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Didon et Enée, de Blanca Li, musique de Purcell, La Villette (Espace Chapiteau)

Oct 22, 2024 | Commentaires fermés sur Didon et Enée, de Blanca Li, musique de Purcell, La Villette (Espace Chapiteau)

 

© Dan Aucante

  

ƒƒƒ article de Emmanuelle Saulnier-Cassia

Comme toujours, dans un style et un langage chorégraphique encore différents, Didon et Enée, la dernière création de Blanca Li, éblouit ou ennuie.

La chorégraphe espagnole avait déjà travaillé sur le chef d’œuvre de Purcell à la demande de William Christie en 2023. Devenu depuis la nouvelle présidente de La Villette, elle a repris en ses murs la partition Didon et Enée pour créer un vrai ballet, en ajoutant à la musique de l’opéra enregistrée à l’occasion d’une représentation des Arts Florissants, Celestial Music Did The Gods Inspire, Z322, une autre partition du maître anglais du baroque.

Dans un registre résolument et principalement contemporain, empruntant néanmoins avec l’un ou l’autre danseur au registre du hip hop et notamment du electric boogie ou encore des ondulations des mains qui sans aller jusqu’au flamenco présentent une couleur très andalouse, l’œuvre musicale de Purcell emplit tout l’espace et guide mélodiquement la chorégraphie qui va rarement à l’encontre de ses pulsations propres.

La première scène est enjouée et l’idée si ingénieuse ! Chaque danseur mime à sa manière ou de façon harmonisée, en ligne, des instrumentistes à cordes. Un peu pour commencer comme l’on peut s’amuser à le faire seul en écoutant un morceau de musique chéri, ou afin de se moquer d’une situation mélodramatique. Cette gestuelle que chaque spectateur a donc un jour expérimentée devient peu à peu totalement chorégraphiée, à la fois ludique et brillante dans son exécution. La présente chroniqueuse a même eu l’impression à deux reprises de voir à la place des danseurs des notes de musique géantes sur une portée.

Sur un sol noir brillant, qui laissait penser dès le début qu’il ne devait pas être là pour rien, les morceaux de l’opéra se succèdent comme les déboulés parfaits sur le plateau. C’est un festival de pas de danse contemporaine exécutés avec une technique classique d’une grande précision. Les coups de pieds sont arcs boutés, les premières parfaites, les grands jetés légers, et accueillent avec naturel des wawes maîtrisées.

Des sons aquatiques emplissent ensuite l’espace presque noir qui accueille rapidement les premières glissades des danseurs alternativement en maillots ou vêtements noirs, parfois torses nus (femmes comprises), dans une partie plus sombre, collant au drame de Didon et Enée. Dans un jeu de lumières pouvant faire penser à Bob Wilson, et de clairs obscurs faisant apparaître des ombres chinoises, le ballet des amours contrariés de la Reine de Carthage et du Prince Troyen se poursuit dans une très grande sensualité. Les corps se rapprochent, s’étreignent, les hanches ondulent, les danseurs se regroupent en cercle comme un petit Boléro, des murmures, puis des cris orgasmiques s’élèvent succédant et précédant des glissades chorégraphiées millimétrées époustouflantes, qui modifient les perceptions que l’on a du corps des danseurs et des lois de la pesanteur.

On aimerait que le temps s’éternise sous le joli chapiteau de La Villette, face à cette scène épurée, uniquement habillée de lumières et d’eau, où dix danseurs aux physiques et qualités multiples ont partagé la scène pendant plus d’une heure, presque en permanence sur le plateau, comme autant de feux d’artifice explosant en solos, duos, trios ou ensemble. Si certains critiques ont trouvé le ballet convenu et sans surprise, les spectateurs sont nombreux à ressentir terriblement l’envie d’y retourner, appréciant à juste titre un ballet contemporain d’une très grande technicité, mais laissant place à beaucoup d’allégresse, de volupté et de beauté.

 

© Festival de Granada | Fermin Rodriguez

 

Didon et Enée, mise en scène et chorégraphie de Blanca Li, assistée de Déborah Torres Garguilo et Glyslein Lefeve

Scénographie : Blanca Li avec la participation de Pierre Attrait, assistés de Nina Coulais

Musique : Henry Purcell, enregistrement au Gran Teatre del Liceu de Barcelona (Les Arts Florissants – William Christie)

Costumes : Laurent Mercier, assisté de Ghjulia Giusti Muselli

Lumières : Pascal Laajili, assisté de Jean-Luc Passarelli et Boris Pijetlovic

Direction technique : Jérémie Oler

Administration de production et de tournée : Camille Denisty

Direction de production : Etienne Li

Avec : Alizée Duvernois, Victor Virnot, Julien Marie-Anne, Meggie Isabet, Maeva Lassere, Coline Fayolle, Gaël Rougegrez, Martina Consoli, Gaetan Vermeulen, Quentin Pic

Production : Calentito – Compagnie Blanca Li

Coproduction : La Villette – Paris, Chaillot – Théâtre national de la Danse, Théâtre de Liège

 

Durée : 1h10

Du 17 au 31 octobre 2024, à 20h de mardi à vendredi, 18h le samedi, 15h le dimanche

 

 

La Villette (Espace Chapiteau)

En partenariat avec Chaillot – Théâtre national de la Danse

Quai de la Charente

75019 Paris

www.lavillette.com

 

 

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