À l'affiche, Critiques // São Paulo Dance Company, chorégraphies de Uwe Scholz, Marco Goecke et Joëlle Bouvier, Chaillot-Théâtre national de la Danse

São Paulo Dance Company, chorégraphies de Uwe Scholz, Marco Goecke et Joëlle Bouvier, Chaillot-Théâtre national de la Danse

Avr 22, 2019 | Commentaires fermés sur São Paulo Dance Company, chorégraphies de Uwe Scholz, Marco Goecke et Joëlle Bouvier, Chaillot-Théâtre national de la Danse

Oiseau de feu © Wilian Aguiar

ƒƒƒ Article de Philippe Escalier

À les voir à l’œuvre sur scène comment ne pas regretter qu’il s’agisse de leur tout premier passage à Paris ? Pour leur anniversaire, ils fêtent leurs dix ans, c’est bien la São Paulo Dance Company dirigée par Inês Bogéa, grande figure de la danse brésilienne, qui nous fait le précieux cadeau de trois pièces chorégraphiques dont la créativité et la diversité ont enchanté la salle du Théâtre national de la Danse durant trois soirs.

Dès les premières minutes, sur une musique de Rachmaninoff, la Suite pour deux pianos, l’on mesure tout ce qui fait l’intérêt de voir un spectacle d’une compagnie brésilienne de haut vol. Les danseurs, en blanc et noir, nous donnent le meilleur d’une pièce signée Uwe Scholtz, datée de 1987, qui marie, dans l’harmonie et l’élégance, classique et modernité. Aux plus belles figures traditionnelles, s’ajoutent des enroulés tout en sensualité. Le spectateur reste subjugué par la virtuosité et la finesse des mouvements, hommage direct aux dessins de Wassily Kandinski, (quand la chorégraphie rejoint la calligraphie !), dont quatre représentations sont projetées sur le mur, en guise de ponctuation, dans les mêmes couleurs duales que les costumes des artistes. La pureté du geste épouse parfaitement celle de la musique. Après ces vingt et une minutes de réel bonheur, suit un étonnant Pas de Deux sur L’Oiseau de feu de Stravinsky. Marco Goecke, dans cette création de 2010, fêtant les cent ans de l’œuvre, propose une allégorie du scénario mis en musique par le grand compositeur russe. L’on assiste alors une courte symphonie de mouvements stylisés à l’extrême, tournant autour du thème de l’oiseau. Ana Paula Camargo et Nielson de Souza dialoguent durant huit minutes dans un magnifique langage corporel reprenant des formes quasi géométriques dans des mouvements mécaniques où la légèreté est pimentée d’une formidable intensité. L’on ne peut que saluer cette récente entrée au répertoire.

S’il fallait de l’émotion pour clore ce moment exceptionnel, il ne pouvait y avoir meilleur choix que Odisseia, créé spécialement pour la compagnie en 2018 par Joëlle Bouvier, dont personne n’a oublié le sublime Tristan et Isolde. Si les musiques, très hétérogènes, l’on saute de Jean-Sébastien Bach à Heitor Villa-Lobos, marquent bien les divers épisodes qui s’enchaînent, l’œuvre est d’une homogénéité et d’une puissance évocatrice rares. Les vents, l’univers marin, les départs dans l’espoir d’une vie meilleure, les drames qui unissent, les corps balancés par les flots sont retranscris avec réalisme et une force poétique émouvante. L’ensemble de la compagnie, dans une grande énergie, est appelée sur le pont, pour défendre un cri humaniste poussé avec un sens esthétique touchant. Dans des tenues colorées et légères destinées à ancrer l’épisode dans le temps présent, disant bien la fragilité des migrants, les danseurs donnent le meilleur d’eux-mêmes, suscitant une émotion palpable, d’où le pathos est exclu. La longue ovation finale est le plus bel hommage rendu à une compagnie jeune mais qui a démontré ses capacités à se hisser au niveau des meilleures troupes et que l’on souhaite revoir très vite à Paris.

 

 

Suite for two pianos © Wilian Aguiar

 

SUITE FOR TWO PIANOS (1987), chorégraphie, décor, et costumes Uwe Scholz

Recréation Giovanni Di Palma

Musique Sergei Rachmaninoff (Suite pour deux pianos Opus 17, par Martha Argerich et Nelson Freire)

Lumière André Boll

Avec Ana Roberta Teixeira, Luciana Davi, Thamiris Prata,  André Grippi, Bruno Veloso, Diego de Paula, Geivison Moreira, Vinicius Vieira, Yoshi Suzuki

 

L’Oiseau de Feu – Pas de Deux, chorégraphie, scénographie, costumes Marco Goecke

Musique Igor Stravinsky (L’Oiseau de feu, berceuse et final)

Lumière Udo Haberland / Wagner Freire

Dramaturgie Nadja Kadel

Avec Ana Paula Camargo, Nielson de Souza

 

Odisseia, chorégraphie Joëlle Bouvier

Musique Bachianas Brasileiras (extraits) de Heitor Villa-Lobos, La Passion Selon Saint Mathieu (extraits) de Jean- Sébastien Bach, Melodia Sentimental de Heitor Villa-Lobos (paroles de Dora Vasconcellos)

Poème Pátria Minha de Vinícius de Moraes (voix de Maria Bethânia)

Lumière Renaud Lagier

Avec Ammanda Rosa, Ana Roberta Texeira, Leticia Forattini, Luciana Davi, Luiza Yuk, Renata Peraso, André Grippi, Bruno Veloso, Daniel Reca, Hiago Castro, Nielson de Souza, Otavio Portela, Yoshi Suzuki, Thamiris Prata, Joca Antunes

 

18-20 avril 2019

Durée 1h40 entractes compris

 

Chaillot-Théâtre National de la Danse

Salle Jean Vilar

1, place du Trocadéro

75116 Paris

Infos et réservations 01 53 65 30 00

www.theatre-chaillot.fr

 

 

Be Sociable, Share!

comment closed