© Hervé Veronese

ƒƒƒ article de Nathalie Tambutet

La foule se densifie et se presse pour entrer dans la Cité internationale. Deux files d’attente s’allongent derrière les poteaux à corde. Les portes s’ouvrent, nous descendons des escaliers sur plusieurs niveaux pour rejoindre la salle Galerie. L’impression est celle d’une descente aux abris pour se protéger, comme en cas d’alerte en temps de guerre. N’est-on pas en guerre dans le monde dans lequel nous vivons ?

La scène se dévoile à nous. Elle est à l’opposé de cette perception. Elle est à l’image d’un plateau de télévision. En fond de scène, un immense écran de cinéma éclaire le tableau, de part et d’autre de cet écran, côté cour, une station de musique live, côté jardin deux personnes avec des papiers et des micros et un écran de télévision. Côté cour, se trouve l’équipe technique. Nous découvrons une scène contemporaine, multimédia pour un spectacle multiforme. Une présentation où les médias règnent, ce qui est à l’image du monde des médias actuels, ils sont présents partout. Une mise en scène  flamboyante et vivante, au service d’un message à clarifier. Cette scène d’ouverture met en lumière ce qui va se jouer sur le plateau et devant nous : la force et la puissance de la vie dans les pays en guerre, la vie est bien plus forte que la destruction. Et nous, nous sommes les témoins passifs et actifs de ces guerres par médias interposés, qui déshumanisent ce qui se passe réellement pour les personnes qui vivent dans ces régions en guerre.

Initialement, dès 2011, Aurélie Charon réalisait des séries documentaires pour Radio France sur les jeunes du monde, engagés pour changer les lignes. Puis le projet a émergé de faire dialoguer cette jeunesse internationale avec en toile de fond cette question : quel est le rapport de ces jeunes à la mémoire et à l’histoire ? La vraie question est : qu’est-ce que l’on transmet malgré soi et de quoi cette jeunesse va-t-elle se saisir pour se construire, vivre et évoluer, participer au monde en mouvement ? A son tour, qu’est-ce que cette génération va transmettre à celle qui suit ? C’est bien l’objet de ce nouveau spectacle, celui de la Relève, la continuité de Radio live. Quelles questions se pose la nouvelle génération, celle de la relève, celle issue des exils contraints des aînés? Intégrer la génération suivante est la suite de ce projet.

Deux volets à ce spectacle, celui des récits croisés et celui des portraits. Ce projet va un peu plus loin que l’échange entre les jeunes de pays différents. En effet, ces jeunes ont poursuivi leur chemin depuis une dizaine d’années. C’est un mélange d’interviews en live, de retours sur leur passé, d’enquêtes auprès de leurs familles et sur la région dont ils sont issus, de témoignages, de souvenirs, ceux marquants de leur jeunesse dans ces pays, de dialogues avec la journaliste, toujours en live ponctués de musique live et/ou de chant pour restituer l’univers dans lequel ces jeunes ont évolué au service du récit de chacun. Récit qui permet de lire ce dont chacun s’est saisi pour se construire son parcours de vie. Le dispositif scénique est à l’image de cette génération connectée, ultra connectée. Est-on mieux informé quand on est ultra connecté ? Comment perçoit-on la réalité au travers de ces images ?

Dans Récits Croisés, nous découvrons le parcours d’Amir Hassan, gazaoui et d’Hala Rajah, Syrienne. Deux récits, deux parcours différents. La bande de gaza apparaît par images interposées et les paroles d’Amir rendent vivantes ces images de guerre. L’émotion du discours en live fait surgir en nous un autre regard sur la guerre et nous plonge au cœur de la vie de personnes concernées. Nous sommes immergés dans leur univers, celui qu’ils se construisent pour survivre et vivre. C’est une autre perception de la guerre et de ce qui se transmet qui apparaît. Comment ne pas se sentir coupable d’être vivant et de vivre libre au lieu d’être enfermé sans avenir dans la bande de Gaza ? Comment combattre ce sentiment de culpabilité vis-à-vis de ceux qui sont restés ?

Avec Hala, nous découvrons un parcours guidé, subit puis choisi mais d’abord influencé par le positionnement politique de son père, communiste et animé d’égalité et de liberté. Cet appel de liberté forcera sa propre famille à fuir son pays pour survivre et révélera à cette jeune fille une autre sorte d’enfermement, celui de la religion. Ces jeunes ne sont pas si différents de nous. Ils déploient leur imaginaire, emplit des petites choses de la vie dont ils témoignent avec respect et un humour rétrospectif sur le monde de leur enfance.

Un triangle en forme de panneau publicitaire est posé devant l’espace de sons et de musique, en référence au panneau « on air » de la radio pour rappeler que là on est en direct, on ne triche pas, il n’y a pas de montage mais du live à chaque représentation, qui sera toujours différente de celle qui la précède. Ainsi défile ce message : « Ici tout peut arriver ».  Le chant, la musique accompagnent la reviviscence des souvenirs, nous plonge dans l’ambiance et témoignent du vécu, du réel.

Un spectacle magistralement mis en scène pour nous donner à ressentir, grâce aux discours vivants et en live la guerre vécue du dedans et non du dehors et hors du flot permanent d’images et d’informations qui déshumanisent les gens qui vivent ces guerres. Un spectacle qui nous transporte, nous emporte au cœur de l’actualité du monde et nous amène à nous questionner sur la transmission. « Les enfants sont la mémoire vivante de l’histoire et le futur d’un monde à venir ».

© Hervé Veronese

Radiolive-La Relève, conception, création, image et écriture scénique Aurélie Charon et Amélie Bonnin

Avec pour les récits croisés : Hala Rajab et Amir Hassan (mardi), Sumeet Samos et Yannick Kamanzi (mercredi)

Pour les portraits : Hala Rajab (jeudi) et Sumeet Samos (vendredi)

Musique live, en alternance : Dom la Nena et Emma Prat

Images réalisées avec Thibault de Châteauvieux

Montage vidéo : Céline Ducreux et Mohamed Mouaki

Espace : Alix Boillot

Régie générale, création et régie lumière : Thomas Cottereau

Régie vidéo et son en alternance : Vincent Dupuy, Olivier Fauvel et Samuel Favart-Mikcha

Rencontres issues des séries radiophoniques et des voyages d’Aurélie Charon et Caroline Gillet

Dans le cadre du festival Transforme – Paris initié par la Fondation d’entreprise Hermès

Du 15 au 18 octobre 2024

Mardi et mercredi : 20h

Jeudi et vendredi : 19h

Durée :  2h15 (mardi, mercredi : récits croisés) ou 1h15 (jeudi, vendredi : portraits)

Tout public à partir de 12 ans

Avertissement : Certains passages des récits font référence à des épisodes historiques violents et peuvent heurter la sensibilité des plus jeunes ou des personnes sensibles.

Théâtre de la Cité internationale

Salle galerie

17, boulevard Jourdan

75014 Paris

accueil@theatredelacite.com

Tournée 2024-25

18 et 19 novembre 2024 : Le Méta – CDN Poitiers

22 et 23 novembre 2024 : La Paillette – dans le cadre du Festival TNB | Rennes

26 au 28 novembre 2024 : Bonlieu Scène nationale d’Annecy

3 et 4 décembre 2024 : Théâtre de la Croix-Rousse, Lyon

11 et 12 décembre 2024 : Comédie de Valence – CDN Drôme Ardèche

18 et 19 décembre 2024 : MC2 : Grenoble

7 février 2025 : Comédie de Reims dans le cadre du Festival FARaway

28 mars 2025 : Théâtre Paul Éluard, Choisy-le-Roi

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