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La noce, de Bertolt Brecht, mise en scène d’Olivier Mellor, au Théâtre de l’épée de bois, Cartoucherie de Vincennes

Oct 27, 2021 | Commentaires fermés sur La noce, de Bertolt Brecht, mise en scène d’Olivier Mellor, au Théâtre de l’épée de bois, Cartoucherie de Vincennes

 

© Ludo Leleu

 

ƒƒ article de Denis Sanglard

Jeu de massacre jubilatoire ou comment une noce tourne à l’aigre. Comme le mobilier, ici tout se déglingue et finit par s’écrouler. Portrait au vitriol d’une petite bourgeoisie aigre, mesquine et méchante. Un chamboule-tout qui n’épargne personne. Rancœurs enfouies, jalousies, acre mesquinerie, ils sont veules, bêtes et méchants. Vulgaires et obscènes sous le vernis policé vite craquelé et le poncif de la bienséance. L’idéal bourgeois d’un confort douillet et d’une économie domestique, aussi bancal que les chaises, vole en éclat, s’effondre comme la table du banquet autour de laquelle la langue avinée et assassine se délie, et les préjugés frelatés se délitent sans vergogne. Bertolt Brecht dont c’est une des premières œuvres, 1926, pointe la défaite idéologique de l’Allemagne. La guerre est déjà là, au sein de cette petite bourgeoisie individualiste et revancharde, ventre fécond d’où surgira la bête, bientôt tentée par le nazisme. Comme avant la nuit de noce, sur ce champ de ruine dans cet appartement vite ravagé, tout est déjà consommé. C’est une farce féroce, une charge énorme. Le rire claque certes mais n’est que l’expression d’une ironie mordante sur le tragique et le pathétique de ces existences riquiquis gonflées d’importance et de ridicule. Et c’est monté comme ça, avec cette virulence et cet excès propre au burlesque par Olivier Mellor. La parole est un flot, un fleuve qui ne se tarit brièvement que dans le silence d’une gêne soudaine, d’un malaise passager devant les saillis lâchés comme par inadvertances, en toute fausse innocence, et qui révèlent des vérités peu ragoutantes. Les corps, comme le mobilier, finissent par se démancher salement sous les coups de boutoirs de désirs sexuels refoulés, engoncés dans un savoir-vivre mal dégrossi. Circulation des corps, circulation de la parole, c’est une ronde infernale, à vous donner le vertige, au rythme d’un orchestre de balloche endimanché, témoin emprunté, un brin embarrassé quand même devant cette dévastation générale. Olivier Mellor casse la baraque, les acteurs de même, dans tous les sens du terme. Ça manque un peu de nuance peut être, parfois, mais ce qui semble importer ici c’est cette énergie furieuse et ravageuse qui emporte les personnages dans une surenchère destructrice qui finit par se retourner contre eux. On peut juste regretter que cette acidité crachée qui ronge chacun ne s’étiole les invités partis, les jeunes mariés restés seuls. Une réconciliation sur l’oreiller, même explosive, semble balayer soudain les gravats amoncelés préfigurant leur avenir.

 

© Ludo Leleu

 

La noce de Bertolt Brecht

Traduit de l’allemand par Magalie Rigaill

Mise en scène d’Olivier Mellor

Avec Fanny Balesdent, Marie Laure Boggio, Emmanuel Bordier, Marie-Béatrice Dardenne, François Decayeux, Françoise Gazio, Rémi Pous, Stephen Szekely, Denis Verbecelte,

Musiciens Séverin « Toskano » Jeanniard (contrebasse), Romain Dubuis (piano), Olivier Mellor (batterie)

Son Séverin Jeanniard

Lumière Olivier Mellor

Costumes Bertrand Sachy

Maquillages Karine Prodon

Scénographie Olivier Mellor, François Decayeux, Séverin « Toskano » Jeanniard, avec le concours du collectif La courte échelle

Graphisme Jef Benech’

 

Du 7 au 31 octobre 2021

Du jeudi au samedi à 21 h

Samedi et dimanche à 16 h 30

 

 

Théâtre de l’épée de bois

Cartoucherie de Vincennes

Route du champ de manœuvre

75012 Paris

Réservations 01 48 08 39 74

billeterie@epeedebois.com

www.epedebois.com

 

 

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