ƒƒ Article de Victoria Fourel

Créer au plateau les reflets des idoles populaires est un désir profond de toute une jeune génération, qui tente de réinventer ces icônes, de se les approprier, de leur rendre hommage. A partir de chansons de Gainsbourg, Octavio de la Roza allie sa danse à la musique du maître, transforme son répertoire et ses humeurs en expression corporelle.

Au-delà d’une grande maîtrise technique, c’est la diversité des images qui frappe. Lorsque la lenteur et la langueur s’installe, dans un trio tendre, ce n’est que pour laisser place soudain à un pur moment d’amusement, de lâcher-prise. Puis vient le temps de la séduction, de l’érotisme, même. En passant par la dispute, et une forme de violence. Même sans un fil conducteur tangible et droit, ce spectacle est une mosaïque d’émotions, une palette d’états. Gainsbourg y apparaît tantôt festif ou lunaire, tantôt séducteur sans équivoque. Les corps des danseurs ne sont jamais les mêmes sous de belles lumières, et on comprend qu’Octavio de la Roza en apprivoisant le répertoire de Gainsbourg, en apprivoise aussi les rythmes, qui se tendent et se distendent en un instant entre danseurs, entre hommes et femmes.

Au final, les trois danseurs n’exécutent pas une chorégraphie sur La Javanaise, Lemon Incest ou Le Poinçonneur des Lilas, non, ils tâchent de traduire les rythmes et les intonations compliqués du poète en danse, tente de raconter l’univers de Gainsbourg, sans l’illustrer. Bien sûr, on aimerait en entendre plus, avoir parfois davantage de temps pour entendre la voix, pour observer les corps, sans aller de morceau en morceau et de transition en transition. Mais on se laisse malgré tout conquérir par ces images très cinématographiques de tensions, de rapprochements, d’amour et de séparation. On redécouvre Gainsbourg, on l’invite à danser, on le modifie, on lui coupe la parole, puis on l’écoute parler. En partant d’une émotion, d’une facette de l’œuvre de Gainsbourg, on martèle le plateau, on tente de créer des images, de rendre la musique iconique d’un chanteur digne de devenir la matière d’un ballet.

C’est une véritable performance, donc, pleine de rythme et de sensualité, qui met en avant les beaux corps, les étreintes, les lèvres, la soie, mais aussi l’énergie que nous insufflent à tous les premières notes d’un tube qui a marqué nos vies, nos séductions et nos pieds sur une piste de danse.

Voulez-vous danser, Gainsbourg ?
Chorégraphie et Conception Octavio de la Roza
Musique : Serge Gainsbourg et Frédéric Chopin
Avec Octavio de la Roza ou Salvatore Sciancalepore, Camilla Colella ou Pauline Schopfer, Alessandra Berti.

Du 6 au 30 juillet 2016
Tous les soirs à 23h15, relâche les lundis.

Théâtre du Balcon
38 rue Guillaume Puy, 84000 Avignon
Réservation 04 90 85 00 80
www.theatredubalcon.org

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