Critiques // « La Belle Hélène », l’opéra-bouffe d’Offenbach adapté par David Koenig au Théâtre Marsoulan

« La Belle Hélène », l’opéra-bouffe d’Offenbach adapté par David Koenig au Théâtre Marsoulan

Avr 06, 2010 | Aucun commentaire sur « La Belle Hélène », l’opéra-bouffe d’Offenbach adapté par David Koenig au Théâtre Marsoulan

Critique de Bruno Deslot

Le loup dans la bergerie

Une prédiction, un berger, une belle demoiselle et voici que la cité de Sparte s’agite autour d’une affaire inattendue.

Jacques Offenbach (1819-1880), s’empare d’une histoire plusieurs fois millénaires, pour en proposer une version retentissante et musicale. La Belle Hélène, victime de la fatalité, succombe aux charmes de l’homme à la pomme « Oui, c’est un rêve, un doux rêve d’amour ! », et s’endort dans les bras du beau Pâris, le berger à l’esprit fin qui vient de remporter un concours consacré « aux choses de l’intelligence » : devinettes, bouts-rimés et charades. « Gloire à Pâris victorieux », le beau jeune homme triomphe sans difficultés et les rois interloqués se demandent « quel est donc ce quidam ?». Pâris dévoile son identité au grand trouble d’Hélène qui craint de voir la prédiction se réaliser « Ô Ciel ! L’homme à la pomme », c’est bien lui ! Comment échapper à la fatalité lorsque l’époux de la reine, Ménélas, part en voyage pour la Crète ? Calchas, l’augure de Jupiter, aide le jeune Pâris victorieux à atteindre sa cible et lorsqu’il est en présence de la reine, lui fait part des trois moyens « d’arriver au coeur d’une femme » : l’amour, l’endurance et enfin la ruse ! Vaste programme pour le joli coeur que Ménélas retrouve dans les bras de son épouse à son retour de Crète ! La séducteur est chassé mais n’a pas dit son dernier mot !

Le « Petit Mozart des Champs Elysées » à l’honneur au Théâtre Marsoulan

Ouvert depuis à peine un an et demi, le Théâtre Marsoulan propose une programmation musicale et jeune public qui remporte l’adhésion des spectateurs, chaleureusement accueillis et satisfaits d’assister à des créations toutes plus singulières les unes que les autres. Après le succès de La Périchole et de La Grande Duchesse de Gerolstein, la compagnie Elixir Enchanté s’empare de La Belle Hélène dans un style anachronique et totalement décalé.

Des costumes qui réconcilient les Anciens et les Modernes, dans une ambiance potache et complice où les gags s’enchaînent au rythme entraînant des airs bien connus de cet Opéra-Bouffe où tout est permis. Un bouillant Achille en tenue de combat qui a égaré quelques neurones en chemin, imposant sa logique de sportif à Agamemnon dépassé par les évènements. Une Hélène savoureuse et irrésistible, jouant les vierges effarouchées dès lors qu’elle croise le regard conquérant du jeune prince au bâton de berger ! Calchas tente, bon gré mal gré, de jouer les médiateurs, mais trop c’est trop, et puisque c’est la fatalité qui en a voulu ainsi, toute la cour de Sparte s’anime dans un tourbillon haut en couleurs.

Un décor de guingois évoquant l’Antiquité dans sa dimension la plus convenue, ouvre la voie aux gags et ratages d’une troupe au jeu tonitruant, tonique et convaincant. Les hommes habillés de tuniques blanches ceinturées à la taille, investissent un plateau balisé de colonnes doriques évoquant l’intérieur du palais de la reine. Un rideau de coton blanc, fin et transparent, dévoile en ombres chinoises, des torsions de corps aux formes suggestives, à mesure que la fatalité devient un prétexte pour Hélène et son berger ! Un chien ailé, venant sur scène apporter un message des dieux pour regagner la coulisse après avoir avaler une friandise à la hâte…Et ce n’est que le début. Les comédiens alternent les parties chantées et celles jouées avec beaucoup d’amusement, cependant l’univers totalement anachronique et déjanté qui est proposé ne va pas jusqu’au bout de ses promesses. La troupe hésite encore à se lancer à corps perdu dans une version farcesque et grotesque d’un Opéra-Bouffe dont elle maîtrise pourtant les codes. L’ensemble est encore un peu timide et l’on souhaiterait que les comédiens, à l’image d’un Ménélas d’une grande justesse, aillent au bout de leurs engagements. Puisque tout est permis, autant y aller franchement et emmener le public aussi loin que possible dans cette folle aventure de la Grèce… cette « bou-Grèce ! ». L’adaptation de La Belle Hélène, proposée par David Koenig, est d’une grande cohérence et donne à voir et à entendre les moments les plus représentatifs de l’oeuvre d’Offenbach en 1h30. Très accessible et jamais grossière, la proposition, assurément comique, s’adresse aux petits comme aux grands.

Un pari réussi pour une troupe qui gagne à être connue dans un lieu particulièrement agréable et propice à toutes les fantaisies musicales.

La Belle Hélène
De : Jacques Offenbach
Adaptation et mise en scène : David Koenig
Avec (en alternance) : Laetitia Ayrés, Camille Fabre, Sophie Sara, Fanny Crouet, Aurélie Koenig, Marlène Connan, Claire Roumajon, Pablo Ramos Monroy, Mathieu Sempere, Eric Vignat, Fabrice de la Villehervé, David Koenig, Florian Cléret, Jean-Philippe Cone, Anthony Michineau, Benoît Jeannes, Fabrice Todaro, Pierre-Louis Crevoisier, Thomas Rouzeau
Chorégraphie : Claire Roumajon
Costumes et décors : Aurélie Koenig et Michèle Dalibot

Du 6 mars au 6 juin 2010

Théâtre Marsoulan
20 rue Marsoulan, 75 012 Paris
www.theatremarsoulan.com

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