© Théâtre de l’Uchronie
article de Victoria Fourel
Dans les rues sombres du Londres du XIXe siècle sont retrouvées des jeunes femmes assassinées. Pour mener l’enquête, le détective Hillingworth fait appel à Isabella Poe, écrivaine et experte en sciences occultes, et Roseleen, un fantôme de jeune fille prête à de grandes aventures. Entre adaptation de grand classique, policier et surnaturel, ce spectacle promet un voyage tout indiqué pour la période d’Halloween.
L’idée d’une adaptation de nouvelle mystérieuse a tellement de charme que l’on a envie d’être emporté par les aventures des enquêteurs. Mais dès les premières minutes du spectacle, on a un doute. Tout est joué sur un même thème, sur une même tonalité. Voyelles allongées, manières d’aristocrates appuyées, tout est fait pour surjouer l’ambiance. Et cela nous empêche d’entendre le texte de façon concrète et vivante. On est dans une espèce de mime de personnages de l’Angleterre victorienne, ni complètement revisité, ni vraiment réaliste.
Dans ce genre de spectacles, c’est avant tout une histoire d’atmosphère, qui doit nous immerger, jouer avec nous. C’est ce que réussit à faire la musique, assez jolie. Malheureusement, de nombreux détails très imparfaits des décors et costumes nous font régulièrement sortir du jeu. On sait qu’une lettre vient d’un certain destinataire alors que l’enveloppe et le papier sont complètement vierges, certaines tenues sont mal ajustées, et le Dr Jekyll verse ses éprouvettes de scientifique dans la théière… Dommage de laisser passer ces petites choses. Les pièces d’époque, même si elles ne disposent pas de grandes ressources, se doivent de nous bluffer, au moins un peu.
Le cadre de l’Espace 44 est forcément un atout. Ces murs de pierre et son espace original font qu’il n’y a pas un grand besoin de décors. Une table et deux fauteuils suffisent sans problème. Dommage alors, qu’il y ait dans le spectacle autant de transitions au noir et de petits changements de décor, qui font perdre son rythme au spectacle. C’est entre autres pour permettre aux comédiens de changer de rôles. Là aussi, on perd en intérêt, car les personnages ne sont pas assez dessinés. Et en plus, cela oblige le texte à justifier sans cesse que l’un des personnages soit absent pour permettre à l’autre d’apparaître. Certains passages de la création lumières sont assez intéressants, mais ne sont pas ou peu exploités. Une découpe ou des ombres apparaissent parfois, et pourtant, rien n’en est fait pour transformer l’essai. Comme s’il n’y avait aucun recul sur la mise en scène, sur l’aspect général du spectacle.
Enfin, la construction de la pièce nous est un peu étrange de l’extérieur. L’enquête de la Rue Morgue, qui donne son titre au spectacle, ne dure que la moitié du temps. Elle est suivie par un intermède audio, au cours duquel nous est résumée une autre affaire en quelques phrases, avant de nous lancer sur une deuxième histoire. Cela est peut-être dû à un problème de durée, à une envie de feuilletonner ou de décliner le spectacle en plusieurs. Toujours est-il que ça n’est ni beau ni très facile à saisir.
Il est finalement assez difficile de proposer des spectacles d’angoisse, d’épouvante, ou même à suspense. Cela demande une grande précision, un sens du détail certain, un texte ciselé. On ne peut pas dire que nous ayons eu le grand frisson dans la Rue Morgue.
© Théâtre de l’Uchronie
Le Vampire de la rue Morgue, textes Adeline Arénas
Mise en scène Maïté Cussey
Son et Lumières Robert Benz
Costumes Mad’Hands
Musique Louis Nas
Avec Ariane Charalambos, Maïté Cussey, Gaëlle Mignot, Ulyssse Mineo et Marvin Bel
Du 27 octobre au 1er novembre 2020
Tous les jours à 19 h sauf dimanche à 16 h
Durée 1 h 15 environ
Espace 44
44 rue Burdeau
69001 Lyon
Réservation au 04 79 39 79 71
www.espace44.com
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