À l'affiche, Critiques // Les Fourberies de Scapin, de Molière, mise en scène Emmanuel Besnault au Théâtre du Lucernaire.

Les Fourberies de Scapin, de Molière, mise en scène Emmanuel Besnault au Théâtre du Lucernaire.

Jan 06, 2017 | Commentaires fermés sur Les Fourberies de Scapin, de Molière, mise en scène Emmanuel Besnault au Théâtre du Lucernaire.

ƒƒƒ Article de Victoria Fourel

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©DR

Scapin, le serviteur manipulateur, l’Arlequin aux mille intrigues, travaille aux intérêts de deux jeunes hommes face à leurs pères. Le chef d’oeuvre de comédie éternellement jeune se joue ingénieusement dans cette mise en scène vive et musclée.

Empreinte de comédie italienne, de théâtre de troupe et de tréteaux, Les Fourberies de Scapin est ici un hymne à la jeunesse, au rire, et aux rassemblements, sur une scène ou autour d’un feu. Emmanuel Besnault crée un habile mélange de bricolage spontané et d’ingéniosité : on change de personnage grâce à des accessoires, tous les acteurs sont sur le plateau et participent à créer le volume, le bruit, la vie. Un élément de ce décor en bois ressert plus tard, on truque sa voix, on amplifie les caractéristiques physiques, tout est bon pour que ça aille vite. Et dans le même temps, il y a un côté machine formidable dans ce plan incliné qui sert d’estrade, mais aussi de rampe de lancement, de praticable, et dans ce décor très simple qui change de forme au fur et à mesure. Même qualité dans les lumières : tout semble si simple, lumière naturelle de représentation à la belle étoile, jusqu’à ce que l’on remarque celle qui vient de derrière, qui grandit les silhouettes. Dans cet univers qui nous emmène dans les contes tziganes et dans le folklore des troupes itinérantes, on nous montre une grande décontraction, qui masque une technique folle.

Cette technique, elle est prégnante dans tout le spectacle, dans une sorte d’effervescence, qui pourrait tendre vers quelque chose de brouillon, et qui se trouve être de la virtuosité. Doser le décalage, amplifier les traits pour tuer tout réalisme, et créer l’amusement. On voit de la comédia dell’arte bien sûr, mais aussi de la marionnette, du masque. Il est, à quelques endroits, difficile avec tout ça, d’atteindre le concret, mais on ne peut s’attacher à cela. On est déjà occupé à rire d’autre chose. Impossible d’ailleurs de préférer un acteur à un autre : ils sont savoureux, tous. Là encore, le gag peut devenir omniprésent, avec les mimiques parasites d’une mise en scène qui se complaît dans un genre éculé. Mais là, il n’y a pas de personnage préposé à la blague, mais un niveau constant d’humour et de connivence entre les comédiens, et surtout, idée qu’on laisse parfois de côté : le sérieux, la tenue de corps, le rebond sur le plateau, qui nous fait dire que malgré l’envie de rire, ce n’est jamais aux dépens de l’intrigue ou du rythme du spectacle.

Sans ennui, avec un plaisir désuet, mais aussi une jeunesse et une fougue à toute épreuve, le spectacle est le reflet d’une jeune génération extrêmement bien formée, adepte du mouvement et de l’esprit de troupe, et surtout, inventive, très inventive. Pour la première fois, messieurs dames, et c’est une raison suffisante pour se déplacer, vous vivrez la scène du sac des Fourberies de Scapin, depuis le sac lui-même, folle idée, très drôle mais aussi très, très belle, poétique jeu de rôle, qui laisse rêveur.

Les Fourberies de Scapin
De Molière
Mise en scène Emmanuel Besnault
Avec Benoît Gruel, Schemci Lauth, Geoffrey Rouge-Carrassat, Deniz Turkmen et Manuel Le Velly.

Du 4 janvier au 19 mars 2017.
Du mardi au samedi à 20h et le dimanche à 18h.

Théâtre du Lucernaire
53, rue Notre-Dame des Champs
Métro Notre-Dame des Champs ou Montparnasse-Bienvenue
Réservation 01 45 44 57 34
www.lucernaire.fr

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