© Pauline Roussille

ƒƒƒ article de Nicolas Brizault

Assommés. Assommées. Du fantastique époustouflant. Qui coupe le souffle, abruti dans le sens le plus positif qui soit face au talent de ces deux femmes et du metteur en scène. Oh, photos illustrant cet article si fausses face aux rugissements qui nous sont offerts, se déversent et rebondissent !

Une mère meurt. Une sœur, la plus jeune des deux l’apprend tard et en veut à l’aînée. Thème du départ, coups de baguette du chef d’orchestre, puis ces sœurs se reprochent tout, détail par détail, si attentive à leur haine parallèle. Elles se ressemblent, savent danser comme elles savaient nager. Sont « jumelles » à deux ans près et sans trouver leurs places. Nous sommes face à un cercle, début et fin. Idem. Furieux.

Se mentent-elles pour trouver la qui est la meilleure ? Où est l’amour du père, de la mère ? L’amour. Une sœur lesbienne détruit le mari de l’autre, jalouse d’une normalité feinte ? Elles s’opposent en tout. L’une archéologue, souvenir de la mort, l’autre plongée dans tous les syndicats combattants pour la vie. Un miroir quelque part, avec un peu trop de mercure encore, pour tenter de faire mal, ne surtout pas dire que seules, on s’aime.

Elles hurlent en boucle. Pauses courtes, reprises pour tenter de gagner, faire mal, se venger de maman ? Une petite gorgée d’eau fraîche et les attentas rebondissent. On ressent les fautes dont chacune est victime. Le positif et le négatif se défoncent tout autant.

Une pose sans raison, dance et électro face à face, ensemble, union électrique avant nouveau départ.

Je tombe et ne me donne pas la main.

Je tombe et ne me donne pas la main.

Début et fin tout aussi anéantissant de masse, de terreur. Lumière et noir. Début et fin. Parfois on ne comprend pas ce qu’elles disent, tout sort trop avalé à force de vouloir tant se battre, mordre et se protéger des morsures. La falaise d’en face retient masses et rochers et ici ou là, ça tombe sur la mère mer, aimer. Elles ne savent pas, trop unies ?

Comme un coup de tambour, le noir arrive, dure, et la réalité et le théâtre reviennent, avec deux femmes anéanties, heureuses, pas encore retombées sur terre. Un heure trente qui jongle avec le spectateur, des milliers de mètres au-dessus de lui. Une création exceptionnelle, née d’un hasard giclant au creux d’une répétition tempête, et c’est de ça qu’est née l’essence du travail, dans une machine à laver en plein essorage, 90°. Le résultat se voit et se sent, se révèle sur les yeux rouges sous les applaudissements, l’impression d’avoir devant nous deux gamines perdues et impressionnées. Elles reviennent lentement, pas très loin du père, de la mère, du mari et de la copine, pas très loin des espaces qui les ont construites toutes les deux, pour en étudier et en défendre toutes les deux les ruines, humaines ou archéologiques. Les ruines. Il n’y a que ça et oui Marina et Audrey en sortent ruinées, errantes sur la scène immense des Bouffes du Nord, épuisées, heureuses sans doute, mains dans la main pour ne pas tomber, pour affronter leur talent et leur réussite.

Deux petites flammes après une guerre effroyable, un peu d’étonnement d’en être arrivé là et cherchant Pascal Rambert pour ne pas s’effondrer. Explosion de voix dans des corps simples, souffrant et tombant parfois, des voix qui pulvérisent et cessent d’exister, d’un seul coup.

© Pauline Roussille

Sœurs (Marina & Audrey), de Pascal Rambert

Texte, mise en scène et installation Pascal Rambert
Avec Audrey Bonnet et Marina Hands

Assistante à la mise en scène et directrice de production Pauline Roussille
Costumes Anaïs Romand
Régie Générale Alessandra Calabi
Régie lumière Thierry Morin

Du 23 novembre au 9 décembre 2018

Durée du spectacle : 1h30 

Théâtre des Bouffes du Nord

37 (bis), bd de La Chapelle

75010 Paris

Billetterie
Tél. : +33 (0)1 46 07 34 50
E-mail : location@bouffesdunord.com 

www.bouffesdunord.com

Accès
Métro
La Chapelle (ligne 2) Gare du Nord (lignes 4, 5, RER B, RER D

Bus  35, 48, 65, 302, 350

Vélib’
Station n°10034, 68 rue Louis Blanc
Station n°18040, 28 bd de la Chapelle

Parking à proximité
Parking Goutte d’Or, 10 rue de la Goutte d’Or, 75018 Paris

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