ƒƒ article de Florent Mirandole
Une énergie contenue, compressée et prête à exploser. Le court spectacle imaginé par Radhouane El Meddeb joue avec les lois de la physique en essayant de compresser l’énergie débordante de 10 danseurs de danses urbaines. Locking, popping ou encore hip-hop sont déployés avec intensité par ces danseurs habitués du 104. Seule barrière à leur expressivité, les limites étroites d’un carré sur lequel ils évoluent. L’énergie est alors encadrée, délimitée, concentrée. Paradoxalement, la danse de ces 10 danseurs n’a peut-être jamais été aussi inventive, tant la limite physique de ce carré oblige ces danseurs à créer de nouveaux mouvements, de nouveaux pas, de nouveaux déplacements pour respecter les bornes étroites de ces quelques mètre-carré. Chaque danseur doit alors être capable de faire prospérer sa danse malgré les déplacements infinitésimaux possibles. Ce ballet anarchique est doublement subtil puisque chaque danseur doit également faire attention à ne pas gêner ses partenaires. La fluidité des mouvements n’en demeure que plus exceptionnelle.
« Heroes, prélude » est également baigné par la musique envoutante de Philippe Glass et de Ravi Shankar. Les mélodies rythmées et répétitives qui accompagnent les danseurs amènent un certain sens de l’urgence à la troupe, qui semble alors comme habitée par un besoin irrépressible de danser. Cette profusion débridée de danse n’en est pas forcément joyeuse. Le plateau carré reste traversé par une incertitude. D’abord parce que la troupe doit parfois s’adapter à de légers mouvements chorégraphiques, comme lorsqu’elle est contrainte de se regrouper sur une moitié de carré. La danse relève alors de la performance, tant l’inventivité semble contrainte physiquement. Surtout, la pièce est traversée par l’image inquiétante d’un être quasi immobile. Le seul danseur en noir traverse cette débauche d’énergie d’un pas lent et solennel. Cette figure ne cesse d’intriguer, et de faire contrepoids aux 9 autres danseurs débordants d’énergie. Cette profondeur de champ qu’il amène rend plus dense cette pièce, plus complexe. Le final d’un soleil couchant devant lequel se dessinent les figures sombres des danseurs vient ajouter une touche mystérieuse à cette pièce magnifique et malheureusement trop courte.
« Héroes, prélude »
Conception, chorégraphie : Radhouane El Meddeb
Collaborateur artistique : Moustapha Ziane
Avec : Youness Aboulakoul, Aston Bonaparte, William Delahaye, Alexandre Fandard, Joyce Flammy, Emmanuel Jay, Annabelle Kabemba, Steve Kamseu, Smail Kanoute, Christian Serrein-GrosjeanDu jeudi 08 au samedi 10 octobre
Le 104
5, rue Curial – 75019 Paris
M° Riquet
Réservations 01 53 35 50 00
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