faire passer ces messages auprès de la Gauche Prolétarienne, décide de se faire embaucher elle aussi dans une usine à Sochaux. Elle vient d’un milieu sans souci et veut changer le monde à coups de révolution. Elle mène une vie sympathique et amoureuse avec Paquita, qui, elle, est davantage plongée dans les fêtes sans fin tout en paraissant réfléchir avec bien plus de profondeur que sa dulcinée. Mais pour Cathy, Sochaux et le prolétariat d’abord.
Cathy et Bakary se rencontrent donc à Sochaux sur le fond de « L’indestructible » Peugeot 504, que l’on retrouvait partout à cette époque, sous toutes les couleurs. Les sujets multiples d’Indestructible sont plus qu’intéressants et nous plongent dans une envie de lire le livre de Robert Linhart, L’Etabli, paru en 1978 dans Les Editions de Minuit et dont une autre adaptation, au cinéma celle-ci, Avec philosophie, de Mathias Gokalp, était sortie en 2023.
Indestructible est un simple jeu historique sur des grèves, des combats politiques, le racisme, un amour ? Ne pas tout raconter, vous verrez bien. Tout semble bien, décor pur et multiple à la fois, prêt à faire re-naître des idées rouges ou grises. En allant voir cette pièce, on imagine force et mouvements, combats. Oui tout est là mais au ralenti, dans un rythme épuisé. Il s’en dégage l’impression que mille idées d’adaptations étaient nées et qu’il avait fallu les représenter toutes, sans en laisser une seule de côté. Tout manque de gnons, de boum, de souffle et donne l’impression de voir parfois des collégiens pour la première représentation d’une pièce. Avec les thèmes de ce texte, c’est assez étrange comme résultat. Le début est trop étiré, le milieu remonte et attire l’attention et la fin est trop longue, quasi non-stop. Dès qu’une idée est trouvée, elle semble être secouée lentement et longuement, façon Jacques Demy politique dans un ralenti lassant. Dommage. Les décors et la scénographie sont très bons, excellent même, soulignons-le. Images géantes, du gris, idée de métal. Un peu plus de force, de compression et Indestructible le serait, indestructible, pas de doutes là-dessus. Tout est autour de cette fameuse voiture, la 504, quasi inexistante tout en étant là tout le temps. Alleluia et bonne idée, juste envie d’en voir un peu moins pour en sentir plus, et aller faire la fête avec Paquita, personnage dont la force et les réflexions sont rendues avec talent.
© Blandine Soulage
Indestructible, écrit et mis en scène par Manon Worms et Hakim Bah
Scénographie, costumes : Clara Hubert et Ninon Le Chevallier
Vidéo : Jean Doroszczuk
Son : Marion Cros
Lumières : Léa Maris
Régie Générale et régie son : Margault Wilkomm
Avec Emilien Audibert, Katell Jan, Adil Laboudi, Julie Moulier, Assane Timbo, Olivier Werner
Du 27 janvier au 8 février 2025
Lundi, mardi : 20h
Jeudi, vendredi : 19h
Samedi : 18h
Relâche mercredi et dimanche
Durée : 1h50
Théâtre de la Cité internationale
17 boulevard Jourdan
75014 Paris
Réservation : 01 85 53 53 85
www.theatredelacite.com
Les à côtés :
– Jeudi 30 janvier, rencontre avec l’équipe à l’issue du spectacle
– Vendredi 31 janvier, Chanter plutôt que déchanter
A l’issue de la représentation, venez entonner en chœur, feuillet en main, quelques chants de lutte des années 1970, avec l’équipe du TCi et artistique et l’équipe d’Indestructible
– Samedi 1er février, visite scénographique avec l’équipe artistique à l’issue de la représentation
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