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Show, de Hofesh Shechter, Théâtre de la Ville – Théâtre des Abbesses

Déc 20, 2018 | Commentaires fermés sur Show, de Hofesh Shechter, Théâtre de la Ville – Théâtre des Abbesses

ƒƒƒ article de Nicolas Brizault

Comment dire ? Comment parler de ce spectacle, de cette heure splendide, bouquet de pulsions dans tous les sens et merveilleusement construit en même temps, folie, délicatesse, vie et mort et vice-versa ? La peur, le sexe et l’exécution, un cirque, la rue médiévale et quasi Techno, les rythmes, les sursauts, les fous, les dépassés par le temps : tout explose sous le talent de Hofesh Shechter et de huit danseurs, ces jeunes issus de sa compagnie Shechter II quatre femmes, quatre hommes, beaucoup plus en fait, beaucoup moins ici, là, une énergie colossale qui nous secouent, nous fait l’amour.

Comment déborder de joie et de pulsions vives et tenaces après cette heure où la finesse prouve qu’elle peut être aussi violente, mauvaise, ici dans un sens plus que positif ? Une heure où les têtes explosent, les corps s’affaissent, rebondissent et se font justice, après moult mensonges de simplicité, une heure où chaque mouvement, expression sont perceptibles et prennent une évidence allégée ? Le sombre et l’or s’épousent. Les cris prennent matière, l’ancien pénètre le moderne qui, lui, surpris, vient jusqu’à nous pour nous faire perdre toute conscience du temps, de la vérité, oui et non s’écrasent avec souplesse l’un contre l’autre, nous prenons connaissance de la vie, l’essence d’une cheville, d’un dos, alors qu’un poignet assassine. La sensualité veille, imprègne tout, mêle les temps, les baisers, les coups de poings. Urgence et suspension. Nous perdons la tête. Une catharsis infinie.

D’autres spectacles de Hofesh Shechter sont bien plus gigantesques. Ici, les fulgurances sont simplement extrêmes, c’est tout. C’est tout. Le talent de ces danseurs est palpable. Les saluts nous transpercent encore et nous transposent vers le sol, cette magie barbare est encore là, revient encore, et puis part, plus rien. Il faut se rhabiller et quitter ce qui était une salle de spectacle, à Paris. Difficile d’y croire, le faux est dans la salle, la rue, le vrai sur scène. Et pourquoi cela s’arrête d’ailleurs, dansons avec le crime, sans savoir pourquoi, joyeux. Ce plaisir si intense et mouvementé qui nous tombe dessus, violemment. Cette masse extasiante que l’on réclame poings levés si on la sent s’éteindre.

Comment écrire un article sain lorsqu’on n’est plus sauf ? Comment saisir le sens, celui-ci et celui-là, direction, explication ? Show nous transperce, notre innocence est ailleurs. Show est victorieux, et nous ne sommes pas prêts de nous laisser complètement transpercer ce soir par l’idée de la souffrance, de la laideur ou du danger. Tout simplement en ayant sentis et vus que ces garces, ce salopard existent, bercés par la rapidité immonde qui nous soutient. Nous sortons heureux et emportés, la noirceur balancée au visage. Pas envie de comprendre, mais de se laisser faire, encore, oui.