© Gilles Vidal
ƒƒƒ article de Nicolas Brizault
Une soirée très intime, intense presque pourrions-nous dire, nous a été offerte à l’Espace Cardin du Théâtre de la Ville, reprenant des extraits de textes, lettres, journal de Patrice Chéreau. Son Journal de travail récemment publié et Les visages et les Corps nous ont déjà offert cette image très différente de Chéreau, Chéreau l’auteur et non uniquement Chéreau metteur en scène, cinéaste. Tous ces textes sont qui plus est mis en avant par Pascal Greggory, et l’on se sent privé de commentaires pour un choix si évident pour la lecture de textes de Chéreau.
Ceux qui m’aiment, titre allant de soi lui aussi, presque, en plus court, se marie très bien avec cette lente et dynamique suite d’écrits de Chéreau. Y sont présentés ses liens avec les comédiens et comédiennes, comment leur faire saisir ses idées, ses envies, ses nécessités pour la naissance idéale d’un jeu ; son acception de la mise en scène, comment plonger le sens d’une pièce de théâtre, pas forcément là où on l’attend avec évidence, pour faire simple quand la complexité elle-même peut faire jaillir la beauté, ce coup de poing inattendu, invisible. Ceux qui m’aiment retrace aussi les échanges avec Boulez pour la mise en scène à Bayreuth de la Tétralogie de Richard Wagner, avec Richard Peduzzi et ses décors, des questions, des réponses sur La reine Margot. Entre autres. Pas que cela.
Une scénographie pure soutient Pascal Greggory/Patrice Chéreau. Une longue table, deux chaises. Pascal Greggory bouge, se lève, nous entraîne loin de toute exemple de lecture ou de « conférence ». Un grand écran discret diffuse de temps en temps derrière lui des images, des atmosphères scellées aux idées jetées là, les retiennent, nous les propose différemment, nous les propose encore, second Chéreau ? Nous sommes complètement saisis. Pascal Greggory nous donne tout cela avec une grande souplesse, presque « amoureuse », celle qui sur son fil fait fourcher la langue, très souvent, noyée de délicatesse, de profondeur, de générosité ?
On suit tout cela, on écoute, entend, on se perd et retrouve la route, on prend ici ou là, on laisse, emportés par Bayreuth, hissés vers les coulisses, dans un train et face à ce qui parfois fait penser à une prétention ultra positive et constructrice. Des sourires, du désir, de la poussière ou du talent évident, là, sur des pages lues, tournées, retournées et se balançant vers le sol. Lumières éteintes. Ceux qui m’aiment.
Ceux qui m’aiment, textes et correspondances de Patrice Chéreau
Mise en scène Jean-Pierre Pancrazi
Avec Pascal Greggory
Dramaturgie Anne-Louise Trividic
Lumières Dominique Bruguiere
Assistée de Pierre Gaillardot
Son Olivier Innocenti
Vidéo Florent Fouquet
Costumes Annie Thiellement
Du 15 au 17 octobre 2019, à 20 h
Théâtre de la Ville – Espace Pierre Cardin
1 avenue Gabriel
75008 Paris
T+ 01 42 74 22 77
www.theatredelaville-paris.com
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