© Dimitri Klockenbring
ƒƒ Article de Sylvie Boursier
L’ouverture se situe dans une maternité française avec d’emblée l’image de l’exil, la famille Farhadi perpétue les rituels de la naissance en Iran, chargée d’une batterie de cuisine de couvertures et de chaises. Dès lors le fondu enchainé va relier le présent de l’exil dans une banlieue française aux images fantômes du souvenir notamment à la prison d’Evine, située au nord de Téhéran, aussi célèbre qu ’Alcatraz, connue pour ses salles de torture. Elle abrite encore aujourd’hui tous les opposants au régime. Les panoramiques avec tapis qui se soulèvent et draps abolissent la distance géographique jusqu’à la belle scène finale de deuil. Les Farhadi, militants de la démocratie et laïques, n’imposent aucune culture religieuse à leur fille Yalda, lui inculquant liberté d’expression et d’imagination, naturellement elle témoigne de la saga familiale.
Si l’auteur n’évite pas toujours le discours politico-historique et les bons sentiments, la légèreté des surimpressions et la fluidité de jeu des comédiens prévient toute lourdeur, une mention spéciale à Olivia Pavlou- Graham dans le rôle-titre. Réceptive aux histoires contées, aux récits de la vie quotidienne chuchotés le soir, choyée par ses parents, elle aime la culture occidentale, le rap, curieuse, avide de savoir et de comprendre.
Pour Aïla Navidi écrire, mettre en scène et jouer c’est une façon de parler sans être interrompue, comme Jafar Panahri qui filme clandestinement, depuis son vrai faux taxi le quotidien à Téhéran, accueillant des personnalités ou des anonymes et repoussant la frontière entre fiction et documentaire. Avec le même humour que Marjane Satrapi elle croque sa famille, son pays, les bouleversements historiques, le danger du fatalisme et d’une certaine nonchalance politique dans nos sociétés cosmopolites, message essentiel transmis par Mina et Fereydou, les parents iraniens. On quitte le studio Marigny avec une furieuse envie d’aller dans ce pays du non-retour, sentir les rosiers d’Ispahan et boire un café au Bahar Narenj situé près de la cathédrale Vankar. Là-bas des familles ordinaires sont forcées de mener des existences extraordinaires sous un des régimes les plus répressifs au monde, la chair est triste au pays des mollahs où des jeunes femmes sont étranglées avec leur tchador au détour d’une rue ou, comme Mahsa Amini étouffées pour ne pas le porter.
© Dimitri Klockenbring
4211 km texte et mise en scène de Aïla Navidi
Scénographie : Caroline Frachet
Lumière : Gaspard Gauthier
Son : Erwann Kerroc’h
Avec : Olivia Pavlou-Graham,Florian Chauvet, Aïla Navidi en alternance avec Alexandra Moussai , June Assal en Alternance avec Lola Blanchard, Benjamin Brenière en alternance avec Damien Sobieraff, Sylvain Begert en alternance avec Thomas Drelon.
Du 10 janvier au 25 février 2024 à 20h 30
le dimanche à 16h
Théâtre Marigny / Studio Marigny
Carré Marigny,
75008 Paris
Réservation : 01 86 47 72 77
spectateurs@theatremarigny.fr
Tournée :
28 février 2024 Théâtre du Garde-Chasse aux Lilas
29 mars 2024 Théâtre Jacques Carat à Cachan
4 avril 2024 Théâtre du Vésinet
11 & 12 avril 2024 Montargis
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