Festivals // 30e édition du Festival International de Théâtre de Rue d’Aurillac, du 19 au 22 août 2015

30e édition du Festival International de Théâtre de Rue d’Aurillac, du 19 au 22 août 2015

Août 24, 2015 | Commentaires fermés sur 30e édition du Festival International de Théâtre de Rue d’Aurillac, du 19 au 22 août 2015

Impressions kaléidoscopiques de Dominika Waszkiewicz

affiche-aurillac-2015nadege-and-co-d-apres-une-illustration-d-henri-galeron1289-6-festival-de-rue-aurillac-2015-jpgQue celui ou celle qui n’a pas encore goûté aux surprises géraldiennes réserve illico un point de chute cantalien pour août prochain afin de savourer les nouvelles découvertes du Festival International de Théâtre de Rue d’Aurillac 2016. En attendant et en guise de hors-d’œuvre, voici un échantillon aléatoire de ce qu’a offert cette grande fête lors de sa 30e édition, entre le foisonnement vertigineux de ses rues pavées et les fertiles secrets de ses salles obscures. Le choix fut rude, et pour cause : même si la vingtaine de compagnies de la programmation officielle rassure, on peut vite se sentir submergé par les quelques 600 compagnies de passage.

Et c’est bien une vague qui nous entraîne dès la rituelle remise des clefs, sur fond d’hommage à Michel Crespin, décédé en septembre dernier. Vague humaine débordant sur le parvis de l’hôtel de ville. Vague d’émancipation, appel à l’irrésistible déambulation. Désir de découvrir, d’être étonné, dérouté. Envie de se rincer l’œil de tous ces petits débris accumulés qui forment comme une croûte de préjugés sclérosés. Car Aurillac, dans sa mouvante vitalité, c’est ça : le pas de côté qui rend le joug quotidien un peu plus lâche.

Préliminaires : la veillée aux flambeaux du 18 août

Grâce à la magie distillée par la compagnie Carabosse, la cité de saint Géraud a revêtu, le temps d’une veillée qui n’avait rien de funèbre, des flamboiements d’antan. Dans les dédales de pierres et de feu, le chatoiement des flambeaux nous a invités au merveilleux et au recueillement. Mais point de tristesse ni de nostalgie ici, juste une conscience décuplée du présent, du passé et de l’avenir, réunis en une vision presque chimérique et pourtant si concrète.

Les prophètes tourneurs

Chaussés d’échasses et se balançant sur des rythmes balkaniques, les derviches musiciens de la compagnie Celestroï distillent les notes prophétiques de leur univers steampunk. Baudroies abyssales agitant frénétiquement leurs lanternes, ils sillonnent la ville en quête de disciples, les initiant à leur séduisante uchronie, sortie tout droit des pages d’une BD fantastique.

La laine des moutons…

Sur un petit air de décroissance bienvenue et faussement maladroite, les circassiens de la compagnie Kadavresky nous enchantent de poésie et de talent. Prix de l’humour à Leioa en 2014, L’effet escargot jongle sur les faux hasards d’une mécanique précise et bien huilée. Les performances s’enchaînent comme par inadvertance entre chant, clavier, clarinette, guitare, saxophone ou encore scie musicale. Sur fond de Gabin (Doo Uap) ou de gospel (The Saints), les acrobaties se lient et se délient, par terre et dans les airs (ou sur skis !) et on s’éloigne à regret en emportant des bribes mélodiques qui trottent gentiment dans la tête, « la laine des moutons, c’est nous qui la tondaine… » longtemps, longtemps, longtemps.

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Des chevaux oui mais pour quoi faire ?

Le Parapluie, précieux creuset de création artistique installé à Naucelles depuis 2004, a accueilli le Théâtre du Centaure et sa 7e vague. L’histoire des deux traders montés, Solal et John, nous perd dans les affres absconses des paris boursiers. À coup de téléphones et de petits galops, les chiffres étourdissent et effacent une intrigue initiale pourtant glaçante de lucidité. Et si la 7e vague, celle qui va balayer tout le système bancaire et rétablir ainsi l’ordre de nature, allait bientôt déferler sur nos sociétés gangrénées ? Mais était-il besoin de centaures pour nous conter cela ? Le spectacle s’étire vers une chute attendue et sans final, malgré l’indéniable maîtrise technique des protagonistes, littéralement soudés à leur monture. La caressante poésie du début laissait pourtant présager des enjeux artistiques plus émouvants…

Divers remèdes contre l’hypothermie du cœur

En vrac, et pour faire écho au diagnostic du Théâtre du Laid Cru qui se propose de nous soigner à coup de BiZous de toutes sortes (Le Coup du Prince Charmant, l’étreinte maternelle ou encore le BaiZer de la Mort), la journée déclinante pare les rues d’ombres dansantes curatives.

Un Funambule des mots échappé de Brest et digne représentant de la compagnie de l’Arbalète lance avec force et conviction des vers de La Fontaine. « Le Loup et le Chien », choix judicieux qui frémit encore bien après que la perruque un brin défraîchie a disparu.

Changement d’ambiance : le groove cuivré du Jazz Combo Box Scratch’o Band de la compagnie des resonnables envahit la place du square. Avec leur scratchophone mobile (mais si, vous savez ce que c’est ! Et oui la platine tourne-disque que l’on gratte…) et leurs airs de jazz électro teinté de swing africain, les huit musiciens ambulants font vibrer de leur funk contagieux les pierres sombres du chevet voisin.

De l’inconscient dans les airs

Hommage à Winsor McCay et à son Little Nemo in Slumberland paru en 1905 dans l’hebdomadaire New York Herald, l’œuvre de Marc Mirales et des Plasticiens Volants vient clore ce premier jour par une note onirique. Bravant la fraîcheur crépusculaire, c’est un flot humain qui accompagne les géants de gaz à travers le parcours prédéfini. Petit garçon penché au-dessus de son lit, dragon gentil ou framboises géantes, les images du scénario dansent au rythme entraînant de nos songes et de nos cauchemars avant de nous abandonner, pantelants et aveuglés par la lumière crue des projecteurs, sur la place de la paix devenue depuis l’esplanade Michel-Crespin. Bravo !

2015.aurillac.net

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