© Simona Boccedi

ƒƒƒ article de Toulouse

En faisant son Show, Hofesh Schechter fait trembler le Théâtre des Abbesses, et présente sans doute une des pièces les plus puissantes de cette saison. Le chorégraphe dévoile dans cette création inédite une chorégraphie au cardiogramme, des corps pétris d’adrénaline. Plus que jamais, la jeunesse insolente et l’énergie généreuse de ces danseurs flambent les planches. Ils paraissent à nos yeux des géants qu’on tente d’approcher avec une curiosité excitante mais dangereuse.

Ici, Schechter explore la gestuelle propre au spectaculaire et au Show dans toute sa grandiloquence. En ressort ce que nous pourrions nommer comme un joyeux cabotinage chorégraphique qui, mêlée avec l’écriture si singulière de Schechter, déplace les attentes, créé de nouvelles images et sensations. Le résultat est tout à fait inouï, bouleversant et unique. En jouant des nombreuses images d’Epinal propre au spectaculaire, il réussit – un peu à la manière de Maguy Marin avec May B – à créer des figures étranges issues de ces Pierrots, ces clowns, ces Monsieur Loyal, que nous retrouvons sans cesses dans l’imagerie fantomatique du théâtre forain. Créatures mystérieuses et déroutantes qui, de la pantomime aux danses traditionnelles, injectent dans leur mouvement des élans de transes et de danse tribales, qu’aime égrainer, avec parcimonie et intelligence, le chorégraphe israélien au rythme frénétique et infatigable des tambours. L’écriture de Schechter, rapiécée au folklore et aux danses urbaines, est faite de relief et de milles nuances. En utilisant ces personnages canoniques du théâtre, en chemises à jabots et aux culottes bouffantes, à la fois indémodables et pourtant sortis d’un autre siècle, Schechter déplace le curseur en organisant une cérémonie aussi chatoyante que macabre. Ici, sur la scène et au grand jour, on s’amuse à se tuer des manières les plus cruelles qu’on puisse imaginer. Peut-être le « pour de faux » du théâtre excuse-t-il le meurtre ? Mais la récurrence de ce jeu morbide devient si étouffante, que le spectacle glisse peu à peu des majestueuses farandoles aux tableaux saccadés de scènes d’exécutions. Un contre-point radical certes, mais avant tout déroutant, et qui laisse le spectateur tout à fait intranquille.

La manière d’écrire le mouvement qu’a Schechter est réellement unique et fait sensation. Il signe là un spectacle d’une beauté immense, qui ne pourra pas ne pas marquer les esprits.

Show

Chorégraphie & musique  Hofesh Shechter
Lumières  Lee Curran et Richard Godin
Directeur des répétitions  Chien Ming Chang
Costumes  Laura Rushton
Direction technique  Holly Gould
Régie lumières  Katherine Elliot

Avec  Riley Wolf, Juliette Valerio, Zunnur Sazali, Adam Khazhmuradov, Natalia Gabrielczyk, Emma Farnell-Watson, Robinson Cassarino & Neal Maxwell

Du 5 au 21 avril

Au Théâtre des Abbesses
31 Rue des Abbesses
75018 Paris

Métro Abbesses ligne 12, Pigalle ligne 2

Réservation au 01 42 74 22 77

www.theatredelaville-paris.com

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