© Christophe Raynaud de Lage, Coll.CF
ƒƒƒ article de Nicolas Brizault-Eyssette
Encore une fois difficile de prendre le métro ensuite. Après une heure et demie qui a duré en fait des années, sous la neige, les fleurs, le printemps et un peu d’automne chargée de couleurs. Au tout début, on est d’abord époustouflé par les costumes, la scénographie, on grogne contre les petits micros, invisibles certes mais qui modifient un rien les voix. Un rien peut être énorme. On n’est pas encore dedans, peut-être qu’eux non plus, pas vraiment. Et puis les gnomes l’emportent, nous ne sommes plus à Paris, cité qui peut-être n’existe pas. Les gamins dans la salle sont restés des gamins gâtés et mal élevés donc discutent sur le fond faussement discret de « chuuuuut… » des parents. Puis très rapidement plus un bruit, pour de vrai. Donc… c’est bel et bien le spectacle qui l’emportent !
Nous sommes chez la Reine de la Neige, en cachette, pour mieux découvrir ses échanges avec la Grand-Mère. On est persuadé que ces comédiens et comédiennes sont des milliers et pourtant, six apparaissent sous les applaudissements, on est surpris, ne sait-on pas compter ? Ils étaient bien plus nombreux ! La Reine des neiges, l’histoire oubliée est un miracle issu du travail de Hans Christian Andersen, adapté, joliment revu par Johanna Boyé et Elisabeth Ventura. Le résultat est éblouissant. Pourquoi ? Comment ? On voudrait être grand et tout expliquer, prouver qu’on a tout compris, comme il faut. Pourquoi ? Le travail des metteurs en scène est-il de nous faire réfléchir sur le « pourquoi-comment » ou bien de nous faire sentir, ressentir, fondre, de ne plus être sur un fauteuil de velours rouge mais en pleine forêt, avec des bêtes sauvages, des gnomes, sans dire le moindre mal de ses voisins ?
Donc la surprise et la joie étaient là. C’est une fine équipe que nous avions sous les yeux. La grand-mère nous raconte presque tout du long cette histoire, s’efface, revient. Nous l’écoutons bouche-bée. Deux enfants s’aimaient, un garçon et une fille, et la Reine de la Neige passe par là et le petit garçon change, disparaît. Son amie le cherche, cherche et cherche encore. Lui est devenu sérieux, grave, elle ne le retrouve pas tout à fait. Des rencontres se font, vérité et mensonges dansent dans les champs, sous la neige ou le soleil. L’histoire qui défile ici a été modifiée ici où là par le travail consciencieux et fou de Johanna Boyé et Elisabeth Ventura. Nous sommes tous « pris ».
De minis détails pourraient être évités, comme cette neige superbe et magique qui ne tombe pas du ciel mais sort en terrible et laide forme cylindrique d’une grosse machine en coulisses. Ah ! ce n’est pas de la vraie neige. Certains costumes ont un très beau dessin, oui, sans aucun doute, mais réalisés avec des tissus qui n’atteignent pas tous la même folie douce. Les chants ne semblent pas tous l’emporter. Mais tout le reste frôle le parfait, le drôle, parle aux grands et aux petits, presque de la même façon. Non seulement les talents sont fous mais ils se mélangent joyeusement. Il y a même de la magie, inaperçue donc réussie ! Une belle et grande réussite.
© Christophe Raynaud de Lage, Coll.CF
La Reine des neiges, l’histoire oubliée, d’après Hans Christian Andersen
Adaptation de Johanna Boyé et Elisabeth Ventura
Mise en scène de Johanna Boyé
Scénographie : Caroline Mexme
Costumes : Marion Rebmann
Lumières : Cyril Manetta
Musique originale et son : Mehdi Bourayou
Travail chorégraphique : Johan Nus
Magie : Vincent Wüthrich
Maquillages et coiffures : Julie Poulain
Assistant à la mise en scène : Stéphanie Froeliger
Assistanat aux costumes : Violaine de Maupeou, Clément Desoutter
Avec :
Suliane Brahim : La Reine des neiges, le Petit Troll des mousses, le Princesse Lunettes, le Boiteux, un brigand, la Sorcières du crépuscule
Danièle Lebrun : la Grand-Mère, Madame Clément, le Petit Troll des champignons, la Vieille Brigande
Claïna Clavaron : le Petit Troll des arbres, Madame Chouettor, la Magicienne, la Petite Brigande
Léa Lopez : Liv, le Petit Troll des lichens, Gerda
Sefa Yeboah : Floki, le Petit Troll des pierres, le Prince des Lunettes
Dominique Parent : le Grand Troll, Monsieur Loran, le Corneille, le Renne, n’a qu’un œil, un brigand
Du 22 novembre 2023 au 7 janvier 2024 à 19h
Durée : 1h40
Comédie-Française, Théâtre du Vieux Colombier
21 rue du Vieux-Colombier
75006 Paris
Contact : 01 44 39 87 00 / 01
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