Il est 18h30, et alors que la Nuit du Cirque se déploie sur tout le territoire national, avec des évènements aux quatre coins de la France, à Saint-Herblain, tout près de Nantes, les spectateurs commencent à se presser sur le parvis du Théâtre Onyx. Etonnement, nous sommes accueillis à la billetterie, au bar, comme en salle, par des personnes en blouse blanche. C’est qu’ici, à Onyx, la soirée se déroulera sous le signe de la santé. Physique, mentale, la santé est une condition sine qua non pour se sentir bien et pouvoir entrer en contact avec notre environnement extérieur. De fait, nous entrons en relation avec les lieux, les personnes, les événements par ce que nous sommes. Et quand la forme physique ou mentale nous fait défaut, cela ouvre de nouvelles perspectives et une nouvelle appréhension du monde. Ce sont toutes ces thématiques qui feront vibrer le Théâtre Onyx, à travers les trois les spectacles présentés ce samedi 15 novembre.

La Nuit du Cirque s’ouvre avec un succulent Drache Nationale, qui saisit à bras le corps la question basique, un peu trash, mais essentielle :  Comment positiver quand c’est la merde ?Avec une complicité évidente faite de tendresse et de coups bas, comme seule l’intimité peut apporter, le trio belge plonge sans bouée dans divers aléas du quotidien pour nous en révéler les tracas autant que la beauté. Ces trois clowns-jongleurs alternent les silences gênés, les tableaux chorégraphiés et une parole éminemment poétique autant que concrète pour évoquer aussi bien des sujets qui pourraient paraitre futiles, comme la première boom, que des thèmes plus sérieux comme la perte d’un ami, autant de morceaux de l’existence qui constituent une vie humaine. Leur fantaisie fait de Drache National un spectacle astucieux et surprenant, toujours sur le fil entre l’humour et l’émotion. Au final, on a presque hâte à la prochaine pluie pour pouvoir danser dessous vêtu d’un ciré et de notre sourire ! Merci la Compagnie Anoraks !

La Nuit du Cirque se poursuit avec une forme courte de 35 minutes intitulé Doliprane, elle-même suivie d’un spectacle-concert au nom tout aussi évocateur de Courbatures. Nous voilà au cœur du sujet donc : la santé physique, les douleurs, les blessures, le rapport au corps. Mais n’ayez crainte, aucun misérabilisme ici, juste des paroles sincères, intimes qui viennent témoigner des épreuves autant que des victoires sur les handicaps invisibles, les accidents, et toutes les souffrances du quotidien.

Avec Doliprane, les deux artistes, soumis l’une à l’usure physique dû à la pratique intensive du cirque et l’autre à la maladie chronique, expriment tantôt par le corps, tantôt par les mots leurs expériences respectives. Sans faux-semblants ni plainte, Marcos Caramés-Blanco et Sandrine Juglair livrent une parole brute qui résonne sans doute en chacun de nous, et vient nous questionner sur notre propre rapport à la douleur, à la maladie et comment vivre avec. Sans superflu esthétique, avec un surprenant dénuement, Doliprane va à l’essentiel et c’est somme toute particulièrement efficace.

Il est à présent 21h30 et c’est au tour de deux femmes « qui se sont pris 20 ans dans la face » d’entrer en piste. Accompagnée de leur acolyte Marc Dupont à la batterie, Elice Abonce Muhonen et Chloé Derrouaz vont nous chanter leur chute, leur convalescence mais aussi la fureur de vivre qui en découle. En effet, chacune a connu une rupture dans sa carrière de circassienne suite à un accident. Leur rêve si durement acquis s’est effondré, mais après la réparation vient une nouvelle énergie et l’envie de célébrer, malgré tout, ce corps qui leur a fait défaut, les a trahies, mais qui finalement est encore là, fragilisé mais vivant. Dans cette cérémonie musicale, les deux interprètes s’adonnent à des tours de chant tressés de performances physiques. Le propos est inspirant, galvanisant, même si on reste quelque peu en dehors car la forme prend le pas sur les paroles en anglais, et la succession de chansons ne permet pas totalement d’entrer en connexion avec leur récit. Il faut toutefois saluer le geste artistique, le courage de ces deux battantes car on ne peut qu’admirer l’originalité et la sincérité du propos.

Photo : © Christophe Raynaud de Lage (1) & Michiel-Devijver (2)

La Nuit du Cirque 2025

vu le samedi 15 novembre 2025

Théâtre Onyx 
Pôle Atlantis
1 place Océane
44800 Saint-Herblain

Réservations : 02 28 25 25 00