À l'affiche, Critiques // Rosie Bazar de et mis en scène de Geneviève de Kermabon, au Théâtre Paris-Villette.

Rosie Bazar de et mis en scène de Geneviève de Kermabon, au Théâtre Paris-Villette.

Mai 21, 2016 | Commentaires fermés sur Rosie Bazar de et mis en scène de Geneviève de Kermabon, au Théâtre Paris-Villette.

ƒƒ Article de Victoria Fourel

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© DR

« Et toi, qu’est-ce que tu penses du porno ? », « Ma première fois, je m’en rappelle… ». A partir de témoignages, Geneviève de Kermabon prend tour à tour tous les visages de l’adolescence, tous les corps, toutes les jeunesses. Elle raconte dans ce spectacle les désirs et les souvenirs – déjà vieux – des émois adolescents, les anecdotes embarrassantes et les opinions qu’ont les ados sur le corps, sur la maîtrise qu’on en a, le regard qu’on lui porte.

Pour se glisser dans toutes les peaux, la comédienne a choisi le bricolage ingénieux, qui est toujours source de théâtre. Elle se glisse derrière des masques de terre, de papier, de plastique, qu’importe. Elle disparaît derrière la silhouette colorée aux jambes démesurées de Victor, puis elle rentre dans le corps encombrant de Rosie, dont le visage est une loupe grossissante. On ne peut nier un fourmillement d’idées, un imaginaire débordant (Rosie, justement, adolescente un peu complexée et très ronde, a des seins énormes en demi planisphères de salle de classe, symbole de l’encombrement qu’est un corps, mais de sa richesse, aussi). Les marionnettes prennent vie, et on tente de capter chaque personnage. Très joli parti pris : aucun pantin ne ressemble au suivant. Chacun à sa matière, sa couleur, son moyen de parvenir jusqu’à nous : des roulettes, un bonnet, une perruque, une robe. Et si c’est solide techniquement, ça l’est tout autant dans la mise en scène.

Sur le fond, on est toujours touché de ce qu’un presque enfant peut dire sur son corps. Car sous prétexte que tout est donné tout cuit aux jeunes, entre télévision, porno, assouplissement relatif des mœurs et popularité écolière, on ne prend pas toujours le temps d’écouter ce que les mots « sexe » et « amour » signifient, ou même de s’en moquer un peu. Il y a des moments émouvants, des déceptions, des opinions sur soi et sur le corps, des surprises, de la naïveté. Malheureusement, on ne peut s’empêcher de penser que parfois, le décalage est fort entre ce que peut dégager une femme qui n’a rien d’une adolescente, et ce qui est dit. Sans que l’on soit forcément dans la caricature, le ton, les mots, les postures ne sont pas toujours justes, et on ne parvient pas vraiment à atteindre ce qu’est exactement un jeune. Parfois, la comédienne tombe dans une fausse gouaille, un sur jeu, que l’on a tendance à retrouver dès qu’un adulte essaie de jouer l’adolescence. Cette tendance vient sans doute en partie du choix du masque qui oblige à rentrer dans une sorte d’illustration avec les mains, et étant donné ce que les années collège ont de discrétion, de timidité et d’embarras, c’est un peu décalé d’être si démonstratif.

C’est une montagne de travail que de créer de toutes pièces ces adolescents de papier mâché. Et ça l’est tout autant d’adapter ces témoignages à la scène, seule, en essayant de coller à une réalité parfois un peu gênante. Même s’il y a un décalage dans le ton, parfois une lecture qui confond enfance et adolescence, il y a de l’imaginaire et du respect, de l’ingéniosité, aussi. Et ce notamment quand la comédienne joue la grand-mère de Rosie, qui elle aussi a une adolescente en elle, pas si lointaine. L’adolescence n’est peut-être d’ailleurs jamais vraiment très loin.

Rosie Bazar
Texte Geneviève de Kermabon
Mise en scène Geneviève de Kermabon
Avec Geneviève de Kermabon.

Mercredi 18 et Jeudi 19 mai

Théâtre Paris-Villette
211 avenue Jean Jaurès 75019 PARIS
Métro Porte de Pantin (ligne 5)
Réservation 01 40 03 72 23
www.theatre-paris-villette.fr

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