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Rêche, composition chorégraphique de Myriam Gourfink, Festival d’Automne, Panthéon – Centre des monuments nationaux, Paris

Sep 27, 2024 | Commentaires fermés sur Rêche, composition chorégraphique de Myriam Gourfink, Festival d’Automne, Panthéon – Centre des monuments nationaux, Paris

 

© Patrick Berger

 

ƒƒƒ article de Nicolas Brizault-Eyssette

Rêche Comment dire… Certes il y avait la magie du lieu, bien entendu. Oui, la musique était de celle qui vous transporte, vous surprend à demi parce que vous voyez des ordinateurs partout et vous vous faites des idées. Oui, ce transport véritable vient juste de ces dix doigts à gauche de la scène, dix autres doigts à droite qui semblent effleurer une peau tendue, une lune métallique à peine gigantesque. Vous sentez presque le résultat d’un geste minimal. Et vous revenez vers ces sept corps. Ils sont arrivés dans un silence absolu, déjà les voix publiques s’étaient faites minimales dans cet univers intemporel du Panthéon. Le respect. Certes, un téléphone ici où là, que voulez-vous… Sept corps portent chacun une sorte de costumes blanc, aux manches gris perles, ou l’inverse, à peine. Les uns après les autres, les unes après les autres, ils se couchent au sol, le rejoignent plutôt, se rejoignent au sol. Un corps gris s’étend en travers d’un autre, sans le toucher, en le traversant plutôt, un autre prend place, encore un, une, les sept forment comme un rempart blanc-gris, les lignes se mêlent, se superposent, on ne peut plus parler de corps, ils n’existent plus, ce sont plutôt des idées de volumes. Une masse légère, nuageuse, un amas cellulaire, qui ne bouge plus, ou alors c’est un mouvement constant, inexistant et dont la présence est prenante. Oui, nous sommes pris. Un instant le regard attiré sur l’un ou l’autre des musiciens pour de vrai visible, puis retour vers l’étoile gigantesque sur le sol, un bras a bougé, un peu, un corps, ce pied, là, une épaule disparaît sous des côtes, tout est blanc. Et gris. Tout bouge. Si, vraiment. Regardez, sentez. Le son nous prend et nous ne bougeons plus, nous. Eux, oui. Un regard se lève vers vous, impression fugitive d’une apparition. Une chevelure, une barbe, des épaules. Et cette musique qui prend, soulève et porte. Tout est là et plus rien re reste. Apparition, disparition. Ce ne sont pas des corps, ce sont des cellules, un début de vie, une naissance. Lente. Cette lenteur révèle une infinité de choses, de gestes. On essaye d’imaginer un accéléré, une caméra folle ou généreuse. On revient au calme, à la vie, au vrai qui nous est offert, là. Oui, c’est un immense cadeau, devant nous. Un corps apparaît davantage, se lève presque et n’est plus touché, ne touche plus. Impossible, le contact revient, la presque caresse imaginée, la construction, la création plutôt. L’impression d’être dans une mère, une mère qui ignorerait même l’être. Elle ne sait pas encore, les cellules se connaissent à peine. La naissance viendra, oui, nous avons tout notre temps.

Rêche, de Myriam Gourfink est un cadeau. Même si les danseurs « évoluent » si l’on peut dire, entre les créations d’Anselm Kieffer, conçues lors de l’entrée au Panthéon de Maurice Genevoix. Rappel de crimes de la Première guerre, rappel de crimes tout court. Myriam Gourfink fait du bien, oui, justement, de montrer la vie. Le métro n’existe plus, l’Univers se serait presque calmé et allongé là, devant nous. Des masses sublimes et fortes évoluent. Nous apprenons. Nous apprenons la vie, la joie, demain. Oui, nous sommes à Paris, et, oui, la réalité existe, nous étions à deux doigts, face à tant de vrai, de ne plus y croire, ne plus y penser. Nous imaginons le travail, la mise en place de ce spectacle, la recherche, la douleur, la beauté ressentie. Ils ne travaillent pas, ils vivent. Ils sont. Et nous l’offrent. Après toute cette énergie très lentement étirée, ces longs touchés, ce visage qui disparaît, une cuisse là, un pied oui, comment arrivent-ils à rendre vie cette lenteur ? Est-ce une prière, une idée, un début ? Nous avons simplement du vrai, au sol, devant nous, là. Du minuscule dans l’immense. Au ras du sol en plein Panthéon. On perçoit les difficultés, les respirations, les tremblements. Ils deviennent nôtres. Et nous leur en offrons également. Ils méritent, ces sept-là, dans cet espace presque religieux, entre les aquariums montrant la folie et la douleur, ils nous ont déballé la vérité, la vie. Ils nous ont appris. Et on ne sait comment les remercier. La pluie même en sortant semble, vivante, minuscule et étudiée. Rêche est comme une immense cure de confiance. Tous les sept sont extraordinaires. Ils nous sidèrent. Comment tiennent-ils ? Ah, c’est vrai, ce sont juste des images de vie, des idées d’échanges. Tellement évident qu’ils ne sont pas tout à fait vrais. Un autre monde.

 

© Patrick Berger

 

Rêche, composition chorégraphique de Myriam Gourfink

Interprètes : Esteban Appesseche, Suzanne Henry, Noémie Langevin, Deborah Lary, Matthieu Patarozzi, Annabelle Rosenow, Véronique Weil

Composition musicale et basse électrique : Kasper T. Toeplitz

Percussions : Didier Casamitjana

Costumes : Catherine Garnier

Lumières : Sophie Lepoutre

Régie générale : Zakariyya Cammoun

Administration : Matthieu Bajolet

Production : Mina de Suremain

Communication : Cédric Chaory

 

Du 25 au 28 septembre 2024

Durée : 1h

 

Panthéon – Centre des monuments nationaux avec l’Atelier de Paris – Centre de développement chorégraphique national

Place du Panthéon

75005 Paris

Réservationwww.festival-automne.com

 

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