© Géraldine Aresteanu
ƒƒ Article de Sylvie Boursier
Commençons par la fin, une boxeuse au maquillage effrayant et au sourire grimaçant de Joker, nous souffle, complètement stone « Elle m’a envoyé une combinaison magnifique dans la gueule, tellement beau que j’ai souri, j’ai reçu les coups et j’ai souri de béatitude ». On pense à la chanson de Nougaro « Quatre boules de cuir, mes poings contre les siens, moi le jeune puncheur, boxe, boxe, lui, le vieux Kid Marin. Kid Marin c’est un grand et Dieu sait que je l’aime mais ses gants et mes gants ne pensent pas de même ».
Pendant une heure et trente minutes, on va assister à la transformation d’une bimbo ordinaire en Rocky, une métamorphose violente, radicale, existentielle et sublime. Le corps humain est le lieu de toutes les utopies selon Michel Foucault, de toutes les rédemptions aussi. Qui dira la beauté de la boxe ? Plus proche dans Transformers du dépassement, de la quête que du record. La pièce aborde ces thèmes grâce à la performance bluffante de la comédienne, Emilie Prévosteau, accompagnée de son coach (le lumineux Romain Dutheil). La fusion de ces deux êtres s’opère par la synchronisation des muscles, mise en mots sous la plume métaphorique d’Amine Adjina.
Tout est ritualisé, les coulisses, le maquillage, l’entrée sur le ring, comme l’acteur qui entre en scène. Transformers montre aussi le rapport physique et mimétique que l’on a avec les images. Les plus beaux moments sont ceux où les deux comédiens jouent avec les images projetées de Raging Bull et de Rocky, telles des ombres projetées sur la grande feuille de papier/écran. C’est toute l’enfance du cinéma qui apparaît. Quel môme n’a pas à la sortie d’un western marché comme John Wayne, n’a pas joué des poings comme Sylvester Stallone dans Rocky.
Vas-y, champion, pour Raging Bull, Robert de Niro, méconnaissable, a pris trente kilos. Dans Rocky Sylvester Stallone montre l’avant-combat, les séances d’entraînements en extérieur sous les trompettes de Bill Conti et le coup de maestria final, tout est sublimé même si Rocky échoue, il est devenu un personnage de cinéma légendaire. Le film est un conte raconté par un acteur, qui en prend plein la figure au sens propre. L’acteur et le boxeur ne font qu’un pleinement dévoués à leur public.
Emilie Prévosteau et Romain Dutheil jouent sur différents registres, changent de visages, s’adressent à nous tels des funambules, entre imaginaire et émotion pure. Le corps est une fiction, une projection de nos peurs et de nos désirs. Il est rare de voir aborder ces sujets au théâtre avec cette délicatesse et sans aucune lourdeur, très simplement.
Allez les voir !
© Géraldine Aresteanu
Transformers d’Amine Adjina
Mise en scène : Emilie Prévosteau et Amine Adjina
Costumes : Majan Pochard
Décor : Frédéric Fruchart
Son : Fabien Aléa Nicol
Avec : Hélène Chevallier en alternance avec Emilie Prévosteau et Romain Dutheil
Tout public à partir de 14 ans
Durée : 1h30
Jusqu’au 21 janvier à 19h, samedi 16h30, relâche dimanche
Les Plateaux Sauvages
5 rue des Plâtrières
75020 Paris
Tournée :
31 janvier au 4 février 2025, Théâtre 71, Malakoff
27 et 28 mars 2025, Espace Bernard-Marie Koltès, Metz
7 au 11 avril 2025, Les Plateaux Sauvages, Paris
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