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3 clowns, par la compagnie des bleus de travail, au Cirque Electrique

Déc 18, 2023 | Commentaires fermés sur 3 clowns, par la compagnie des bleus de travail, au Cirque Electrique

 

© Gilles Dantzer

 

ff article de Denis Sanglard

Quand trois clowns se rencontrent qu’est-ce qu’ils se disent ? Des histoires de clowns, évidemment. 3 clowns, donc, deux Augustes et un Blanc, pour une évocation de leur métier, mais pas seulement. Hommages à leurs maîtres à commencer par Jean-Baptiste Oriol, au tout début du dix-neuvième siècle dont Théophile Gautier fit le portrait, Footit et Chocolat qu’un film récent a permit de faire connaître, Alfred Pauwels dit Pepete, Les frères Fratellini (Paul, François et Albert), Annie Fratellini et Pierre Etaix, Zavatta, les Bario, trio dont le clown blanc était une femme, Henny (également magicienne). On y apprend aussi qu’au cirque, un clown fait une entrée, pas un numéro. Et ces entrées qui étaient une signature en soi, dument répertoriées dans les années soixante par Tristan Remy, sont ici évoquées et revisitées par nos trois artistes, détournés promptement, mis en abyme aussi. Evidemment il y a des claques, des chutes, une peau de banane, des assiettes qui volent et se fracassent, des tours de magie plus ou moins réussis, des domptages de brosse à cheveux, des acrobaties, de la danse… des numéros génialement ratés qui sont une réussite. On pense à Beckett, qui en connaissait un rayon en clown métaphysique, « rater, rater encore, rater mieux ». On joue de la musique, on parade en fanfare, parce qu’un clown, ça s’est tout faire, ou presque, qu’on soit clown acrobate ou clown de reprise (celui-là comble les temps morts entre deux numéros). Dans cette loge un peu foutraque, un cirque miniature en soi, où on les voit se préparer minutieusement et peindre leur visage, ça discute ferme, ça boit sec, s’engueule sévère aussi parfois, avant d’entrer en piste…  Ici, chacun est à sa place. Monsieur Lô, le clown Blanc, fait le maître de cérémonie, rêve de briller un peu plus, garde comme il peut son sérieux, sermonne comme de juste Airbus et Marcel ses deux comparses Augustes qui n’en font qu’à leur tête, font avec talent n’importe quoi comme de bien entendu, récusant naturellement l’autorité du Blanc avant de se soumettre bon gré mal gré. Blanc qui explique doctement le métier de clown, et c’est passionnant. Parce que clown, faut pas croire, sous la perruque, derrière le nez-rouge – le plus petit masque de théâtre au monde – et le fard, c’est sérieux, ça ne rigole pas. Il y a même Airbus qui craque, trente ans de métier et le même numéro, forcément ça use. Parce que se pose aussi la question de savoir quel est l’intérêt de continuer ce métier qui consiste à prendre continuellement des tartes et de chercher à faire rire tous les soirs. Être clown, ce n’est pas toujours marrant non plus. Mais le résultat de tant de sueur, de doute aussi, est là, dans le dérapage contrôlé de classiques revisités dont ils sont les héritiers talentueux. Un gag ne s’use jamais, c’est comme les peaux de banane, il y a mille et une façon de glisser sur elle et de chuter. Laurent Barboux, Lionel Becimol, Alexandre Demay – quand ils sont démaquillés – sont certes fort drôles (pour des clowns cela vaut mieux) mais en plus de l’art de la chute qu’ils maîtrisent parfaitement ont cette formidable capacité à nous transmettre et partager avec bonheur cette passion qui les animent. Chapeau, les artistes !

 

© Gilles Dantzer

 

3 clowns écrit, mis en scène et interprété par Laurent Barboux, Lionel Becimol, Alexandre Demay / Compagnie les Bleus de travail

Lumières : Gilles Cornier

Costumes : Nathalie Tomasina

Construction et création sonore : Lionel Becimol

 

Du 20 au 23 décembre 2023 à 20h3

 

Le Cirque Electrique

Place du marquis de Vercores

75020 Paris

 

Réservations 09 54 54 47 24

reservation@cirque-electrique.com

 

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