Critiques // « Un Platonov », diptyque Tchekhov par la Cie du Matamore à l’Opprimé

« Un Platonov », diptyque Tchekhov par la Cie du Matamore à l’Opprimé

Mar 15, 2010 | Aucun commentaire sur « Un Platonov », diptyque Tchekhov par la Cie du Matamore à l’Opprimé

Critique de Pauline Decobert

De l’audace au commun

Un Platonov, adaptation de la fameuse œuvre de jeunesse de Tchekhov, nous est présentée en continuité avec Les trois soeurs, dans un diptyque qui vise à traverser l’oeuvre d’Anton Tchekhov et à mettre en miroir ces deux pièces: l’une porte en germe les éléments qui s’épanouiront dans l’autre ( le temps qui file, les rêves qui s’effondrent, l’inaction, le côté sordide du quotidien, entre autres…) et caractérisent l’œuvre de Tchekhov.

Le personnage Mikhaïl Vassilièvitch Platonov, instituteur de campagne, cache sous un masque de séducteur et d’homme libre, un vide profond qui le ronge, l’enfonce dans un dangereux désespoir. Dans un contexte russe et rural des années 1880 ( selon l’auteur ), des êtres se déchirent, se vautrent dans la grossièreté et la bassesse de magouilles financières et d’intrigues sentimentales sans espoir.

La compagnie du Matamore a le courage de proposer un projet ambitieux. Dans une scénographie très restreinte ( chaises de jardins et planches de bois), les comédiens s’efforcent d’éviter le piège dans lequel tombent souvent les représentations des œuvres théâtrales de Tchekhov : en faire des pièces bourgeoises. L’adaptation du texte tend vers une actualisation du langage de l’auteur pour concerner le spectateur contemporain. Mais les éclats de voix, feux d’artifices, pétards, coups de feux et autres effets spéciaux de fête foraine fatiguent plus qu’ils ne dynamisent la pièce.

Par ailleurs, on apprécie l’aisance à la fois impressionnante et agréable de Patrick Palméro (le banquier Porfiri Sémionovitch). Les autres personnages sont souvent joués avec la volonté de montrer ce qu’il y a de plus sordide, de plus grossier, de plus sale en eux. Cette lecture « entre les lignes » de l’œuvre est audacieuse, hélas on regrette qu’elle se traduise par un jeu qui semble en général un peu plaqué, voire étriqué. Le personnage du jeune Glagoliev (fils du banquier, revenu de Paris), vulgaire et provoquant dans la pièce originale, s’agite dans des spasmes sexuels qui tournent en une sorte de saccade épileptique, baisse son pantalon, etc. , mais ici le vulgaire s’est transformé en commun.

Un Platonov
De : Anton Tchekhov
Mise en scène : Serge Lipszyc et Franck Berthier
Adaptation : Valérie Durin, Serge Lipszyc
Avec : Bruno Cadillon, Gérard Chabanier, Juliane Corre, Judith D’Aléazzo, Valérie Durin, Pierre Ficheux, Catherine Ferri, Stéphane Gallet, René Jauneau, Julien Léonelli, Serge Lipszyc, Sylvain Méallet, Patrick Palmero, Marc Ségala
Scénographie : Sandrine Lamblin
Lumières : Jean-Louis Martineau

Du 24 Mars au 4 Avril 2010

Théâtre de l’Opprimé
78-80 rue du Charolais, 75012 Paris – 01 43 40 44 44
www.theatredelopprime.fr

www.la-compagnie-du-matamore.fr

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