ƒƒ article de Camille Scordia

© Melisa-Stein

Sur une scène transformée en plage de sable fin, un vieillard silencieux est assis, face à la mer, au crépuscule de sa vie. Accompagné de quelques effets personnels, il semble être venu pour essayer de profiter du peu de temps qu’il lui reste à vivre en se remémorant, intérieurement, des scènes de sa vie. Mais son âge et son ralentissement général rendent chaque mouvement périlleux : avec humour, il échoue dans toutes ses tentatives d’actions. Autour de lui, une poignée d’objets renferment, telles des capsules, un souvenir, une émotion, un plaisir du passé : le mouchoir d’une aimée disparue, une bague de fiançailles, une bière… À l’aube de sa mort, il exhume ce passé sans tristesse, mais avec douceur et sérénité.

Facétieux et drôle, le personnage du vieillard amuse par ses maladresses, touche par la relation tendre qu’il entretient avec le marionnettiste qui l’habite. Malgré un registre pathétique latent – la fin de vie d’un vieil homme face à la mer – Soleil Couchant réussit l’exploit de s’inscrire dans la veine du comique burlesque. À quelques exceptions près, les gags trouvent tous une issue comique, allégeant ainsi une atmosphère qui aurait pu confiner au pathétique. Ce serait sans compter le talent d’un marionnettiste, excellent interprète, qui donne, à chaque mouvement, de nouvelles preuves de son habileté. Des pieds aux inflexions de la tête, en passant par les mains, chaque geste véhicule une émotion, un état d’esprit, une pensée qui, sans être dites, apparaissent avec clarté. Maîtrisées de bout en bout, ces postures, emblèmes du langage non verbal, permettent à la marionnette d’être véritablement incarnée, pour, in fine, s’affranchir de celui qui l’anime.

Manipulant à vue, l’interprète, Alain Moreau tient avec grâce une posture complexe : il choisit de ne pas totalement s’effacer derrière la marionnette, mais plutôt de créer avec elle une relation tendre de complicité. Ce faisant, il affirme son existence de comédien marionnettiste sans briser la convention de la marionnette : le spectateur croit en la vie du personnage marionnette, tout comme en celle de son manipulateur. Avec Soleil Couchant, le Tof Théâtre livre une réflexion poétique autour de la position subtile de l’interprète marionnettiste.

Soleil Couchant
Conception, mise en scène, scénographie, interprétation, marionnette Alain Moreau
création musicale Max Vandervorst
participation à l’écriture et regard extérieur Laura Durnez
création lumières Dimitri Joukovski
regards complices Delphine Bibet, Thierry Hellin, Seydou Boro et les OKidoK – Xavier Bouvier et Benoit Devos
réalisation de la scénographie et de divers accessoires Geneviève Périat
aide à la scénographie Anne-Sophie Vanderbeck
aide à la réalisation du costume Émilie Plazolles
diffusion et mise sur orbite My-Linh Bui – Kurieuze et Cie
production Tof Théâtre
coproduction Festival Onze à table Biennale de la Marionnette et des Formes manipulées – Mayenne, Sarthe, Maine-et-Loire, My Luciole, accompagnement et production de spectacles vivants – Paris
avec le soutien de Wallonie-Bruxelles International et du Centre Wallonie-Bruxelles à Paris
Du 7 au 8 mai 2015
La Maison des Métallos
94 rue Jean-Pierre Timbaud, Paris 11e
Mº ligne 2 arrêt Couronnes
ou Mº ligne 3 arrêt Parmentier
Réservation 01 47 00 25 20

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